Intervention de Mikael Quimbert

Réunion du mardi 1er décembre 2020 à 18h00
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Mikael Quimbert, adjoint au sous-directeur des politiques publiques à la direction générale des outre-mer du ministère des outre-mer :

. Le CSA a d'ores et déjà un baromètre d'observation sur les minorités visibles. Certes, il est compliqué de différencier un présentateur de télévision originaire de Martinique d'un autre descendant lointain d'un ressortissant d'un pays d'Asie ou d'Afrique. En la matière, nous nous appuyons sur le pacte de visibilité de France Télévisions qui ne se limite pas à la couleur de peau ou à la question minoritaire, car la richesse des outre‑mer est bien plus large, provient par exemple également des populations installées depuis plusieurs siècles lors de la colonisation.

Le réflexe de l'outre-mer s'ancre progressivement dans l'information nationale. Par exemple, les journaux d'information sont passés de 48 reportages durant la période entre janvier et août 2018 à 86 entre janvier et août 2020 sur France 2 et de 71 à 129 sur France 3, soit une augmentation de 80 % de sujets d'information sur les outre-mer sur deux ans et de 25 % sur l'année en cours. L'actualité nous aide probablement, mais les chaînes de télévision ont beaucoup plus le réflexe d'intégrer les outre-mer dans certains sujets, tels que la rentrée scolaire après le confinement ou la crise de la Covid vécue par les personnes dans leur territoire.

Concernant la question de la santé, cette problématique va probablement générer des discriminations, bien qu'elle soit moins prégnante en Martinique qu'à Mayotte, en Guyane ou dans le Pacifique. Ces questions compliquées ont été longuement débattues lors de la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer, dite loi « Lurel », il y a quelques années à propos des yaourts. Un travail est mené avec les industriels, mais ces derniers disent fabriquer ce que les personnes veulent acheter et le sucre est probablement un moyen pour cacher la mauvaise qualité d'un produit.

C'est l'une des politiques prioritaires du ministère des outre-mer, notamment avec le ministère de la santé dans le cadre du Plan national nutrition santé qui vient d'être adopté. La situation a progressé sur les produits laitiers, mais le chemin reste long. La crise de la Covid qui frappe particulièrement les personnes atteintes de ces pathologies nous rappelle à cette obligation.

S'agissant de l'éducation et de la formation des cadres, des progrès doivent encore être faits. Des universités ultramarines existent et fonctionnent aux Antilles, à La Réunion, en Guyane et dans le Pacifique. Il faut être vigilant sur les classements de réussite aux examens, car l'année scolaire a parfois un décalage dans le temps. C'est le cas en Nouvelle-Calédonie où certains étudiants quittaient leur année universitaire sans diplôme pour faire leur rentrée en métropole. Les étudiants sont aussi bien formés qu'en métropole. La difficulté porte sur l'accès à l'emploi des jeunes.

Dans des territoires spécifiques tels que Mayotte, dont la taille ne permet pas d'avoir des universités de plein exercice jusqu'au master, il existe des programmes spécifiques tels que « 400 cadres ». Ils visent à identifier de jeunes talents ou futurs cadres pour les accompagner, les « tutorer », leur trouver un logement et payer leurs études pour qu'ils puissent ensuite revenir dans leur territoire et participer au développement local. Ces programmes sont probablement à renforcer.

Pour les étudiants ultramarins en métropole, j'ai évoqué le rôle très important de la délégation interministérielle pour l'égalité des chances des Français d'outre-mer (DIECVI FOM). Cette petite structure n'accueille pas elle-même les étudiants, mais les collectivités ultramarines sont présentes à Paris via les maisons pour les DOM. Outre leur mission en faveur du tourisme, ces maisons accueillent les étudiants ultramarins pour les accompagner et leur servir d'interlocuteurs. La délégation joue aussi ce rôle en s'appuyant sur les associations telles que le Comité d'action sociale en faveur des originaires des départements d'outre-mer en métropole, appelé Casodom, qui accompagne les étudiants ultramarins en métropole et qui fait un travail formidable. Nous participons au financement de ses activités via la DIECVI. Dans le cadre de la crise de la Covid, il a été un relais très important. D'autres associations plus petites interviennent également auprès des étudiants sur des problématiques plus ciblées, par exemple pour des personnes LGBT.

En ce qui concerne l'accueil dans la fonction publique, nous ne disposons d'aucune statistique, puisque la loi française l'interdit. Néanmoins, les Ultramarins existent dans la fonction publique et sont affectés outre-mer, ni plus ni moins que les autres. Le principe d'égalité dans la fonction publique est fort.

Toutefois, il existe des systèmes ciblés de dérogation qui permettent de répondre à des besoins ponctuels. Ils servent par exemple à inciter les professeurs des écoles à rejoindre certains territoires qui ne paraissent pas attractifs pour les candidats à l'affectation dans les fonctions publiques. C'est le cas à Mayotte où, pour faire face au manque de candidats pour le premier degré, le concours de professeur des écoles, qui est organisé sur une base académique, est accessible à partir de bac+3 au lieu de bac+4 ailleurs. Ce cas est très ponctuel.

Dans le cas des concours, certaines grandes écoles ont dirigé leur recrutement vers les zones d'éducation prioritaire. Des classes préparatoires permettent aussi aux personnes de milieux sociaux plus défavorisés d'avoir accès à ces concours. Il ne s'agit pas de critères d'origine géographique, mais de lycées situés dans des zones d'éducation prioritaire. Cela a néanmoins profité aux territoires d'outre-mer puisque la Guyane et Mayotte ainsi qu'une grande partie des territoires des Antilles et de La Réunion sont classés en zone d'éducation prioritaire. Un certain nombre d'écoles vont aussi dans les territoires d'outre-mer pour s'y présenter, briser des tabous et pousser vers les études les jeunes qui ont de bons résultats scolaires et un potentiel. Certaines de ces études les mèneront à passer des concours de la fonction publique.

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