Intervention de Cédric Villani

Réunion du jeudi 8 avril 2021 à 9h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCédric Villani, député, président de l'Office :

Je vous remercie beaucoup pour ces échanges de grande qualité.

Ma première remarque est qu'il était important que nous organisions cette table ronde dans ce format interdisciplinaire où les patients sont représentés et où les différentes spécialités de médecine nous parlent aussi bien de diagnostic et de traitement que de recherche. Comme vous l'avez fait remarquer, cela aurait pu être encore plus large. Nous aurions dû ajouter la médecine de ville. Peut-être aurions-nous pu avoir un représentant de l'Ordre des médecins. En tout état de cause, la composante « soins en médecine de ville » a été souvent évoquée dans les interventions.

S'agissant des conclusions à tirer, notre premier public, ce sont les parlementaires, dont l'Office est le bras armé sur les questions scientifiques. Pour ce qui est des décideurs, il faudra que nous nous tournions vers les médecins.

Le politique a été invoqué à plusieurs reprises, par exemple sur la reconnaissance d'une maladie professionnelle. C'est un sujet qui déborde le cadre des prérogatives de l'Office, mais nous pouvons faire des recommandations et attirer l'attention de nos collègues sur ce qui a été dit ici. Au-delà, le Parlement dispose des moyens que la Constitution lui donne pour interpeller le gouvernement sur ces sujets, avec des questions écrites, des questions orales ou de nombreux autres moyens. Nous avons eu le sentiment, en vous écoutant, qu'il y avait urgence à agir et que l'Office devait y prendre sa part.

D'emblée, nous avons bien vu l'importance de la mobilisation des patients. Les quatre axes que vous avez indiqués dans votre intervention, madame Oustric, ont structuré tout le débat. La pertinence et l'importance de votre participation ont été amplement démontrées par ce seul fait.

Après ce que nous avons entendu, la réalité du Covid long ne peut plus être mise en doute. Certes, il subsiste de fortes interrogations sur les mécanismes d'action. Nous avons bien entendu ce que disait la professeure Salmon-Céron sur les différentes hypothèses : est-ce une inflammation ? une persistance du virus ? une réponse immunitaire insuffisante ? un trouble psychosomatique ? une combinaison de tout cela ? Il n'empêche, le message est fort : la réalité des symptômes est là, quand bien même ce sont des symptômes multiples, des symptômes variables. Nous ne sommes pas sur quelque chose qui relève de l'invention ou de l'imagination des patients.

L'exposé du docteur De Broucker a insisté sur les questions neurologiques sous-jacentes : des dysfonctionnements cérébraux, des problèmes liés à certaines facultés cognitives, des troubles de la mémorisation, etc., qu'il faut distinguer de ce qui relèverait de symptômes dépressifs, de découragement ou autres manifestations. Non qu'il ne faille aussi prendre en compte les questions dépressives, mais nous sommes bien là sur quelque chose de différent, de précis au sens neurologique et cognitif, et vous l'avez très bien décrit.

Vous avez également insisté sur le fait que, même en l'absence de certitude sur les causes et sur les traitements, il est très important d'avoir des réponses pragmatiques rapides, dont certaines peuvent passer par des moyens peu utilisés comme le classement en longue maladie, même si le Covid long n'est pas dans la liste officielle des ALD.

Il est important aussi, pour le corps médical, de s'organiser : meilleure information des praticiens ; mise en place, sans que les deux s'excluent, de consultations interdisciplinaires avec des centres ad hoc qui peuvent avoir un caractère régionalisé, territorialisé en tout cas.

Ce qui est important est de rester pragmatique. Nous savons bien que la médecine est une subtile combinaison de science et de pragmatisme, d'expérimentation. La boussole qui doit nous guider ici est le bien-être et le réconfort des citoyens qui sont en souffrance.

Ma dernière remarque ira vers la recherche. Vous avez insisté sur l'importance des moyens, de la réactivité et de la vitesse. Hier, l'Élysée annonçait la mise en œuvre de moyens importants dans la lutte contre le Covid, sur la recherche en particulier. Le communiqué publié hier dit très précisément que 460 millions d'euros seront mobilisés cette année pour soutenir les laboratoires et entreprises engagés dans la lutte contre le Covid-19. Évidemment, ce soutien aux laboratoires inclura un volet sur les questions vaccinales et sur d'autres questions déjà bien identifiées. Il faut aussi qu'il y ait un soutien aux opérations de recherche. Comme vous l'avez dit, si des opérations « Covid flash » étaient mises en place l'an dernier, aujourd'hui les outils sont redevenus plus délicats à manier, et il est important de réaffirmer l'importance de ces programmes urgents par rapport, notamment, au Covid long qui nous occupe ce matin.

Voilà les remarques principales qui me viennent à l'issue de ces échanges. Nos débats feront l'objet d'un compte rendu, d'une synthèse et de recommandations, dans le cadre du travail confié par l'Office aux quatre rapporteurs sur l'épidémie de Covid.

Il me reste à vous remercier une nouvelle fois pour cet échange qui a été mené dans un climat extrêmement constructif, en étant à l'écoute des besoins des patients, de la science et de la recherche.

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