Intervention de Sonia de La Provôté

Réunion du mardi 6 juillet 2021 à 13h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Sonia de La Provôté, sénatrice, vice-présidente de l'Office, rapporteure :

. – D'autres traitements ont montré leur intérêt. Dans la phase aiguë, tant l'administration de dexaméthasone, anti-inflammatoire, que le recours à des méthodes de prise en charge et de réanimation standardisées ont nettement amélioré l'état des patients.

Les anticorps monoclonaux ont montré une activité à la fois in vitro et in vivo. Deux laboratoires, Roche et Eli Lilly, en ont développé. Ils doivent cependant être utilisés précocement. Ils présentent en outre un spectre étroit, étant dirigés sur un site particulier du virus. Ils sont aussi sensibles aux mutations du virus. Enfin, ils sont coûteux. Pour ces différentes raisons, ils ne peuvent, en pratique, être utilisés de manière systématique et courante. Moins d'un millier de patients ont pu, en France, bénéficier de ces traitements entre mars et juin 2021. L'accès à cette prise en charge reste donc marginal.

D'autres traitements sont encore à l'étude. Ainsi, le molnupiravir, antiviral utilisé contre la grippe, qui a montré une activité inhibitrice importante. Le camostat a également montré des résultats. J'ajoute que de premières études ont enregistré des effets positifs du Truvada, association des antirétroviraux tenofovir et disoproxil utilisée dans le traitement du sida.

Il convient de bien suivre les initiatives engagées et de systématiser les études qui en découleront. Il faudra ensuite dégager du bruit de fond les opportunités réelles. Des équipes multi-sites et pluridisciplinaires pourront alors commencer à travailler sur des cohortes cohérentes. Ce n'est pas encore le cas aujourd'hui, du moins pas à la dimension voulue. Or le juste rapport bénéfices/risques de ces traitements ne sera atteint qu'à ce prix.

À plus long terme, la technologie des ARN interférents permettra d'empêcher l'expression d'un gène en clivant l'ARN messager correspondant et en prévenant ainsi la réplication du virus dans les cellules.

En définitive, le bilan des recherches thérapeutiques contre la Covid-19 est plutôt médiocre. Tant sur le plan scientifique que sur le plan financier, les efforts déployés ont surtout misé sur le vaccin. Mais il n'y avait pas de raison que des opportunités ne puissent se faire jour en matière thérapeutique. La coopération a cependant été moins structurée en ce domaine. Alors que Pfizer avait mis sur pied une cohorte de 30 000 personnes pour développer son vaccin, rien de tel n'a été fait pour les médicaments dont l'utilisation durant la première vague avait permis de supposer une certaine efficacité.

Le rôle de l'ANRS-MIE devra être évalué, pour établir si elle a une valeur ajoutée dans le pilotage de la recherche. Il faut regretter l'absence de coordination nationale, étant entendu qu'une action au niveau international est de toute façon nécessaire pour atteindre la masse critique de cas à surveiller et traiter.

Il convient d'encourager la recherche fondamentale, en assurant l'existence d'un socle scientifique solide en situation de pandémie. Encore faut-il pour cela combler les manques accumulés depuis de longues années. Une approche systémique devrait être conçue.

Dans la perspective des pandémies virales à venir, plus la palette des outils thérapeutiques est large, meilleure est la capacité de réagir de façon appropriée et efficace à tout danger. Outre leur contagiosité, les virus se caractérisent en effet par leur mutabilité. Ces deux traits sont d'ailleurs souvent corrélés.

J'en termine par les recommandations. Il convient de donner des lignes directrices fortes à l'ANRS-MIE. Il faut encourager et financer la recherche fondamentale. Il est aussi nécessaire de développer la recherche d'antiviraux pour disposer d'un large éventail de molécules susceptibles d'être repositionnées dans le cas d'une nouvelle épidémie virale. Il est également souhaitable de réaliser un retour d'expérience sur les initiatives mises en place, notamment les plateformes Discovery et Coverage, afin d'être en capacité de déployer plus efficacement des plateformes analogues dans le cadre d'une nouvelle pandémie. Enfin, il faudra faire évoluer le système d'évaluation des chercheurs pour réduire l'importance des indicateurs quantitatifs et mieux valoriser l'apport réel des recherches à la connaissance scientifique. Cette dernière recommandation méritera d'ailleurs d'être affinée avant sa bonne mise en œuvre.

J'ajoute que nous avons peiné à établir une cartographie des différentes instances et structures engagées dans la recherche de solutions thérapeutiques. Sans reposer nécessairement sur des équipes hospitalières, la recherche ambulatoire est indispensable. Dans le domaine pharmaceutique, il y a de la recherche et développement au sein du secteur privé. Elle est parfois le fait de petites entreprises. L'avenir nous montrera ce dont elles sont capables. J'en attends de grandes avancées. Telle est l'histoire de la recherche. Je ne vois pas de raison à ce qu'elle ne continue pas dans cette voie pour l'épisode que nous vivons.

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