Si nous ne savons pas précisément quel usage est fait de nos statistiques, certaines études ont parfois un écho important dans la société, à l'instar de celle que nous avons publiée récemment sur l'évolution des décès au pic de l'épidémie par rapport à 2019, selon l'origine des personnes. Les résultats montrent que l'augmentation a été plus importante chez les personnes nées au Maghreb, en Asie et, plus encore, en Afrique subsaharienne. Ces chiffres ont suscité un certain émoi et ont permis de mettre en évidence que ces catégories étaient plus nombreuses à avoir poursuivi leur activité durant le confinement, leur emploi ne permettant pas le télétravail. Les personnes nées en Afrique, très nombreuses à résider en Île-de-France, étaient aussi celles qui utilisaient le plus les transports en commun pour se rendre sur leur lieu de travail. Ces données ont remis en lumière les différences importantes de conditions de vie selon les origines et provoqué une prise de conscience.
De nombreuses études donnent une mesure indirecte des discriminations. En matière d'emploi, elles portent par exemple sur la participation sur le marché du travail, l'accès à l'emploi, les conditions d'exercice de l'emploi ou les niveaux de rémunération. Chacune apporte une pierre à l'édifice, et ce serait une tâche colossale d'établir une synthèse.
L'INSEE a publié l'année dernière une étude comparative entre les immigrés et leurs descendants. Sur l'accès à l'emploi, elle montrait que l'effet de l'origine s'estompait, mais pas pour toutes les origines. Les inégalités persistantes pour les hommes nés au Maghreb et en Afrique subsaharienne laissent ainsi penser que ces populations seraient victimes de discriminations. Une fois franchie la barrière de l'accès à l'emploi, on observe des différences de rémunération et de qualité d'emploi entre immigrés et non-immigrés, mais nettement moins entre descendants d'immigrés et personnes sans ascendance migratoire, ce qui peut signifier que les immigrés rencontrent des difficultés spécifiques, par exemple liées à la maîtrise de la langue, à des barrières administratives, à une reconnaissance insuffisante de diplômes ou de qualifications acquis à l'étranger.