Intervention de Cédric Villani

Réunion du jeudi 15 juillet 2021 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCédric Villani, député, président de l'Office :

. – La présentation des Académies était très axée sur les institutions et le financement et beaucoup moins sur les questions de communication, de récit et de culture. Il convient d'en tenir compte dans l'analyse du rapport. L'expérience des réformes du système de l'enseignement supérieur montre que les solutions institutionnelles doivent être maniées avec mesure. Un Big Bang trop important génère en effet des incompréhensions et des effets contreproductifs. En outre, la communauté de l'enseignement supérieur a déjà connu d'importantes réorganisations au cours des dernières années. Je serais donc prudent quant à la proposition consistant à créer une nouvelle obligation de coordination. En revanche, nous devons autant que possible permettre une meilleure communication entre les acteurs en passant par l'interpellation plutôt que par la contrainte. Je pense que ce serait une erreur d'attribuer une personnalité morale et des moyens contraignants à Aviesan et d'en faire un nouveau « super‑institut ». De même, il convient d'être prudent face à la proposition consistant à créer un nouvel institut centralisateur de la politique de recherche. Cependant, nous devons tirer les conclusions du constat d'un nombre élevé d'essais de petite taille n'aboutissant pas à des résultats convaincants : cette situation résulte d'un manque de coordination et de synchronisation entre les différents acteurs.

La coordination ne résoudra pas en elle‑même le problème majeur de l'attractivité. Celle‑ci dépend en premier lieu des moyens financiers du domaine et de sa souplesse. Les chercheurs se plaignent de temps trop longs, de contraintes trop élevées, de moyens faibles et de difficultés de recrutement pour leurs collaborateurs. Cette tendance est très nette et la carrière de notre prix Nobel Emmanuelle Charpentier, partie à l'étranger pour poursuivre sa carrière du fait d'un environnement français trop contraignant et manquant de moyens pour lui permettre de développer ses travaux, en constitue l'emblème.

Je rejoins le constat de Jean‑Luc Fugit sur la promotion du domaine de la biologie‑santé auprès des jeunes. Le grand public le perçoit en effet comme un domaine dominé par les grands laboratoires et les intérêts financiers, à l'opposé de ce que nous avons pu constater lorsque nous avons visité l'Institut Pasteur et pris connaissance de projets passionnants et variés et de perspectives de recherche extrêmement attractives. Nous nous trouvons donc face à un défi majeur en matière de communication et de médiation scientifique. Lors de la préparation de la loi de programmation de la recherche, certaines discussions et certains amendements avaient trait à ce sujet au travers des recherches participatives et des recherches en médiation. Cet enjeu est donc majeur par au rapport au futur de la trajectoire française.

La crise a effectivement révélé des problèmes de fond. Il ne fait pas de doute pour moi que l'échec rencontré dans la mise au point rapide d'un vaccin contre la Covid‑19 au pays de Pasteur pèsera sur le secteur de façon très forte. Elle pourrait sonner le réveil ou au contraire dissuader davantage nos jeunes de se lancer dans ce domaine. Ceci est d'autant plus dommageable que l'Institut Pasteur travaillait sur l'ARN messager et son application en santé depuis plusieurs années. Le problème ne provient donc pas de la recherche mais du développement. Nous devons interpeller les pouvoirs publics et le système de santé sur la nécessité de redoubler d'efforts en la matière.

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