Intervention de Sonia de La Provôté

Réunion du mardi 6 juillet 2021 à 13h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l'Office, rapporteure :

. – Sur la recherche thérapeutique, le rapport fait un rappel sur le continuum établi depuis la recherche fondamentale jusqu'à l'autorisation de mise sur le marché et la « phase IV » que constituent les études de pharmacovigilance et de pharmaco-épidémiologie.

Il se passe généralement entre dix et quinze ans entre le début d'une recherche et la mise sur le marché d'un traitement. Les choses ont avancé beaucoup plus vite pendant la crise, ce qui veut dire que nous pourrions faire mieux d'une manière générale, en accélérant les procédures sans pour autant perdre en qualité ou en exigences de précaution.

Des initiatives ont vu le jour dès janvier 2020, dans le cadre du consortium REACTing créé par l'Inserm pour coordonner la recherche française – je le précise car il est vrai qu'en dehors de ce consortium, les chercheurs ont eu du mal à faire exister leurs projets, à échanger entre eux, à valoriser leurs travaux. Il faut donc s'interroger. Reste que ce consortium avait le mérite d'exister et qu'il a constitué assez précocement une sorte de conseil de recherche scientifique sur le Covid-19, et mené une veille efficace.

En lien avec l'OMS, REACTing a rapidement mis en place l'essai Discovery pour évaluer la sécurité et l'efficacité de certaines molécules antivirales déjà utilisées dans d'autres traitements. Un groupe pluridisciplinaire de l'OMS a sélectionné les molécules candidates, et l'on s'en est tenu à cette sélection, en n'ajoutant qu'un bras en cours de route sous la pression médiatique. Malgré cette centralisation, un nombre trop restreint de patients avaient été enrôlés dans une autre étude, Coverage, à l'issue de la première vague.

Il faut regarder la situation avec lucidité : il existe des freins à l'organisation opérationnelle de la recherche, même lorsqu'on tente de structurer les choses au niveau national, même en situation de crise, et même avec des médicaments déjà éprouvés pour d'autres traitements, depuis longtemps et en population générale. La difficulté du repositionnement est d'ailleurs l'une des principales difficultés évoquées par les chercheurs que nous avons auditionnés. La persistance de ces freins et de ces lenteurs cause une perte de temps, d'énergie et de ressources qui doit nous conduire à nous interroger.

REACTing n'était pas un guichet de financement : le consortium n'a donc pas pu organiser la programmation ni coordonner efficacement la recherche contre la Covid-19. Il y a eu de nombreux appels à projets, qui ont conduit à multiplier les essais cliniques, en contradiction directe avec la volonté et la nécessité de mutualiser les cohortes et les essais.

Il n'existait pas non plus de structure au niveau européen qui aurait pu le faire, alors que c'était l'échelle la plus pertinente pour aller vite et pour ouvrir plus largement les options thérapeutiques. Nous n'avons pas pu le faire, sinon avec difficulté, comme dans le cas de l'hydroxychloroquine, testée sur des patients en réanimation, en décalage avec le débat médical d'alors.

Suite à la première vague, le consortium REACTing a mis en place différents groupes de travail, notamment des groupes sur la priorisation des traitements, sur la recherche préclinique et sur les traitements par anticorps monoclonaux. Malgré un besoin urgent de thérapeutiques, la mise en place d'essais randomisés a été difficile. Il n'a pas non plus été facile de prioriser les traitements, de repérer les molécules les plus prometteuses, même si à ce moment-là, nous avions déjà tiré les leçons de la première vague et étions déjà un peu plus opérationnels dans l'identification de celles-ci.

J'en viens aux résultats obtenus contre la Covid-19. En janvier 2021, une nouvelle agence consacrée aux maladies infectieuses émergentes a été créée, l'ANRS-MIE, grâce au rapprochement de l'Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS) et du consortium REACTing. Il reste à en voir la réelle valeur ajoutée, par-delà le rapprochement de chercheurs qui doivent en effet travailler ensemble et ont besoin pour cela d'une maison où se retrouver. Une nouvelle structure n'apporte pas forcément une nouvelle solution. Attendons donc de disposer d'un peu de recul.

Quant aux traitements, certains ont été écartés assez rapidement : le remdésivir, l'association lopinavir et ritonavir, l'hydroxychloroquine, l'ivermectine, la vitamine D, le plasma de convalescents, le tocilizumab…

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