Une dernière observation s'agissant de l'administration de la preuve : si l'intention en tant que telle ne peut être sanctionnée – c'est là l'un de nos principes fondamentaux –, il n'en demeure pas moins que la qualification pénale de la discrimination suppose nécessairement que l'intention soit prouvée – on parle de dol spécial. Autrement dit, la preuve doit être faite que c'est bien à raison de l'appartenance vraie ou supposée à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée que l'employeur a entendu prendre la mesure discriminante.
C'est pourquoi l'inspection du travail peut demander que lui soit communiqué tout document permettant d'établir la preuve de l'intention. Je pense, par exemple, au fichier BBR – pour « bleu blanc rouge » – constitué par une société d'intérim. Mais il n'est pas facile de trouver de tels documents, d'autant que nous ne pouvons pas les saisir, contrairement aux services de police judiciaire, qui agissent sur réquisitions.
La loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, promulguée en 2019, a élargi les possibilités de cosaisine. Cette évolution législative est intéressante, mais encore récente : nous devons apprendre à l'utiliser. Elle institutionnalise les échanges d'informations entre les services de police judiciaire et les corps de contrôle. Ces derniers se sont vu conférer certains pouvoirs de police judiciaire, soit d'office soit à la demande du parquet, ce qui leur permettra d'agir en appui de certaines actions judiciaires. Cela dit, en tout état de cause, l'inspection du travail restera tenue par l'obligation de confidentialité.