Intervention de éric Dupond-Moretti

Réunion du mardi 12 janvier 2021 à 17h15
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux :

M. Zemmour et M. Soral, je les mets dans le même « sac procédural », ce qui ne signifie pas qu'ils soient les mêmes. L'un se lâche un peu de temps de temps et a tenu des propos singuliers... L'autre est à l'antisémitisme ce que Richter est aux séismes : une référence totale, absolue, répugnante. L'un est journaliste avec une carte de presse. L'autre vient s'inscrire dans la loi de 1881, parce qu'il utilise la responsabilité en cascade – et la Suisse, soit dit en passant. Il a d'ailleurs déposé contre moi une plainte, au prétexte que j'aurais fait en sorte de modifier les textes pour qu'il soit détenu. Je ne sais pas ce qu'en fera la Cour de justice de la République…

Merci d'avoir souligné ce que nous avons fait pour le boycott et que nous sommes l'un des rares pays à avoir fait. J'ai rencontré l'ambassadeur d'Israël à Paris il y a quelques jours. On verra si l'on ira plus loin : cela relève du débat parlementaire.

Je partage malheureusement le constat d'un renforcement des communautarismes et de l'augmentation des propos et des actes racistes. Je connais le drame des familles juives, qui ont déserté certains départements et qui sont, pour certaines, retournées définitivement en Israël, parce qu'elles estimaient, à juste titre, que notre pays ne les protégeait plus ou, à tout le moins, qu'il y avait une pression insupportable dans les quartiers. Je connais tout cela par cœur.

Je connais également l'histoire de Miss Provence, à propos de laquelle, heureusement, la justice a été saisie. Cette petite s'est fait démolir. Je ne peux rien dire d'autre et seulement partager votre constat, hélas. Même s'il existe déjà beaucoup de textes, on rencontre toujours la même difficulté probatoire. À partir du moment où l'on a identifié celui qui a balancé sa haine, on tient un suspect et on peut aller de l'avant, mais cela n'est pas toujours le cas. On peut tout de même aller en chercher un certain nombre, qui n'ont pas ces précautions oratoires, qui ne sont peut-être pas les plus subtils, ni les plus aguerris ou les plus professionnels.

Madame la rapporteure, vous m'avez parlé de « l'affaire Mila » de Vienne, laquelle est désormais prise en charge à Paris, de même que celle de Miss Provence, qui est traitée par le pôle spécialisé contre la haine en ligne. Ce dernier fonctionne depuis quelques jours mais ne dispose bien évidemment pas d'une compétence exclusive. Malheureusement, étant donné le nombre d'infractions constatées, il ne serait pas possible de tout centraliser à Paris. Il y a un tel nombre d'insultes et d'injures à caractère raciste qu'il est bien difficile de tout traiter. C'est pour cela que je suis convaincu que la mise en œuvre de ces règles de procédure pénale sur la haine en ligne peut faire baisser la tension. Si l'on sait que l'on peut, du jour au lendemain, être déféré devant le tribunal correctionnel, j'espère que cela peut faire changer un peu le cours des choses.

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