Intervention de Xavier Piechaczyk

Réunion du jeudi 28 octobre 2021 à 14h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Xavier Piechaczyk, président de RTE :

‑ Un mot sur les scénarios et leur contenu en énergies renouvelables. Les scénarios sont issus de la concertation. Je dis souvent qu'ils représentent les tendances de la société française. Par exemple, il ne vous a pas échappé que sur les trois scénarios qui tendent vers 100 % de renouvelables, un seul atteint les 100 % en 2050, en supposant une fermeture anticipée du parc nucléaire existant, et deux en 2060. Ces scénarios ont été construits dans la concertation, ils ne sont pas caricaturaux car ils représentent des tendances, notamment le scénario M1 qui représente la tendance des renouvelables en répartition diffuse, avec une part de photovoltaïque très importante car le photovoltaïque est assez largement diffus, notamment le photovoltaïque sur toiture : maisons individuelles, mais aussi industries, hangars agricoles, parkings, etc. Par ailleurs, il y a un scénario « Renouvelables Grand Parc », qui est évidemment plus performant sur le plan économique et fait le pari d'un modèle de développement des renouvelables plutôt concentré dans de grands parcs solaires, éoliens terrestres et offshore. Ce sont des produits de la concertation, des équilibres qui donnent à voir des scénarios plutôt contrastés.

Existe-t-il des vases communicants entre les parts d'énergies renouvelables ? Oui et non. Les vases communicants entre solaire et éolien sont faibles. Ce ne sont pas les mêmes courbes de charge, cela ne produit pas la même chose, ce ne sont pas les mêmes technologies. En revanche, les scénarios sont plus réglables entre éolien terrestre et offshore. Il est entendu qu'en termes de production d'électricité et de courbes de charge, le rapport entre éolien terrestre et éolien offshore est plutôt de 6 sur 10. À cette réserve près, il y a des vases communicants possibles, dans la famille de l'éolien, entre ce qui est à terre et ce qui est en mer.

Il ne nous a pas échappé qu'un document de travail a été publié par Contexte. Ceci ne change rien à notre rapport. Sur un plan méthodologique, RTE ne se fie pas à des documents qui ne sont ni sourcés, ni a fortiori vérifiés. Thomas Veyrenc vous a dit tout à l'heure que pour le nouveau nucléaire et l'EPR2, RTE a utilisé des coûts et des délais fournis par l'État, à notre connaissance après des audits indépendants. Nous avons ensuite pris du recul et fait preuve de prudence en réalisant des stress tests voire des crash tests, notamment en plaçant le coût du nouveau nucléaire au niveau de celui de Flamanville 3, c'est-à-dire 13 milliards d'euros la tranche en euros 2020. Concernant l'aval du cycle, nous avons retenu des marges importantes. Ces marges ont conduit à chiffrer à environ 5 euros par mégawattheure le coût de l'aval du cycle nucléaire – le traitement, le recyclage et le stockage à long terme – alors que dans la concertation certaines contributions nous incitaient à retenir 1 euro par mégawattheure. Nous avons donc multiplié par 5 le coût de l'aval du cycle dans le nucléaire. C'est prudent, si des scénarios avec du nouveau nucléaire le renchérissent. Mais nous assumons d'avoir été prudents et pour être précis, notre scénario prévoit que les deux premiers EPR seront mis en service entre 2035 et 2037, ce qui nous paraît aujourd'hui crédible et conforme aux documents challengés et vérifiés dont nous disposons. Une fois de plus, nous nous fions à ce qui est contre-expertisé et lorsque nous ne sommes pas sûrs de l'information, nous prenons des marges.

Enfin, s'agissant des « 50 gigawatts » et des « 50 ans », il faut redire quel est le statut de ce que nous étudions. Nous étudions des chemins possibles pour le pays. À ce stade, l'Autorité de sûreté nucléaire n'a pas dit que les prolongations des tranches au-delà de 50 ans étaient possibles. Elle n'a pas dit non plus qu'elles étaient impossibles. Ce que dit l'Autorité de sûreté nucléaire, c'est qu'elle ne dispose pas à ce jour de tous les éléments, tout simplement des dossiers, pour prendre une décision sur des prolongations de tranches au-delà de 50 ans, jusqu'à 60 ans.

On ne peut pas exclure que cette demande soit faite et que ce soit possible. C'est la raison pour laquelle elle figure parmi nos chemins possibles. Nous ne nous sommes fermé aucune porte de ce point de vue. J'en profite pour dire que l'Autorité de sûreté nucléaire a participé à notre concertation et a été un partenaire fidèle de ce que nous avons écrit. Il n'y a pas de raison de fermer la possibilité de prolonger nos tranches nucléaires existantes au-delà de 50 ans, mais cela fait partie des incertitudes que Thomas Veyrenc a décrites tout à l'heure. Bien évidemment, la prolongation au-delà de 50 ans n'est pas garantie pour toutes les tranches. A fortiori, la prolongation au-delà de 60 ans n'est pas garantie sur le parc nucléaire. Nous le disons de manière explicite. Ce n'est pas parce qu'on dit cela que l'on n'étudie pas ce chemin possible.

Je remercie Monsieur le président d'avoir rappelé que les 50 gigawatts de nucléaire en 2050 ne sont pas une limite politique. Ils correspondent à 50 % de nucléaire en 2050 dans la trajectoire de référence. Plus la consommation sera élevée, plus la part du nucléaire sera faible en 2050 : ces 50 % de nucléaire en 2050 dans la trajectoire de consommation centrale deviennent 40 % dans la trajectoire de réindustrialisation profonde et 60 % dans notre scénario « sobriété ». Une capacité de production de 50 gigawatts correspond à la proposition la plus haute de la filière nucléaire. J'insiste, parce que c'est important sur le plan de la méthode : cette proposition est tracée. Elle figure dans des documents issus de la concertation. Ces documents sont publics, en ligne sur notre site Web et accessibles à qui s'intéresse à la question. Ce n'est pas une invention, c'est la filière qui l'a écrit.

Je laisse la parole à Thomas Veyrenc qui va dire un mot de la réindustrialisation, de la stratégie hydrogène et des analyses complémentaires, qui viendront notamment sur la question de la sobriété début 2022.

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