La mission Santé du projet de loi de finances revêt cette année une dimension particulière et inédite en raison de la terrible crise sanitaire qui frappe notre pays et des mesures d'urgence qui ont été prises.
Elle se démarque des deux textes essentiels relatifs à la santé, les lois dites « santé » et le PLFSS, puisqu'elle est exclusivement financée par le budget de l'État et non par celui de la sécurité sociale.
Son objet est triple : le financement de certains opérateurs de la prévention, l'indemnisation des victimes de l'amiante et l'AME.
Cette année, les crédits au titre de la mission Santé s'établissent à 1,32 milliard d'euros, soit une hausse de 200 millions par rapport à 2020.
Le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins rassemble 18 % des crédits de la mission. Sa dotation s'établit à 260 millions d'euros, ce qui représente une progression d'environ 60 millions, cette hausse n'étant due qu'au plan d'investissement pour l'Agence de santé de Wallis-et-Futuna. Ce poste budgétaire, largement méconnu en France métropolitaine, bénéficie cette année d'une augmentation sans précédent de ses moyens, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir compte tenu du contexte. Le rapport de l'IGAS et du CGEF d'avril 2019 faisait en effet état de difficultés particulières rencontrées par la population wallisienne et futunienne. Cette augmentation de crédits permettra de moderniser l'offre de soins et de la mettre en adéquation avec les besoins de la population tout en recherchant une plus grande efficience.
La question de la taille critique nécessaire pour permettre à l'État de disposer d'une réelle capacité de pilotage de la politique de santé publique se pose toujours car les crédits restants sur ce programme sont toujours très réduits : entre 2013 et 2017, les crédits du programme 204 ont baissé de 38,2 %.
L'année dernière, une réforme du dispositif d'indemnisation des victimes de la Dépakine demandée par ma collègue rapporteure spéciale Véronique Louwagie a été adoptée. Elle permettait notamment de réduire de trois à un mois le délai d'indemnisation des victimes par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux. Toutefois, l'application de la réforme a été retardée en raison de la crise sanitaire et il est donc difficile d'en établir un bilan complet. La trajectoire du dispositif d'indemnisation des victimes de la Dépakine demeure toujours très éloignée des objectifs initiaux.
Enfin, le programme 204 ne comporte qu'une dépense minime de 7 millions d'euros liée à la crise sanitaire et consacrée aux systèmes d'information. Il aurait été pourtant pertinent de budgéter dès à présent certaines dépenses, notamment en prévision d'éventuelles procédures judiciaires mettant en cause la responsabilité de l'État ou de ses opérateurs dans la crise sanitaire.
Les crédits du programme 183 Protection maladie s'établissent à 1,07 milliard d'euros, en hausse d'environ 140 millions par rapport à 2020. Ils financent quasi‑exclusivement l'AME, c'est-à-dire, l'accès aux soins des étrangers en situation irrégulière, et représentent 85 % des crédits de la mission.
Les dépenses restantes couvrent la participation de l'État au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), essentiellement financé par une contribution du régime général de la sécurité sociale.
L'année dernière, lors du vote du budget, le Gouvernement anticipait une stabilisation de la dépense d'AME dès 2020 grâce à une gestion plus efficiente des dispositifs et à un renforcement des contrôles de la dépense. Force est de constater qu'« à défaut d'être un échec, cela n'a pas marché », pour reprendre la formule du Président de la République. Si la stagnation du nombre de moyens et de bénéficiaires entre 2016 et 2018 pouvait plaider en ce sens, le regain de 5 % observé en 2019, puis de 4,5 % en 2020, ainsi que le dynamisme du coût moyen par bénéficiaire doivent inciter à la plus grande prudence. Surtout, l'évolution de la dépense, en hausse de 46 % entre 2011 et 2020, conduit à s'interroger sur la soutenabilité du dispositif.
Le groupe Les Républicains considère que le débat de fond concerne principalement l'efficacité de la politique migratoire du Gouvernement, l'AME n'étant que le corollaire de la gestion des flux d'entrées illégales sur le territoire.
Des propositions sont formulées depuis près de dix ans en termes de centralisation des demandes ou de renforcement des contrôles des dossiers a priori et a posteriori. Le problème de l'explosion des coûts semble donc plus s'expliquer par l'augmentation du nombre de bénéficiaires, qui usent de l'ensemble de leurs droits dans des conditions légales, que par la fraude, la surconsommation de soins n'étant pas répréhensible en tant que telle.
Nous disposons en fait de très peu de données. Par exemple, la donnée relative aux pays d'origine des bénéficiaires de l'AME n'est pas conservée par l'assurance maladie alors qu'elle permettrait d'en savoir plus sur le lien entre flux migratoires et évolution du nombre de bénéficiaires. Avez-vous envisagé qu'une étude complète soit menée sur l'ensemble des dispositifs prenant en charge des personnes en situation irrégulière ?