La gendarmerie s'oppose à l'application de la directive européenne sur le temps de travail, de même que le Président de la République et la ministre des armées. Nous sommes alignés sur la nécessité pour les forces armées de ne pas appliquer cette directive. Le système de la gendarmerie est organisé autour de la disponibilité. Notre dispositif permet une gendarmerie efficace, résiliente sur le terrain, capable de mobiliser des moyens dans l'urgence. Un encadrement du temps de travail impliquerait de repenser la gendarmerie en totalité. Nous ne pourrons conserver nos résultats en augmentant les contraintes en termes de disponibilité. Les gendarmes sont très attachés à leur statut militaire. Or la disponibilité fait partie de ce statut. Nos dispositifs de récupération sont cohérents : les astreintes donnent droit à des récupérations, les périodes de repos sont encadrées, les permissions sont assurées. Je pense que mon avis est très largement partagé par l'ensemble des gendarmes.
Je vais répondre à présent à votre question sur les facteurs critiques qui, dans la conduite des crises, pourraient freiner la réactivité. La résilience des systèmes d'information et de communication est un enjeu majeur. À l'occasion d'une catastrophe telle que la tempête Alex, il est crucial de pouvoir communiquer et de disposer de moyens de communication résilients. La gendarmerie a la chance de posséder le réseau de télécommunication RUBIS. Lui seul est resté opérationnel pendant la tempête Alex. Ce réseau est déjà ancien. Nous allons évoluer dans un avenir proche vers un réseau de communication et d'information plus numérique, le « réseau radio du futur », dont la première brique en gendarmerie sera PCSTORM. Sur le terrain, un gendarme sera équipé d'un terminal portable, son téléphone, qui lui donnera accès à l'ensemble des fichiers. Il disposera également d'un ordinateur qui lui permettra de saisir les plaintes sur le terrain, de traiter une enquête judiciaire sur le terrain.
Le numérique permet plus de mobilité et une nouvelle vision de la gendarmerie. Nous n'aurons plus besoin de demander au public de se déplacer à la brigade. Nous adoptons une logique de « pas de porte ». Les permanences peuvent être prises ailleurs qu'à la brigade, dans des mairies, dans des maisons France Services, en nomadisation avec des camping-cars ou des minibus dans les zones rurales. Cependant, il existe un risque lié aux fragilités des réseaux numériques. Nous devons mesurer ce risque et mettre en place les couvertures permettant de faire face, par exemple, à une atteinte globale du réseau internet. Certaines garanties existent, notamment parce que le réseau de l'État n'est pas totalement dépendant de l'internet. L'ensemble de nos données sont hébergées dans des data centers parfaitement protégés et résilients grâce à des équipes spécialisées en cyberdéfense. La consultation des données est réalisée par le biais de l'intranet, ce qui les rend disponibles même dans le cas de coupure d'internet. Une telle coupure poserait malgré tout une difficulté pour la consultation des données sur le terrain. Nous réfléchissons actuellement à la mise en place de systèmes qui nous permettraient de créer nos propres « bulles » en replaçant des bornes. Ces systèmes pourraient être des véhicules-relais qui rétabliraient une liaison entre le système RUBIS et l'intranet, afin de garantir l'accès aux données. Un travail important est actuellement en cours sur ces sujets. Il est certain que cette évolution vers le « tout numérique » présente des vulnérabilités. Le réseau radio de la gendarmerie passera par les téléphones portables NEO2, prochainement distribués à 120 000 gendarmes. La protection de ces systèmes contre les cyberattaques doit être prioritaire, ainsi que la mise en place de solutions résilientes en cas de perte de réseau.