Intervention de Stéphane Layani

Réunion du mercredi 15 septembre 2021 à 18h00
Mission d'information sur la résilience nationale

Stéphane Layani, président-directeur général de la SEMMARIS (marché international de Rungis) :

Tout à fait. Nous avons donc connu des tensions très fortes avec les produits importés. Nous avons géré cette situation collectivement ; la fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD) y a contribué de manière satisfaisante, ainsi que les fédérations des petits commerçants, notamment la fédération de l'épicerie et du commerce de proximité (FECP), qui représente le commerce franchisé. Nous sommes parvenus à surmonter cette difficulté, mais cela a engendré une tension sur les prix, car les transports sont devenus plus chers.

Pour en revenir à l'approvisionnement, nous avions deux hantises : ne pas avoir les produits demandés par les consommateurs et en avoir trop, ce qui génère une chute des cours et une marge insuffisante pour les mandataires, les grossistes et les agriculteurs.

Nous avons donc décidé, sous l'influence notamment des pouvoirs publics et de la région Île-de-France, de créer le site B to C « Rungis livré chez vous », afin de servir les habitants confinés chez eux, sans solliciter les détaillants. Ces derniers nous l'ont reproché, mais il faut rappeler qu'à cette période de la crise sanitaire, les vaccins n'étaient pas encore disponibles et les personnes âgées ne voulaient pas sortir de chez elles. Ce site a connu un grand succès, avec plus de 26 000 paniers distribués lors du premier confinement et un taux de satisfaction de plus de 95 %.

Je me suis engagé auprès des fédérations du commerce, le conseil du commerce de France (CdCF) et la confédération du commerce de proximité, à fermer ce site dès la fin du confinement, pour ne pas être en concurrence avec mes clients.

Pour conclure mes propos, j'ai été marqué par la solidarité très forte qui s'est manifestée lors de ce premier confinement. Avec les différents acteurs du secteur, notamment la FNSEA, la FCD et les marchés, nous échangions régulièrement par téléphone, et cela fonctionnait très bien. Nous ne positionnions pas comme étant en concurrence les uns avec les autres, mais plutôt dans une forme de complémentarité. J'ai également été marqué par le fait que les goûts des consommateurs ont évolué lors de cette période de confinement.

Les Français ont eu de plus en plus recours à la digitalisation et plus de quatre-vingts initiatives « Parcours du marché de Rungis » ont été recensées, en dehors de « Rungis livré chez vous », pour livrer aux consommateurs les produits vendus via le commerce électronique. Ainsi, le confinement a constitué le premier moment d'un mouvement de digitalisation qui, à n'en pas douter, a vocation à se poursuivre. Il est clair que le commerce des produits frais ne sera plus le même après cette crise.

J'ai aussi été frappé par le désir des Français de consommer des produits locaux. Nous récoltons déjà un grand succès avec le « Carreau des producteurs d'Île-de-France », qui représente une très grande partie de l'alimentation fraîche de la région. Pour cette catégorie des produits frais, on observe une demande très forte pour ces produits locaux cultivés à moins de 250 kilomètres de Paris. En l'état, les produits locaux représentent 2,5 % des besoins alimentaires des franciliens.

Je veux tout de même souligner qu'une grande erreur a été faite lors du premier confinement : il a été décidé de fermer les marchés de plein vent, après une polémique au sujet du marché de Barbès ; mais 30 % de l'alimentation fraîche transite par ces marchés ! Ces fermetures ont conduit les consommateurs à se tourner vers le commerce de proximité ou la grande distribution, ce qui, du point de vue du risque épidémique, n'était pas optimal, car cela conduisait à concentrer toute la population dans le même circuit de distribution. Cette erreur n'a pas été reproduite lors des confinements suivants, car nous disposions alors de masques et de mesures barrières.

Au total, sur la période des trois confinements, nous avons connu une accélération de la croissance du marché de Rungis, hormis pour les entreprises spécialisées dans la restauration et les produits de la marée, lesquels sont, pour l'essentiel, consommés au restaurant.

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