Intervention de Patrick Hetzel

Réunion du mercredi 25 novembre 2020 à 15h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Hetzel, rapporteur :

Je note avec intérêt, Madame Grandjean, que vous avez communiqué une information nouvelle : l'expérimentation actuellement menée connaîtrait une évolution. Cela étant, comparaison n'est pas raison : la proposition de loi offre la possibilité de sécuriser la question de l'identité tout au long du processus. Si l'on ne fait qu'ajouter une donnée biométrique à l'expérimentation en cours, cela ne changera pas fondamentalement la donne pour ce qui touche aux usurpations d'identité contre lesquelles il convient de lutter.

Madame de Vaucouleurs a posé la question, reprise par M. Isaac-Sibille puis par M. Vigier : comment cette carte Vitale biométrique va-t-elle fonctionner sur le plan opérationnel ? Les choses sont très simples : cela ne changera absolument rien pour les professionnels de santé et notamment pour les pharmaciens. Il faudra évidemment les équiper de nouveaux terminaux, qui permettront de reconnaître l'obsolescence d'une carte, mais fonctionneront exactement de la même façon que les terminaux actuels, à ceci près qu'ils seront bien plus sûrs. Ces professionnels ont donc eux-mêmes tout intérêt à aller dans ce sens, puisque cela sécurisera globalement le processus.

Madame Biémouret s'est interrogée sur les écarts d'estimation de la fraude. L'institution probablement la plus capable de donner des chiffres fiables, c'est la Cour des comptes. Qui plus est, une fraude est une fraude, il ne s'agit pas de hiérarchiser quoi que ce soit : comme l'a dit M. Brindeau, il n'y a pas la fraude du riche et la fraude du pauvre. Si nous voulons maintenir notre pacte social, nous devons en effet lutter contre les fraudes quelles qu'elles soient. Et le bénéfice n'a rien de marginal, madame Autain : j'ai d'autres chiffres à vous communiquer, qui permettront de relativiser vos propos.

Monsieur Christophe, s'agissant de la protection de la vie privée, les garanties qui seront apportées sont les mêmes que pour le passeport biométrique. Lisez à ce sujet le rapport de la sénatrice Catherine Deroche : elle a pris soin de s'assurer qu'il n'y ait pas de problème de sécurisation des données.

M. Brindeau a été rapporteur de la commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales : c'est dire s'il connaît parfaitement le sujet. Ce qui nous a frappés, au cours de nos travaux, c'est le développement de la fraude en bande organisée. Arrêtez de penser que c'est uniquement une fraude du pauvre : nous parlons bel et bien d'une fraude en bande organisée qui se fait au détriment de l'ensemble de la communauté nationale. C'est cela, le sujet ! Cette fraude devient de plus en plus massive et nous devons la combattre parce qu'elle permet à des réseaux criminels de capter facilement de la ressource au prix de risques pénaux extrêmement faibles. Ne pas intégrer cette donnée, c'est passer à côté d'un enjeu essentiel.

Madame Autain, j'aime beaucoup vos formules : une « usine à gaz liberticide », je vous laisse la responsabilité de vos propos. Non ! Nous apportons des garanties en matière de conservation des données.

Voyons de quoi il retourne. Vous avancez qu'il ne s'agit que de 11 millions d'euros. On peut considérer qu'il y a actuellement 1,8 million de cartes Vitale surnuméraires. En partant du principe que chaque personne consomme par an, en moyenne, 3 000 euros de soins et de biens médicaux, il est facile d'en déduire que la fraude potentielle est de 5,4 milliards d'euros. Vous soutenez que la fraude fiscale est plus importante, en essayant de créer une dichotomie très manichéenne. Les recettes dans le budget de l'État de l'impôt sur les sociétés sont de 30 milliards d'euros : réduire une fraude de 5,4 milliards n'est pas totalement dénué de sens.

Rappelons enfin que ces cartes Vitale sont utilisées par les réseaux pour acquérir des médicaments qui partent à l'étranger où ils sont revendus très cher. Considérez-vous, madame Autain, que le rôle de la collectivité nationale est de financer les réseaux étrangers qui commercialisent des médicaments a priori destinés aux Français ? Je vous laisse juge de vos propos.

Monsieur Perrut, concernant l'aspect financier que vous évoquez fort pertinemment, il y aurait évidemment un coût qu'il ne faut pas négliger, de l'ordre de 10 euros par carte biométrique, à rapporter à celui de 5 euros pour une carte de deuxième génération. Il convient également de prendre en compte le coût des nouveaux terminaux d'accueil. Mais, en tablant sur un déploiement raisonnable et des coûts maîtrisés, on arrive à environ 500 millions d'euros, à mettre en balance avec les 5,4 milliards d'économies potentielles. En réalité, le retour sur investissement pourrait se faire relativement rapidement.

Monsieur Ramadier, vous alliez dans le même sens ; il faut, à un moment donné, pouvoir avancer sur ce sujet.

Monsieur Isaac-Sibille, je pense vous avoir répondu en répondant à Mme de Vaucouleurs.

Monsieur Vigier, pour vous rassurer, l'idée est assez simple. Une expérimentation est en cours avec la carte Vitale dématérialisée ; nous proposons une autre expérimentation avec des cartes biométriques. À un moment donné, on tire un trait et on compare. Initialement, le Sénat avait souhaité aller vers une généralisation de la carte biométrique, avant de se ranger à l'idée d'une expérimentation pour en vérifier la pertinence. Nous restons donc dans un cadre tout à fait mesuré. En tout état de cause, l'objectif pour les finances sociales est bien de réaliser à terme une économie d'au moins 5 milliards d'euros.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.