Je veux souligner la grande qualité de ce rapport. Les commentateurs ne parlent malheureusement que des propositions qui ont fuité dans Le Monde, mais il faut insister sur le fait que ces dernières ne visent pas à répondre aux causes profondes de l'abstention, qui sont multiples et qui ne pourront être résolues par un coup de baguette magique. Nous y répondrons dans le temps long. Il était très important de dresser un constat précis, comme le fait ce rapport, qui développe notamment le concept de vote intermittent. On parle souvent de « ceux qui participent » et de « ceux qui s'abstiennent », alors que la situation est beaucoup plus complexe : une partie importante de nos concitoyens participent à certaines élections, parce qu'ils en perçoivent l'enjeu, et s'abstiennent à d'autres, parce qu'il leur importe peu que tel ou tel candidat l'emporte plutôt qu'un autre. En termes de communication, nous devons donc nous attarder sur le constat dressé par ce rapport et ne pas limiter ce dernier aux préconisations qu'il contient. Cela ne veut pas dire que les solutions proposées sont mauvaises – au contraire, un grand nombre d'entre elles vont dans le bon sens –, mais qu'elles ne sont pas suffisantes. En tout cas, il ne faut surtout pas s'empêcher d'explorer ces pistes et de les approfondir.
Nous sommes tous conscients qu'une réforme des modalités du vote ne permettra pas de réduire l'abstention. En revanche, l'objectif de rendre le vote plus accessible pour nos concitoyens me paraît tout à fait intéressant, et les expérimentations proposées dans ce rapport me semblent aller dans le bon sens. Nous ne sommes pas prêts à aller jusqu'au bout, pour des raisons tenant notamment à la confiance dans la sincérité du scrutin, mais les élections locales doivent nous permettre d'expérimenter certaines choses.
S'agissant des institutions, peut-être aurions-nous dû travailler plus longtemps, mais notre objectif était d'adopter un rapport assez consensuel – c'est pourquoi je regrette le vote négatif de nos collègues du groupe Les Républicains. Or il me semble compliqué, pour vous, monsieur le rapporteur, comme pour nous tous, de faire des propositions révolutionnaires, qui « cassent la baraque », sans s'éloigner du consensus. C'est dans le cadre des prochaines échéances électorales que ces questions devront être tranchées.
Je suis plutôt favorable à un certain nombre de ces propositions, mais nous aurions dû aller plus loin en termes d'équilibre entre les pouvoirs exécutif et législatif. Je regrette que nous ne nous soyons pas plus interrogés sur notre propre rôle, alors que les élections législatives comptent parmi celles qui souffrent le plus de l'abstention. Je ne suis pas favorable à ce que les parlementaires participent avec voix consultative au bureau des conseils communautaires des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), pour une raison fondamentale tenant à la séparation des pouvoirs, en l'occurrence entre le pouvoir législatif et les pouvoirs locaux. Imaginez qu'il faille inviter au bureau de la métropole du Grand Paris la cinquantaine de parlementaires concernés : il y aurait plus de parlementaires que de membres de droit ! Au-delà du principe, cette proposition pose donc un problème opérationnel. Cessons de confondre les rôles : de même que j'ai critiqué la figure du député-maire, qui était souvent davantage maire que député, j'en appelle à une séparation nette des différentes responsabilités afin que nos concitoyens comprennent clairement les compétences de chacun. Le rôle d'un parlementaire est de légiférer, non de participer au bureau du conseil communautaire d'un EPCI.
Je suis également défavorable à l'interdiction de la communication des sondages d'opinion une semaine avant le premier tour de toutes les élections. Cette proposition cède un peu à la démagogie – un défaut qui ne se retrouve nulle part ailleurs dans le rapport. Il est trop facile de toujours rejeter la faute sur les sondages ! Chacun sait que ces derniers correspondent à une photographie de l'opinion à un instant t, et que ces outils aident nos concitoyens à prendre leur décision – j'ai toujours pensé que les Français étaient très tactiques, très stratégiques, et qu'ils tenaient compte des sondages dans leurs choix électoraux. Cette information doit rester transparente : s'il est opportun d'imposer un silence républicain à compter du samedi précédant un scrutin, il est intéressant, pour les candidats comme pour les électeurs, d'autoriser la publication des sondages jusqu'au vendredi.
Je me suis concentré sur les aspects négatifs, car mon temps de parole est limité, mais je n'en suis pas moins convaincu que ce rapport va dans le bon sens. Je ne pourrai pas prendre part au vote car je dois maintenant m'absenter, mais je suis favorable à l'adoption du rapport et à sa publication.