Intervention de Patrice Debré

Réunion du jeudi 16 avril 2020 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Patrice Debré, président du Comité des affaires internationales, président de la commission « Biologie – Génétique – Technologies biomédicales » de l'Académie nationale de médecine :

, a indiqué qu'il était immunologiste, spécialiste des épidémies, en particulier depuis l'apparition du virus du SIDA et que c'était la raison pour laquelle il prenait en charge la présentation des réflexions du groupe de travail portant sur le développement des thérapeutiques. Ce développement poursuit plusieurs objectifs.

Le premier a une portée très générale : il s'agit d'accélérer la recherche, le développement et la production de produits thérapeutiques sûrs et efficaces. En découlent trois autres objectifs, complémentaires les uns des autres : le premier vise à éviter la maladie et a fortiori le risque de décès ; le deuxième à prévenir, lorsque la maladie survient, l'apparition de signes de gravité et le risque de décès ; le troisième à éviter la progression de l'infection et à réduire, par conséquent, l'épidémie. Pour réussir, il faut des stratégies de développement efficaces et des investissements précoces dans la fabrication à l'échelle commerciale de médicaments qui vont d'abord recevoir une autorisation d'utilisation transitoire, puis une autorisation de mise sur le marché, si les essais démontrent qu'ils répondent aux normes applicables.

À ces trois objectifs correspondent trois stratégies différentes. La première correspond à des traitements dirigés contre le virus lui-même, qui tentent de limiter sa réplication. À l'heure actuelle, différents types de substances sont à l'essai, soit pour inhiber la fixation du virus sur son récepteur, soit pour inhiber sa réplication, directement par des anti-ARN ou en visant des enzymes utiles à la réplication virale. Il peut également exister une action directe contre les virions, par des anticorps neutralisants spécifiques, monoclonaux – en cours de production dans les laboratoires – ou polyclonaux – par exemple avec des sérums de sujets immunisés –, ou par d'autres cytokines, telles les interférons.

La deuxième stratégie, moins connue, consiste non à lutter contre l'infection elle-même, mais à contrôler ses conséquences physiopathologiques afin de limiter la gravité de la maladie. L'une d'elles est particulièrement importante : il s'agit de l'« orage cytokinique », qui consiste en des sécrétions anormales et dérégulées de cytokines, contre lesquelles sont à l'étude des traitements inhibiteurs des interleukines ou de leurs récepteurs. Une autre est l'insuffisance d'oxygénation de l'organisme, contre laquelle des traitements visent à faciliter le transport de l'oxygène, en cas de défaillance respiratoire, ou limiter le risque thrombotique (anticoagulants).

La troisième stratégie est une immunoprophylaxie. Pour éviter la propagation du virus, on peut faire appel à des vaccins ou, ponctuellement, à une immunothérapie monoclonale ou polyclonale, comme une sérothérapie ; on peut aussi chercher à développer une immunité non spécifique, qui pourrait améliorer la résistance des individus à une agression virale – le BCG pourrait contribuer à une telle immunité. Ce moyen est à l'étude dans plusieurs pays. On retrouve donc en matière de prophylaxie les deux axes complémentaires identifiés pour les thérapies curatives : par le vaccin ou d'autres traitements, essayer de diminuer la diffusion du virus, ou l'apparition et la gravité des manifestations physiopathologiques de la maladie.

Quelle que soit la stratégie considérée, la réussite nécessite un partage d'informations entre le secteur public et le secteur privé, afin de faire progresser rapidement les thérapies et prophylaxies prometteuses et de s'assurer que les meilleures ressources possibles y sont consacrées.

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