Intervention de Frédéric Potier

Réunion du jeudi 24 septembre 2020 à 11h00
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Frédéric Potier, délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT :

Notre équipe est de taille réduite, mais nous ne travaillons pas seuls, heureusement. Nous organisons les formations avec de nombreux intervenants extérieurs, tels que l'historien Iannis Roder, spécialiste de la Shoah, l'avocat de SOS racisme, ou encore des psychologues. La force d'une petite équipe interministérielle est aussi de trouver des appuis pour préparer la formation la plus pertinente pour un public donné. Nos formations sont cousues main, sur des thèmes variés, et elles sont appréciées pour cette raison. Ainsi nous sommes en train de travailler sur une formation qui sera dispensée en fin d'année à Bordeaux, où le musée d'Aquitaine a ouvert une salle sur la mémoire de l'esclavage, ce qui nous permettra d'aborder des thèmes que nous n'avons pas encore traités.

La capacité de la DILCRAH à répondre au caractère protéiforme du racisme est réduite par les limites du tissu associatif sur certains sujets. Les partenariats que nous avons tissés pour lutter contre le racisme envers les personnes asiatiques sont très récents – deux ou trois ans – alors que la crise sanitaire a démontré que le lien établi par certains entre la propagation d'un virus et ces personnes pouvait s'avérer d'une importance centrale. Nous devons faire monter en puissance ces partenariats plus récents, car nous ne travaillons pas de la même façon avec la LICRA, qui a cent ans, qu'avec des associations récemment constituées. De la même façon, la fragilité du tissu associatif limite nos possibilités d'action pour lutter contre le racisme envers les Roms. C'est à nous de faire monter en puissance les associations en question, de les aider à se professionnaliser et à trouver des partenariats. Nous devons renforcer les acteurs moins insérés dans le tissu opérationnel.

En réponse à votre première question, nos partenaires élaborent évidemment des projets permettant de faire travailler en commun sur un objet commun, qui nous dépasse. Nous finançons de manière importante le Mémorial de la Shoah, dont les activités hors les murs ne portent pas uniquement sur la Shoah : elles évoquent le Rwanda, le génocide arménien et l'esclavage. Cette approche est très féconde, et c'est pourquoi la dichotomie entre le racisme et l'antisémitisme est une mauvaise idée. Nous préférons adopter une approche intégrée de ces questions, sans nier les spécificités propres à chacune, ce qui nous permet en outre de dépasser les enjeux de concurrence mémorielle. Le camp de Rivesaltes abrite un très beau musée, très en avance sur ces questions. Il illustre la complémentarité des mémoires, puisque ce lieu a d'abord été occupé par les réfugiés républicains espagnols, puis par des familles juives pendant la Seconde Guerre mondiale, puis par des familles de harkis. Il reflète la complexité de notre histoire et détaille les préjugés qui sont nés de ces situations.

Concernant le contenu des manuels scolaires, le ministère de l'éducation nationale arrête un programme, mais chaque éditeur est responsable de ce qui est écrit dans son manuel. L'État n'impose pas un manuel en particulier, il laisse une liberté de choix en la matière. Des éditeurs nous saisissent ponctuellement pour que nous assurions une relecture sur certaines questions. C'est arrivé récemment, sur des questions de racisme, d'antisémitisme, mais aussi d'orientation sexuelle, dans des manuels d'éducation morale et civique ou de sciences sociales. Nous serions heureux qu'un plus grand nombre d'éditeurs nous contactent, et nous sommes très réceptifs à leurs demandes.

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