Intervention de Angelina Cai

Réunion du jeudi 17 septembre 2020 à 11h00
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Angelina Cai, déléguée générale l'Union des jeunes Chinois en France (UJCF) :

Mesdames et messieurs, je ne saurais vous remercier assez pour cette opportunité de s'exprimer donnée à des militants associatifs français d'origine chinoise.

Je suis bénévole à l'association interculturelle franco-chinoise depuis 1995 et en suis devenue présidente. Vivant en France depuis les années 1980 et naturalisée française, à ma demande, il y a vingt ans, je présente le parcours d'un immigré « classique ». Pour l'UJCF, combattre le racisme est une forme d'intégration dans la société française. Cet engagement permet notamment de défendre les valeurs de la France, c'est-à-dire la liberté, l'égalité et la fraternité. En l'an 2010, suite à mon appel dans les réseaux sociaux, environ 50 000 personnes sont descendues dans la rue, brandissant les slogans « sécurité pour tous », « stop violence » et « non au racisme ». Je suis également coordinatrice des associations professionnelles et culturelles chinoises en Ile-de-France. Enfin, je suis référente pour les questions de sécurité auprès du préfet de Seine-Saint-Denis.

Je définirais le racisme comme la peur de la différence renforcée par l'ignorance. Le racisme est aussi un trait de caractère facilité par les difficultés économiques, sociales, environnementales et désormais sanitaires. Pour les personnes que je représente, le racisme se manifeste de manière visible et de manière invisible. Les formes visibles sont les insultes. Nous nous faisons traiter de « chinetoques », etc., non seulement dans la sphère privée, mais aussi dans la sphère publique. La presse nous accuse et nous stigmatise parfois comme responsables de la covid. Toutes les semaines, voire tous les jours, les associations font état d'agressions plus ou moins graves. J'ai été moi-même agressée et suivie jusque chez moi récemment. Ces violences ont pour conséquence première le repli communautaire, qui permet de ne pas se sentir isolé. Le sentiment d'impunité grandit, et avec lui la colère des personnes d'origine chinoise. Très peu d'élus abordent cette question et, si elle n'est pas traitée avec intelligence, le risque est d'en venir à faire justice soi-même par désespoir.

Les formes invisibles du racisme sont principalement le manque d'opportunités sociales et professionnelles et le manque de diversité citoyenne. Elles enferment les Français d'origine asiatique dans le mutisme et l'autocensure qui viennent nourrir leur colère.

Nous savons qu'il n'existe pas de recette magique pour supprimer la peur de l'autre. Notre première proposition serait la mise en place de caméras de vidéosurveillance et d'éclairages supplémentaires, afin de créer un environnement sécurisé. Le personnel de police devrait être mieux formé. Si les victimes d'actes racistes viennent rarement déclarer une agression, c'est par manque d'information, par peur ou en raison du sentiment d'être abandonnées des institutions.

Deuxièmement, dans les écoles primaires et secondaires, il conviendrait d'expliquer clairement que les personnes d'origine chinoise n'ont aucun lien avec la création de la covid. Mon fils doit aujourd'hui faire profil bas sur ce sujet à cause des informations véhiculées dans les médias.

Troisièmement, il serait souhaitable de renforcer le dialogue avec la Chine et les signes d'amitiés de la France envers la Chine.

Quatrièmement, il est important de ne pas américaniser la problématique du racisme, car la France n'est pas les États-Unis.

À moyen terme, il faudrait réviser la politique du logement pour développer une mixité sociale et urbaine. Il serait également souhaitable de promouvoir la formation des encadrants en charge de la sécurité et de l'éducation à la pratique de l'inter-culturalisme, afin de construire des relations respectueuses avec l'autre et de mieux comprendre les différences culturelles, au-delà des clichés. Enfin, il faudrait redonner un sens entier à nos valeurs constitutionnelles : liberté, égalité, fraternité.

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