Intervention de Amirouche Laïdi

Réunion du jeudi 10 décembre 2020 à 10h30
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Amirouche Laïdi, président du Club Averroès :

Je vous remercie d'avoir pensé au Club Averroès Club pour cette audition et de vous intéresser à ce sujet, qui est un axe majeur d'inclusion républicaine. Je précise au préalable que cela ne me dérange pas que Christine Kelly interviewe Éric Zemmour ni d'entendre Éric Zemmour sur CNews tous les jours. Ce qui me gêne, c'est qu'en face d'Éric Zemmour il n'y ait pas d'invité capable de répondre à ses propos, et notamment ses nombreuses fake news. Même si je le trouve intelligent et brillant, il raconte souvent n'importe quoi et, en face de lui, très peu de personnes sont capables de déconstruire ses a priori et ses fake news. Christine Kelly a toute ma sympathie. C'est une militante de la diversité, elle a toujours été aux côtés du Club Averroès depuis sa création et elle incarne ce que nous souhaitons porter au plus haut.

Pour me présenter brièvement, je suis le président du Club Averroès. C'est un club privé et non une association. Il existe depuis 1998. Nous n'avons jamais perçu la moindre subvention. C'est essentiellement un club de professionnels des médias, qui compte plus de 150 journalistes, ainsi que des producteurs, des réalisateurs, des publicitaires, des artistes en tout genre. Par ailleurs, je suis chef d'entreprise, d'une entreprise de communication, et je suis élu local sans étiquette depuis vingt-cinq ans dans une ville de la banlieue ouest.

J'ai fondé le Club Averroès avec plusieurs journalistes, dont David Pujadas, qui officie à La chaîne info (LCI). Nous partions de l'idée qu'il y avait très peu de représentation de la diversité à l'écran, devant et derrière, que cette non-représentation créait une sorte d'invisibilité pour une partie de la population française, et que les conséquences en étaient directes, en matière de visibilité, de représentation dans les médias, mais aussi indirectes en matière d'emploi, de recrutement, de mobilité ou de logement. La raison de ce Club Averroès n'était donc pas tant de colorer l'industrie que sont les médias que de les inciter à représenter le plus fidèlement possible la société française.

Je m'inscris en faux contre le propos de Christine Kelly lorsqu'elle dit que les médias ne sont pas les premiers responsables, puisque les médias ne reflètent absolument pas la représentation française en matière de diversité mais aussi d'origine sociale, de sexe, de genre et de handicap. Le baromètre de la diversité du CSA le dit chaque année, sans que du reste cela change grand-chose en matière de représentation dans les médias. Il y a une forte responsabilité des médias dans le fait de ne pas représenter la société telle qu'elle est. Le dernier baromètre de la diversité soulignait d'ailleurs que le parent pauvre était le handicap, avec une représentation inférieure à 1 % à la télévision française.

Depuis plus de vingt ans, j'accompagne avec mon club, directement et indirectement, et de manière totalement bénévole, un certain nombre de médias, pour les conseiller et les guider en matière de promotion de la diversité. Nous avons obtenu de nombreux résultats. La visibilité existe aujourd'hui, notamment à l'antenne. Elle reste pour nous assez faible et insuffisante. Nous estimons que le compte n'y est pas.

Quand nous voyons la façon dont les Français consomment des programmes anglo-saxons qui font la part belle à la diversité, j'ai du mal à comprendre cette dichotomie entre les programmes français et les programmes américains, qui présentent une forte diversité à l'antenne et ne posent pas de problèmes d'audience. Il n'y a pas de diversité sans identité et il n'y a pas d'identité sans diversité, et le danger est l'uniformisation. Je ne doute pas que nous allons vers une forte représentation de la diversité dans les années à venir dans les médias, notamment à l'antenne, mais le problème est que ce ne sera pas la diversité française. Ce sera une autre diversité, plus universelle, plus uniforme, plus mondialiste. Je prône pour ma part une diversité à la française.

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