Intervention de Anne-Marie Sauteraud

Réunion du mardi 24 novembre 2020 à 17h00
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Anne-Marie Sauteraud, ancienne présidente de la chambre 2-7è de la Cour d'appel de Paris :

Concernant le parquet spécialisé en matière de haine en ligne, cette mesure fait partie des dispositions de la loi du 24 juin 2020 dite « loi Avia » qui ont été maintenues. Ce parquet spécialisé serait sans doute celui de Paris. La compétence qui lui serait dévolue ne serait pas exclusive mais concurrente. Cela n'empêcherait donc pas les autres parquets d'agir. En pratique, cette compétence concurrente existe déjà, puisqu'en matière d'infraction de presse, la compétence est déterminée par le lieu de la diffusion des propos et, lorsqu'ils sont diffusés sur internet en France, le parquet de Paris est toujours compétent.

Concernant la formation des magistrats, l'École nationale de la magistrature (ENM) organise plusieurs sessions de formation continue sur les infractions de presse en général et sur le racisme et la haine en ligne. Je pense que ces formations sont très intéressantes car elles font intervenir des personnes très variées : des représentants d'associations, le parquet, des historiens, etc. Tous les magistrats ne peuvent pas suivre ces formations, mais ceux qui ont à traiter de ce genre d'infraction en ont la possibilité.

La responsabilité en cascade s'applique aussi à la communication numérique ; internet est englobé dans le dispositif. Pour un site internet édité par une association ou une personne morale, le responsable qui fait fonction de directeur de publication est le responsable de la personne morale qui édite le site. Ce principe est très utile pour déterminer le responsable pénal qui dans certains cas se cache sous de faux prétextes. Pour les réseaux sociaux, la situation est différente puisque ce principe d'éditeur n'existe pas. En l'état, le principe de la cascade ne s'applique pas. On pourrait cependant imaginer que le responsable de la plateforme puisse encourir une responsabilité s'il ne remplit pas certaines obligations.

Concernant la difficulté de prouver une intention en matière pénale, cela dépend de l'infraction poursuivie. Pour les infractions de presse que j'évoquais tout à l'heure, l'intention est incluse dans la teneur des propos. Il n'est donc pas nécessaire d'en apporter la preuve. Il en va autrement de la circonstance aggravante qui relève du droit pénal général. Si une infraction de violence, par exemple, s'accompagne de certains écrits ou actes qui démontrent l'intention raciale, alors la preuve est apportée. Par exemple, l'inscription d'une croix gammée sur les murs d'une chambre d'une personne qui a été violentée suffit à prouver l'intention raciste.

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