Intervention de François-Xavier Lefranc

Réunion du mercredi 13 octobre 2021 à 14h00
Mission d'information visant à identifier les ressorts de l'abstention et les mesures permettant de renforcer la participation électorale

François-Xavier Lefranc, rédacteur en chef de Ouest France :

Il s'agit d'une question sur laquelle nous travaillons activement dans la perspective de l'élection présidentielle. Nous essayons de comprendre la forte abstention aux derniers scrutins régionaux et départementaux où il était question de sujets de proximité. Lors de la dernière échéance, nous avons souhaité analyser ce phénomène. Nous regardons le mouvement de l'abstention sur le temps long. Aux élections départementales de 1988, le taux d'abstention était de 51 %. La participation n'a jamais été élevée pour les scrutins départementaux, toutefois elle demeurait correcte pour les élections régionales. À partir de cette analyse, nous engageons un certain nombre d'éléments. Nous pouvons vite être entraînés à parler de questions qui nous semblent importantes, ensemble, journalistes et élus en nous tenant loin du terrain.

La défiance des médias signifie que beaucoup de nos concitoyens se sentaient oubliés, voire méprisés y compris par les médias. Ouest France comprend 600 journalistes. Pendant les élections, nous sommes nombreux à être mobilisés. Nous avons rédigé des milliers d'articles, y compris pour la plateforme numérique. Nous avons essayé d'aborder les thématiques qui relevaient des compétences des régions et des départements : les transports, la formation, le développement économique… La carte de l'abstention dans l'Ouest de la France indique une forte abstention. Statistiquement, on vote moins dans les zones disposant d'un fort dynamisme démographique d'une population jeune par rapport à des secteurs où la population est plus âgée. Dans l'Ouest, le littoral attire des personnes à la retraite qui ont un rapport détaché au territoire.

Le taux de participation des jeunes est inacceptable. Nous ne pouvons pas accepter que neuf jeunes sur dix ne votent pas. Notre jeunesse parle de politique du matin au soir, mais elle ne vote pas, car elle estime que cela ne sert à rien. Quand nous cherchons à savoir ce qui préoccupe les jeunes, la question climatique revient très souvent. L'environnement les angoisse. Il existe des enquêtes internationales assez sinistres à ce sujet. L'une d'entre elles, réalisée auprès de 10 000 jeunes dans différents pays, montre bien cela : 60 % des jeunes interrogés qualifient leur avenir d' « effrayant ». Ont-ils, à l'occasion des élections régionales et départementales, suffisamment entendu parler des territoires ? La réponse est non. Il s'agit d'une partie de l'explication au phénomène de l'abstention. Avons-nous suffisamment parlé de ces sujets ? La question du climat est internationale et locale. Il existe donc un décalage énorme entre ce que les jeunes électeurs attendent et ce qu'ils trouvent dans les médias.

Les jeunes sont très mobiles. Il est complexe pour eux d'aller s'inscrire sur les listes électorales lorsqu'ils travaillent ou étudient loin de leur lieu d'origine.

Par ailleurs, les élections régionales et départementales sont incompréhensibles. Si vous interrogez la population pour savoir quelles sont les compétences de la région ou du département, peu de personnes pourront vous répondre. L'action et l'organisation des collectivités sont illisibles aujourd'hui pour les citoyens français. La somme des budgets des régions françaises correspond au budget de la Catalogne ou à la moitié de celui de la Bavière. Ont-elles les moyens de mener des actions suffisamment lisibles dans leurs domaines de compétence ? Ce pays jacobin doit regarder ses citoyens dans leur vie quotidienne. La démocratie ne peut être compliquée. Nous devons rendre le vote simple. Aux élections régionales et départementales, nous votions pour des éléments importants de la vie de nos territoires. Or il n'a été question que de politique nationale. Les candidats à la présidence d'une région sont intervenus sur des thèmes de politique nationale. Sans doute existe-t-il un décalage par rapport à la situation des citoyens, des journalistes et des politiciens. Une fois ce constat établi, il demeure nécessaire d'agir.

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