Intervention de Jean Grosset

Réunion du mardi 24 novembre 2020 à 18h00
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Jean Grosset, membre du bureau du Conseil économique, social et environnemental (CESE) :

Pour répondre à votre demande concernant les lieux de mémoire, nous nous trouvons dans un contexte très particulier de montée du populisme et du racisme. L'élection américaine en est la démonstration. Plus nous pouvons faire grossir le nombre de partisans défendant la lutte contre le racisme, mieux c'est. Le combat politique est très fort sur ce sujet, qui n'est pas nouveau en France. Notons que le palais de la Porte-Dorée s'appelait à l'origine le Musée des colonies, puis le Musée de la France d'outre-mer et enfin le Musée national de l'histoire de l'immigration.

Les problèmes d'emploi et les problèmes politiques autour de l'islamisme radical contribuent à l'instauration d'un contexte particulièrement difficile. C'est la raison pour laquelle le CESE est sorti du non-dit. J'ai été très vigilant sur le vote de la première résolution en réunion plénière qui regroupait 233 conseillers et conseillères, ainsi que 80 organisations. Nous nous sommes prononcés clairement contre le racisme et l'antisémitisme.

Des modules de formation sont certainement utiles. Il existe aussi des bonnes pratiques. Par exemple, SOS Racisme travaille avec un certain nombre d'organismes de ressources humaines qui ont des bonnes pratiques dans les entreprises. Dans ces cas-là, il faut partir de l'état des lieux.

Vous avez raison s'agissant du devoir de mémoire. Mais c'est une bataille militante à mener pour défendre ces idées. Prenons l'exemple de l'Algérie qui est intéressant à plusieurs titres. La guerre d'indépendance a bouleversé la France de façon considérable. Les travaux de M. Benjamin Stora font état de sept millions de personnes de la deuxième génération originaires du Maghreb, dont une majorité importante d'Algérie. La plupart de ces jeunes Français s'identifient à la guerre d'Algérie, d'autant plus qu'ils sont discriminés. Je ne parle pas ici des personnes qui menacent la République.

Nous avons trois axes d'action : la lutte contre les discriminations, le devoir de mémoire (à ce titre, le rapport demandé par le Président de la République est très courageux ; Emmanuel Macron est le premier chef d'État, alors qu'il était candidat à l'élection présidentielle, à avoir reconnu que la colonisation en Algérie était un crime contre l'humanité) et les modules de formation.

Dès lors qu'il existe un vrai danger, il faut que notre réseau militant porte ces idées. Il est très important que ces questions soient partagées, parce que le CESE dispose de cette faculté d'irriguer. Nous n'avons pas de quotas de discrimination positive. Nous n'avons pas un apartheid public, mais un apartheid qui ne dit pas son nom. Lorsque le CESE se renouvellera, je discuterai avec les conseillers sociaux actuels pour que le futur CESE soit à l'image de la société. D'abord, parce que c'est une assemblée très importante. Ensuite, parce que le fait d'avoir davantage de femmes et d'hommes représentant la France telle qu'elle est, à des postes de responsabilité, fait partie de la lutte contre les discriminations. C'est d'ailleurs le cœur de cible d'une dizaine d'associations au CESE.

Il est très intéressant que vous ayez mis en place cette mission d'information. En général, on parle de ce sujet quand un problème important survient. Par exemple, quand la manifestation en lien avec M. Adama Traoré a eu lieu, le conseiller chargé des questions sociales de l'Élysée m'a appelé pour me dire : « et au CESE ? ». Je lui ai répondu qu'il se manifestait uniquement en cas de crise. Le travail doit être mené en continu. Les problèmes d'inégalité et de discrimination ne peuvent pas être réglés en claquant des doigts. Ils sont inhérents à la manière dont l'humanité fonctionne. Il faut savoir que c'est un combat et il faut désormais marquer des points. Nous avons la chance d'avoir un État de droit.

Regardez l'égalité professionnelle femmes-hommes. Qui est contre désormais ? Personne. Comment se pratique-t-elle ? Vous le savez.

Les prochaines élections présidentielles ne sont pas rassurantes. Nous avons en France des forces politiques du Rassemblement National, pour ne pas dire son nom, qui structurent la pensée raciste. On ne peut pas l'ignorer ni déconnecter nos mesures de ce contexte.

C'est pour cette raison que nous avons pris cette décision de sortir du cadre classique, de nouer ces deux partenariats et d'intervenir régulièrement lors de la semaine contre le racisme et l'antisémitisme et lors de la commémoration de la déportation.

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