Intervention de Frédéric Dabi

Réunion du mardi 29 septembre 2020 à 17h00
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Frédéric Dabi, directeur général adjoint, directeur du pôle opinions et stratégies d'entreprise de l'Institut français d'opinion publique :

En ce qui concerne la méthode, à l'IFOP comme dans les autres instituts de sondage, nous ne menons aucunement des approches socio-ethniques. Nous nous en tenons à une logique déclarative, qui comprend comme je l'ai dit des forces et des faiblesses. Si je considère par exemple les enquêtes menées auprès de populations de confession musulmane, nous adoptons une approche fondée sur l'auto-identification. En d'autres termes, nous n'incluons dans notre échantillon que les individus qui s'identifient eux-mêmes comme musulmans, qu'ils soient convertis ou issus de familles musulmanes. Il en va de même de la détermination des orientations politiques. Nous demandons aux personnes de quel parti elles se sentent le plus proches. Les questions de l'appartenance et de la pratique religieuse sont présentes depuis longtemps dans toutes les enquêtes omnibus de l'IFOP. Poser ce type de question ne soulève aucune difficulté. Ces questions peuvent parfois gêner en face à face, mais les personnes ont parfaitement le droit de refuser de se prononcer.

S'agissant des statistiques ethniques, nous pouvons poser toutes les questions que nous souhaitons dans le cadre de nos enquêtes. En revanche, nous n'avons pas le droit d'exploiter les réponses et de constituer des fichiers. En l'état actuel des choses, nous pouvons travailler librement et sans difficulté suivant les approches que nous avons présentées.

Le lien entre la crise sanitaire et l'augmentation du racisme touchant la communauté asiatique s'explique peut-être par le fait que la lutte contre le racisme ne figure plus parmi les préoccupations prioritaires des Français. Les personnes interrogées indiquent souvent que ce n'est pas leur affaire. Durant la crise de la covid 19, nous avons vu des reportages concernant des personnes asiatiques moquées ou gênées dans le métro, mais ces faits n'ont pas percé le mur de l'opinion publique.

Sur le plan qualitatif, nous posons chaque semaine pour le compte du service d'information du gouvernement (SIG) une question ouverte de mémorisation de l'actualité. Je me souviens que dans ce cadre, le meurtre de Chaolin Zhang à Aubervilliers avait été très peu restitué par les personnes interrogées. De même, s'agissant de l'attaque de l'Hyper Cacher, sans même parler de Clarissa Jean-Philippe, complètement oubliée par l'opinion, l'attentat n'a pas fait évoluer de façon positive les préjugés envers les juifs. Le dernier événement qui avait induit un changement du regard porté par les Français sur le racisme est probablement le premier tour des élections présidentielles de 2002. Pour autant, dans l'enquête menée pour AJC, à la question « l'antisémitisme concerne-t-il seulement les juifs ou au contraire la société dans son ensemble », nous n'avons pas noté d'écart entre l'échantillon des Français grand public et celui des Français de confession juive. De chaque côté, 73 % des personnes interrogées considéraient que le problème concernait la société dans son ensemble.

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