Intervention de Christian de Tinguy

Réunion du vendredi 5 novembre 2021 à 9h30
Mission d'information sur la résilience nationale

Christian de Tinguy, président de l'Union nationale des industries de la manutention dans les ports français (UNIM) :

L'UNIM est la fédération de branche de la manutention portuaire, aussi bien en métropole qu'en outre-mer. Nous représentons la partie privée et M. Chalus représente les autorités portuaires. Nous gérons conjointement la convention collective nationale unifiée des ports et docks qui concerne les dockers et le personnel des établissements publics portuaires. Cette mission sociale n'est qu'une partie des missions de l'UNIM. L'autre mission consiste à défendre notre profession. En effet, la manutention portuaire n'est pas une mission de service public. Ce statut a été tranché au niveau européen il y a plus de trente ans, nous sommes dans un marché concurrentiel Notre concurrence se joue en Europe, voire avec d'autres pays non européens de la Méditerranée, et nous devons veiller à disposer des mêmes armes que nos concurrents pour exercer notre profession de la manière la plus efficace et la plus productive possible.

Nous vous remercions de nous avoir sollicités pour intervenir au sujet de la résilience, car nous pensons qu'il est indispensable de conserver une souveraineté, au moins au niveau européen sinon au niveau français, pour nos ports. Nous faisons partie de la fédération européenne des opérateurs portuaires, la Feport. Il faut absolument conserver un tissu portuaire français, même indépendamment de l'Europe. Nous avions déjà agi dans ce sens et les événements de 2020 ont prouvé que nous avions raison. Lorsque le confinement bloquait tout, que faisions-nous de nos dockers qui devaient rester chez eux ? Fin 2019 et début 2020, nous avons traversé des semaines difficiles dans le cadre de la réforme des retraites où, étonnamment, les dockers avaient suivi le mouvement de la Confédération générale du travail (CGT) alors qu'ils sont généralement plus corporatistes que politiques. Ils ont, avec les agents des ports, fortement suivi les mouvements, provoquant une baisse de trafic considérable – jusqu'à - 35 % pour les conteneurs et - 80 % pour les véhicules – au début de 2020. Lors du confinement, en l'espace de quarante-huit heures, nous avons mis en place – avec le cabinet du ministère des transports et la collaboration totale de la Fédération nationale des ports et docks (FNPD)-CGT – des règles de bonne conduite afin que les dockers puissent continuer à travailler et que le trafic maritime ne s'arrête pas. Il s'agissait de maintenir uniquement les trafics essentiels et un blocage pur et simple n'était pas acceptable. Les ports ne se sont donc pas arrêtés en 2020 et, au contraire, sont repartis de plus belle. Cependant, ils ont traité le trafic restant qui était malheureusement très pauvre, surtout dans le domaine du conteneur et du roulier.

Avec le secrétariat général de la mer et le cluster maritime au sein du comité France maritime – une très bonne institution public-privé –, nous avons pu mettre en place une charte de relance des ports français. Celle-ci a été signée sous la tutelle des deux ministères, transports et mer. Nous pouvions enfin parler de souveraineté. Nous avons alors montré l'efficacité et la résilience des ports. En contrepartie, nous avons demandé à tous les donneurs d'ordre de fret d'import-export français de privilégier autant que possible les ports français afin de retrouver les parts de marché que nous n'avions jamais eues ou que nous avions perdues récemment. Cette charte a été signée avec la collaboration de la FNPD. Nous avons passé avec celle-ci des accords d'attractivité et de prévention des conflits de manière à rassurer la clientèle sur la volonté de ne plus bloquer les ports.

La dérégulation du transport maritime – surtout pour les conteneurs – dès le début de l'année 2021, a profité aux ports français. Aujourd'hui, nous avons retrouvé le niveau de 2019, voire mieux. Il nous appartient désormais de nous montrer suffisamment intelligents pour maintenir ce regain de confiance conféré par les donneurs d'ordre de fret d'import-export et surtout faire revenir le fret qui était parti dans les ports du nord ou de la Méditerranée. Nous avons montré d'une part que les ports étaient stratégiques dans la survie d'un pays qui dépend du commerce extérieur, et d'autre part, notre capacité à continuer à travailler en période de crise.

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