Les 1 500 quartiers prioritaires de la ville ne font pas face à la même réalité. Dans ceux qui se trouvent en lisière des métropoles, un maillage a été mis en place, avec les « points d'information médiation multiservices » (PIMMS) et d'autres dispositifs d'accompagnement à l'accès aux droits. Dans d'autres, la réalité est plus complexe. France Services a pour objectif de ne pas revenir sur l'existant et de renforcer les territoires qui en ont besoin. Nous envisageons de faire appel à un prestataire spécialisé sur les flux de population pour identifier les endroits les plus opportuns.
Certaines populations sont réellement en retrait des services publics. Nous devons aussi les accompagner, pour créer une adresse e-mail, un compte à la CAF, etc. Dans les PIMMS, une réelle relation de confiance se crée avec l'opérateur. Nous devons donc travailler sur l'accessibilité géographique, la compréhension et l'illectronisme.
Nous allons lancer deux autres phases de testing. Le « name and shame » est déjà mal vécu. S'agissant des sanctions, un candidat à l'emploi victime d'une discrimination peut déjà faire appel à la loi. Nous avons aussi évoqué la nécessité de mieux former les encadrants et les services des ressources humaines.
Votre question sur le contre-modèle est centrale. J'ai longtemps travaillé sur le terrain, dans une cité vraiment dure de Seine-Saint-Denis, qui a depuis été détruite. Le modèle était le dealer qui faisait travailler tout le quartier. Les quelques diplômés cherchaient à partir très rapidement, mais ils ne trouvaient pas d'emploi. Cette situation détruit l'ensemble du travail des éducateurs.
Pour ma part, je ne crois pas aux grandes figures nationales, modèles pour tous les quartiers de France. Il me semble plus opportun de chercher des exemples au sein des immeubles, la maman qui gère une association avec 500 adhérents, le gamin qui a intégré une bonne école et a trouvé un emploi. Ce travail est quotidien et local, même si nous pouvons insister sur la communication. En revanche, avec de la discrimination et un problème d'accès aux droits, le contre-modèle ne peut pas émerger. Il convient donc de résoudre ces problématiques en amont.
Des associations travaillent à produire du contenu pour les chaînes de télévision et les journaux, afin qu'ils n'évoquent pas uniquement des voitures qui brûlent. Un journal a publié une page entière sur le fait que le confinement se passait extrêmement mal dans un quartier. J'ai expliqué à la journaliste qu'elle aurait dû s'y rendre pour constater aussi les solutions qui avaient été trouvées grâce à la solidarité. Un arbre qui tombe fait beaucoup plus de bruit qu'une forêt qui pousse. Cette situation est énervante pour ceux qui œuvrent sur le terrain dans le cadre de la politique de la ville. Nous pensons que des actions peuvent être bénéfiques et ce contre-discours terrible est catastrophique. Les populations des banlieues ne vivent pas toutes des transferts sociaux et du RSA.