. Comme l'a expliqué Nicholas Green, la Law Commission remplit un rôle consultatif. Nous nous interrogeons sur comment mieux évaluer et réformer le droit actuel ; nous formulons des recommandations à l'attention du gouvernement et du Parlement. Nous devons nous assurer que la loi est simple, moderne et efficace en termes de coût.
Trois de nos projets actuels touchent à la liberté d'expression : ils concernent les crimes de haine, les discours de haine en ligne et enfin, la diffusion des images intimes.
La législation sur les crimes de haine au Royaume-Uni couvre cinq motifs : la race, la religion, l'orientation sexuelle, le statut transgenre et le handicap. Cette législation distingue plusieurs régimes juridiques : les délits (agression physique ou verbale), les délits aggravés (comme le trouble aggravé à l'ordre public) et l'incitation à la haine, par exemple dans les chants de hooligans et de supporters de football.
La catégorie des délits « aggravés » couvre un petit groupe de délits considérés comme plus graves et fondés sur la race ou la religion, à l'exclusion des autres motifs. S'il est possible de prouver qu'un crime ou un délit est motivé par la haine raciale ou religieuse (par exemple lorsqu'un propos raciste et violent est hurlé pendant une agression physique), il sera requalifié de crime ou de délit aggravé. Les sanctions sont alors beaucoup plus importantes.
L'incitation à la haine peut concerner, en revanche, les autres motifs et recouvre l'ethnicité, la race, la religion ou l'orientation sexuelle. S'agissant de la haine raciale il faut des menaces, abus ou insultes et une incitation à la violence, et que le caractère intentionnel de cette incitation soit démontré. Il n'est pas possible de poursuivre quelqu'un ayant tenu des propos insultants s'il n'avait pas l'intention d'inciter à la haine contre une personne.
La liberté d'expression est protégée par des garanties spécifiques en matière de religion et d'orientation sexuelle qui n'entrent pas dans la définition précitée de l'incitation à la haine. Une « clause de protection de la liberté d'expression » permet de s'assurer que le délit d'incitation à la haine religieuse ne limite pas le débat et n'empêche pas de critiquer une religion ni même d'exprimer une forme d'hostilité (dédain, antipathie, moquerie etc.) à l'égard d'une religion ou des pratiques des croyants, tant que cette critique ne revêt pas par elle-même un caractère menaçant et ne vise à pas à dissuader certains pratiquants d'exercer leur religion. De même pour l'orientation sexuelle.
Par exemple, dans le cadre des discussions sur le mariage homosexuel, aucune critique ne pourrait avoir lieu qui pousse à la haine des communautés LGBTQI (personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans, queers, intersexes).
Un de nos objectifs principaux est de mettre à plat les différents régimes juridiques et la manière dont les caractéristiques de protection sont définies. La loi serait plus juste si elle se basait sur des caractéristiques et des protections égales. Nous proposons de créer un certain nombre de nouveaux délits aggravés, notamment pour mieux répondre à la haine en ligne et au cyber harcèlement. Il convient de toujours bien distinguer les propos haineux selon qu'ils incitent ou non à la violence. Seuls les propos qui poussent à la haine raciale ou au « passage à l'acte », avec une intention clairement affichée, pourraient constituer de nouveaux délits aggravés.
Nous proposons que les poursuites judiciaires puissent s'organiser beaucoup plus facilement pour répondre à l'ensemble des délits découlant de l'incitation à la haine.
Nous proposons aussi d'inclure les appels à la haine en matière d'orientation sexuelle dans le champ des délits aggravés (par exemple, certains cris des supporters de football).
Nous avons également proposé d'ajouter un critère fondé sur le sexe afin que les délits caractérisés par une démonstration intentionnelle d'hostilité envers un certain genre soient assimilés à des crimes de haine.
Pour ce qui est de la caractérisation du délit aggravé et des peines complémentaires, nous proposons que le délit soit motivé par l'hostilité ou le préjugé.
En matière d'incitation à la haine, il serait suffisant de voir qu'il existe une intention, un comportement menaçant ou abusif (nous proposons de supprimer le terme « insultant »). Nous souhaitons cibler les messages les plus compliqués qui ont pour intention délibérée ou non d'attiser la haine. Nous proposons de retirer la référence légale actuelle au « inflammatory language » (propos incendiaire) car elle est utilisée par certains groupes conscients de cette disposition, qui adaptent leur langage tout en adressant des messages qui visent à attiser la haine.
S'agissant des actes ayant pour effet de répandre la haine, nous proposons de supprimer l'élément de comportement : l'intention doit pouvoir se déduire des conséquences de l'acte, afin de responsabiliser leurs auteurs.
Notre document de consultation est disponible sur le site internet de la Law Commission. Nous étudierons les réponses à la consultation dès le début de l'année 2021 et espérons publier un rapport final contenant des recommandations d'ici à la fin de l'année 2021.