Je souhaite intervenir sur la transparence et Jean-Pierre Thierry souhaite intervenir sur la pharmacovigilance, qui en est un élément clé.
Pour prolonger ce que disait Christian Saout, il faut mentionner un point essentiel : dès qu'on identifie des questionnements non résolus, on doit mettre clairement les éléments sur la table. Sinon, les difficultés s'accumulent. Tout serait transparent ? En fait, non. Je m'inscris en faux là-dessus. Beaucoup d'informations sont transparentes, c'est de plus en plus le cas sur les résultats des essais. Les résultats du vaccin de Pfizer ont été publiés dans une revue ; il en est de même pour Astra-Zeneca. Mais il subsiste un « nœud » : les accords d'achats anticipés de vaccins négociés par la Commission européenne. La ministre de l'Industrie a rapidement évoqué ce point en conférence de presse. Cela a été assez rapidement balayé, trop rapidement, pensons-nous. France Assos Santé est très active au niveau européen et suit ce sujet depuis le début. On voit poindre un malaise par rapport à ces achats. Les contrats ne sont pas transparents, et même les négociateurs ne le sont pas.
De quoi parle-t-on quand on dit « transparence » ? Les gens ressentent une grande confusion, qui entretient la méfiance. Dans les contrats, il y a des éléments d'ordre industriel et commercial, et il y a des éléments relatifs à l'indemnisation des personnes. Dans un contexte de développement très rapide des vaccins, les industriels ont souhaité avoir quelques garanties sur ce dernier registre. Il faut bien se mettre d'accord avec les citoyens : les questions qui se posent sur les contrats ne concernent pas du tout les résultats des essais cliniques. C'est un autre sujet, cela commence à être publié et c'est heureux.
À quel moment les contrats pourront-ils être rendus publics ? Que contiennent-ils et quelles sont les conséquences pour les usagers ? S'il n'y a pas de faute grave de la part des industriels, l'indemnisation potentielle en cas d'effets indésirables relèvera du droit commun, et sera en l'occurrence assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam). Il n'y a donc pas de conséquence directe pour les usagers – même s'il est vrai que, dans le cadre français, on pourrait travailler à améliorer le fonctionnement de l'Oniam et l'indemnisation des effets indésirables des produits de santé en général, des médicaments en particulier. En revanche, il y a un flou sur le contenu des contrats et les conséquences possibles. Des résultats sont donnés au fil de l'eau sur les essais mais il y a une confusion sur les négociations des achats groupés. C'est vraiment dommage.
La commissaire européenne à la Santé, Mme Kyriakides, a été saisie du sujet par des associations européennes. Elle a donné des réponses assez maladroites : autant on peut entendre l'argument « protection des intérêts commerciaux des entreprises », autant il est plus difficile d'accepter l'argument « absence d'intérêts publics majeurs qui justifieraient d'ouvrir l'accès aux contrats ». Sans militer nécessairement pour une transparence immédiate, on pourrait au moins s'entendre sur les composantes des contrats, afin de réduire l'un des nombreux « nœuds » que va rencontrer la campagne vaccinale.