. Je suis coordinateur de formation du pôle des humanités judiciaires. Cela n'est pas sans raison que le sujet du racisme n'est pas hébergé au sein du pôle pénal ou du pôle civil. Le pôle des humanités judiciaires a vocation à ouvrir l'esprit des magistrats à l'ensemble des enjeux sociétaux.
L'École est particulièrement attentive aux enjeux liés au racisme et à la haine. C'est pourquoi nous avons développé une formation spécifique au racisme et à l'antisémitisme et au traitement judiciaire des discours de haine. Elle provient de la fusion de deux sessions antérieures, qui se complétaient : une session sur le racisme créée en 2011 et pilotée par la CNCDH, et une session montée en partenariat avec la DILCRAH sur le traitement judiciaire de ces questions. Nous avons donc créé une unique session de formation dont la durée a été portée à six jours. Nous formons à ces sujets les magistrats ainsi que les publics extérieurs de l'École, à commencer par les enquêteurs.
Cette formation est construite sur deux modules de trois jours chacun, c'est-à-dire la durée maximale que la formation continue obligatoire peut offrir : le premier porte sur le contexte des infractions et le second sur leur traitement. Le premier module repose pleinement sur la pluridisciplinarité. Il convoque des historiens et des sociologues et appelle, sur ces sujets extrêmement controversés, à toujours adopter le point de vue du débat contradictoire. Toutes les thèses doivent être rationnelles, argumentées et soumises au débat contradictoire. Des professeurs de psychiatrie interviennent également pour expliquer ce que peut créer, chez la victime, un acte ou un discours haineux. Le second module technique ne peut être traité sans avoir au préalable suivi ce premier module contextuel, car le premier module permet de rendre les magistrats conscients de la société dans laquelle ils se placent et de mieux traiter les infractions. Cette durée de formation reste courte pour aborder les nouveaux enjeux soulevés par l'expression de la haine en ligne. La technicité du droit de la presse, en constante évolution et l'utilisation des nouveaux outils technologiques rendent la matière particulièrement complexe à appréhender.
Il est également très important que les magistrats rencontrent des acteurs externes : des avocats, des associations, des policiers et des gendarmes viennent les former et témoigner de leurs expériences. Les partenariats avec le Mémorial de la Shoah permettent aux magistrats de proposer, comme alternative aux poursuites, des stages de citoyenneté.
Enfin, nous avons créé une plateforme Moodle de formation à distance, qui permet de former beaucoup plus de magistrats qu'habituellement. Elle héberge à la fois les vidéos des sessions déjà passées et de la documentation ciblée. Elle a vocation à s'enrichir continuellement pour répondre aux différents enjeux d'actualité.