L'UTLF représente les entreprises du transport routier, les entreprises logistiques ainsi que toutes les entreprises qui opèrent dans le champ de la commission de transport Overseas, incluant le maritime et l'aérien.
S'il faut tirer une leçon de la crise du covid-19 ou d'autres crises de même ampleur, c'est que la France doit préserver absolument et par tous les moyens son outil de transport et de logistique. D'aucuns ont pu considérer que le transport routier n'était plus une activité stratégique et que d'autres pouvaient assurer cette mission à plus bas coût. Cependant, lorsque les frontières sont fermées, heureusement que des entreprises françaises de transport routier continuent d'opérer. Ce secteur est essentiellement composé d'entreprises privées et il est possible que les pouvoirs publics n'aient pas pris la mesure du vrai service public rendu par ces dernières. M. Lahaye l'a déjà souligné dans son intervention en évoquant la mobilisation des chauffeurs, mais cette mobilisation a aussi été réelle dans les entrepôts logistiques. Nous avons assisté à un fort engagement des personnels. Alors que le confinement avait mis à l'arrêt beaucoup de secteurs et que nombre de salariés étaient à leur domicile, les salariés de nos secteurs – conducteurs, préparateurs de commandes, etc.– se levaient tous les matins pour se rendre au travail car ils avaient conscience qu'ils étaient nécessaires pour que les Français puissent avoir accès aux produits de première nécessité.
Les risques auxquels nous pouvons être confrontés sont de plusieurs ordres : régionaux ou ponctuels, notamment lors des intempéries, ou nationaux voire mondiaux comme nous l'avons vécu avec la crise sanitaire. L'objectif n'est pas de prioriser les risques mais d'établir une cartographie de ces derniers pour identifier les risques majeurs. Comme Mme Florence Berthelot, je regrette qu'il n'existe aucun plan national des pouvoirs publics pour assurer la continuité du transport de marchandises. C'est peut-être parce que nous sommes dans le secteur privé. Mais ce n'est pas parce que nos entreprises ne relèvent pas de la sphère publique que nous ne pouvons pas être intégrés à un plan national de continuité de l'activité, en particulier lorsque l'on représente un intérêt aussi essentiel.
Nous avons sondé nos adhérents sur les risques qu'ils jugent les plus importants. Ils mentionnent les risques terroriste, climatique et pandémique – que nous n'avions pas vraiment anticipé mais que nous pouvons sans doute mieux gérer désormais avec l'expérience –, mais leur plus grande inquiétude porte sur le risque cyber. Ils s'inquiètent notamment que les systèmes d'information puissent être attaqués par des pirates informatiques ou soient mis à l'arrêt à la suite d'une panne ou d'un dysfonctionnement majeur. Alors que tous nos systèmes sont informatisés et digitalisés pour tracer les flux et les trajets mais aussi pour gérer le stockage en entrepôt, tout incident pourrait interrompre l'activité. Cette inquiétude porte aussi sur les ruptures de la fourniture d'énergie, notamment dans les entrepôts frigoriques. Ce sont en définitive les deux risques qui suscitent le plus d'inquiétudes, d'autant que ce sont les risques les plus probables à l'échelle régionale comme nationale.
Je souhaite aussi relever le vrai intérêt des administrations du ministère de l'intérieur pour identifier les risques liés à la sécurité. Cependant, lors du premier confinement, des contrôles ont été effectués et des camions transportant des palettes de bois ou du film plastique ont pu recevoir l'interdiction de rouler au prétexte que ces marchandises n'étaient pas essentielles. Nous avons donc dû établir avec l'administration une liste pour prévoir tous ces cas de figure, étant entendu que les produits de première nécessité – alimentaire, d'hygiène, etc.– doivent être emballés et conditionnés pour être transportés et stockés. D'autres produits de première nécessité ont dû être ajoutés à cette liste, comme les pièces de rechange pour les chariots élévateurs de nos entrepôts et pour les camions. Nous n'avons pas voulu allonger cette liste à plaisir mais elle rend compte de tout ce qui constitue la chaîne logistique.
Je souhaite terminer mon intervention par un point juridique. Face à une catastrophe d'ordre national voire mondial, les entreprises privées de transport et de logistique se sont trouvées de facto à assurer un service vital pour la nation. Dans ces circonstances, les pouvoirs publics ont eu le souhait légitime de recueillir en permanence de l'information : sur les flux, sur les taux d'absentéisme, sur le niveau des stocks, etc. Ces informations sont cependant aussi soumises aux règles du droit de la concurrence et les entreprises ne peuvent pas les échanger librement dans leur intégralité. Nous comprenons que les pouvoirs publics aient besoin de collecter ces données en temps de crise, mais les entreprises ne sont pas exonérées pour autant des autres obligations qui pèsent sur elles en matière de respect du droit de la concurrence.
Concernant le transport maritime et l'aérien, notamment pour l'acheminement des masques et de tous les autres équipements de sécurité, nous demandons que les pouvoirs publics fassent confiance aux professionnels de la logistique pour organiser ces flux. Sans doute les administrations voulaient-elles bien faire mais les représentants de ces administrations, qui souvent avaient un profil scientifique ou représentaient les métiers de la santé, n'étaient pas compétents pour organiser un transport aérien ou maritime de marchandises. Des professionnels auraient dû être associés plus tôt dans les réflexions afin que chacun puisse intervenir en fonction de son champ de compétence, les uns pour s'assurer du suivi sanitaire de la crise et les autres pour assurer la logistique.