Intervention de Roch-Olivier Maistre

Réunion du mercredi 6 octobre 2021 à 14h00
Mission d'information visant à identifier les ressorts de l'abstention et les mesures permettant de renforcer la participation électorale

Roch-Olivier Maistre, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) :

Notre première mission est la garantie de communication, d'expression et de liberté éditoriale. Notre institution est souvent rebaptisée le « gendarme de l'audiovisuel », bien que je préfère le terme de « régulateur ». Notre première mission est de défendre cette liberté d'expression. Nous sommes dans une période d'« esprit de censure », comme le nomme Monique Canto-Sperber dans son ouvrage Sauver la liberté d'expression. Le législateur a fixé des limites à cette liberté, et le CSA veille, quand ces règles sont transgressées, à intervenir pour effectuer une mise en demeure et engager des procédures de sanction si nécessaire. Nous demeurons particulièrement attentifs aux règles d'indépendance qui pèsent sur les éditeurs de radio et de télévision. Ces points figurent dans les cahiers des charges des chaînes publiques et dans les conventions des chaînes privées. La délibération-cadre de 2018 relative à l'honnêteté des programmes et de l'information impose aux éditeurs de respecter les comptes rendus, commentaires et autres présentations qui découlent des élections. Il est nécessaire de veiller à ce que le choix des extraits et des commentaires ne soit pas dénaturé. Les éditeurs des services de télévision doivent indiquer systématiquement l'origine des images. Ils doivent également veiller à ce que l'utilisation des archives ne donne pas lieu à des montages qui déformeraient le sens original du document tout en mentionnant la source et sa date.

La sphère Internet et les grands acteurs systémiques d'Internet ont fait l'objet de plusieurs interventions du législateur. C'est le cas de la loi de décembre 2018 relative à la lutte contre la déformation de l'information. Cette loi dite Infox ne nous donne pas la possibilité de courir après chaque information qui circule. Elle impose aux réseaux sociaux des obligations de moyens (dispositifs de signalement, promotion d'informations vérifiées). Notre mission est de superviser cette mise en œuvre. Nous avons publié, il y a quinze jours, le deuxième bilan d'application de ce texte avec une série de recommandations. La loi dite Avia qui date de 2020 a permis la création d'un Observatoire de la haine en ligne, adossé au CSA. Un texte récent, la loi dite Principes de la République, qui n'est pas encore entrée en vigueur, nous donnera de nouvelles compétences en matière de lutte contre la haine en ligne. Ce texte impose des obligations de moyens précises et plus nombreuses, et fournit au CSA un pouvoir de sanction important qui porte sur le chiffre d'affaires mondial de ces plateformes. Ces textes constituent une forme de régulation d'un nouveau type. L'audiovisuel est un monde fini, contrairement aux acteurs d'Internet. La réglementation européenne en cours d'élaboration, le Digital Service Act (DSA), est un nouveau régime de responsabilité qui s'imposera aux grands acteurs de l'Internet. Elle participe de la même philosophie en créant de nouveaux régimes de responsabilité et en fournissant à la structure chargée de la régulation le soin de vérifier que ces moyens sont mis en œuvre.

N'oublions pas ce qui prévaut dans le secteur de la presse, la loi de 1881 sur la liberté de la presse, grand texte du début de la IIIe République qui vit toujours. Elle fixe le principe de la liberté de la presse et a permis la floraison de celle-ci. La presse écrite couvre le spectre de la vie politique. Pour les médias audiovisuels, nous sommes passés d'un monopole d'État à une ouverture avec l'imposition du respect du pluralisme.

Il serait difficile d'imposer le pluralisme aux chaînes YouTube. Il est nécessaire de regarder les choses avec nuance. Il existe certes des excès d'Internet, des contenus illicites contre lesquels le juge doit intervenir, à l'image de l'affaire Mila, exemple de cas de harcèlement. Par ailleurs, il demeure nécessaire d'imaginer un nouveau modèle de régulation, imposant un régime de contrôle à ces acteurs. Un mouvement a été enclenché par les États-Unis, auquel s'adjoint l'Union européenne avec la réglementation DSA. J'ai conscience de ne pas répondre entièrement à votre question qui demeure complexe.

La séance est levée à 15 heures 10.

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