Intervention de Xavier Piechaczyk

Réunion du jeudi 28 octobre 2021 à 14h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Xavier Piechaczyk, président de RTE :

‑ Je vais vous dire un mot sur la manière dont fonctionne notre modèle et sur la question de la sécurité d'approvisionnement, qui fait débat.

Notre modèle simule le fonctionnement du système électrique français et européen. Ce n'est pas le modèle d'une France isolée, mais d'une France interconnectée, dans le cadre de 17 mix électriques européens. Notre modèle simule le fonctionnement du système électrique à chaque heure de chaque jour de chaque année, pendant trente ans, jusqu'en 2050. À chaque heure, nous intégrons 200 chroniques météo conformes aux trajectoires du GIEC : vent, soleil, température et hydraulicité, en de nombreux points du territoire, pour en tirer les conséquences en termes de production d'énergies renouvelables, mais aussi de consommation des Français. Parce qu'il simule le système électrique à chaque heure, le modèle garantit par nature la sécurité d'approvisionnement. J'insiste sur ce point : par nature, nos résultats garantissent la sécurité d'approvisionnement du pays dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui. Ce modèle permet d'obtenir comme données de sortie des volumes de production par technologie, des volumes de flexibilité – j'entends par flexibilité les moyens de pilotage qui garantissent l'équilibre du système électrique – et enfin des volumes de réseau. Les coûts de production, les coûts de flexibilité et les besoins réseau permettent de déterminer le coût complet annualisé du système électrique pour chaque scénario, ainsi que son empreinte.

Aujourd'hui, l'électricité est certes omniprésente dans la vie quotidienne des Français, mais elle ne représente que 25 % de notre consommation d'énergie finale alors que 60 % de celle-ci est satisfaite par des énergies fossiles. L'objectif est bien de sortir des énergies fossiles en 2050, en activant deux leviers. Le premier est l'efficacité énergétique, que je pourrais appeler la performance énergétique, résultant de l'évolution des technologies, des bascules vers l'électricité et de la rénovation thermique des bâtiments. Le second est l'électrification massive des usages. L'électricité va venir grignoter progressivement les parts de marché du pétrole ; c'est déjà le cas pour les véhicules des particuliers, pour divers procédés industriels ou lorsqu'une pompe à chaleur électrique remplace une chaudière au fioul.

In fine, l'électricité représentera, en 2050, 55 % de la consommation d'énergie finale. La France fait face à un double défi. Le premier, dès lors que nous consommerons plus d'électricité en 2050, porte sur sa production. Le second, que je qualifierais de purement français, concerne le remplacement de l'appareil de production nucléaire de deuxième génération, qui vieillit et qui devra immanquablement fermer d'ici à 2060 pour des raisons industrielles. Nous avons construit, pour instruire cela, une trajectoire de consommation de référence de la France, qui atteint 645 térawattheures en 2050, ce qui correspond à une augmentation de 35 % de la consommation d'électricité par rapport à aujourd'hui. C'est notre scénario central.

La consommation de référence résulte de l'électrification des usages. Mais l'augmentation n'est que de 35 %, parce que nous supposons que la France améliorera globalement de 40 % son efficacité énergétique d'ici à 2050. Nous avons entouré ce scénario de référence de deux autres scénarios : un scénario dit « sobriété », où la consommation d'électricité est inférieure de 90 térawattheures et qui, contrairement à la trajectoire de référence, suppose de modifier les modes de vie des Français, et un scénario de réindustrialisation profonde du pays, dans lequel la part de l'industrie manufacturière dans le produit intérieur brut remonte à 12 ou 13 % alors qu'elle est de 10 % aujourd'hui. Le scénario central suppose qu'elle reste égale à 10 %, bien que la France soit supposée être en croissance de 1,3 % par an pendant 30 ans.

De ce chapitre sur la consommation, nous avons dégagé trois enseignements. D'abord, agir sur la consommation grâce à l'efficacité énergétique, voire la sobriété, ce qui n'est pas la même chose, est indispensable pour atteindre les objectifs climatiques. Par ailleurs, dans tous les cas, y compris le scénario de sobriété, la consommation d'énergie va baisser, mais celle d'électricité va augmenter pour se substituer aux énergies fossiles. Enfin, accélérer la réindustrialisation du pays en électrifiant les procédés augmente certes la consommation d'électricité, mais réduit l'empreinte carbone de la France. Je passe la parole à Thomas Veyrenc pour présenter, du point de vue technique, les six mix de production que nous avons étudiés.

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