COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 25 novembre 2020
La séance est ouverte à quinze heures cinq.
La commission examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à instituer une carte Vitale biométrique (nº 2425) (M. Patrick Hetzel, rapporteur).
Madame la présidente, mes chers collègues, le temps passe, les rapports s'empilent, mais rien n'y fait : ce gouvernement ne prend pas de mesures sérieuses pour lutter contre la fraude aux prestations sociales.
Qu'il s'agisse de la mission gouvernementale confiée à notre collègue Carole Grandjean, dont je salue la présence, et à la sénatrice Nathalie Goulet, l'année dernière, de la commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales – dont je salue le rapporteur, Pascal Brindeau – qui a récemment travaillé en notre assemblée, ou de la Cour des comptes, tous leurs rapports aboutissent à la même conclusion : il faut prendre enfin la mesure de ce phénomène et en tirer toutes les conséquences.
Il y va, d'une part, de la préservation du pacte qui fonde notre système de protection sociale, et plus particulièrement l'assurance maladie. À l'heure où de nombreux Français repoussent leurs consultations médicales et où les soignants doivent parfois arrêter une priorité entre deux patients, il est insupportable que des fraudeurs puissent passer entre les mailles du filet pour bénéficier de soins dont ils n'ont souvent pas besoin, quand ce n'est pas simplement, comme la commission d'enquête a pu clairement l'établir, pour se lancer dans du trafic de médicaments.
Il en va, d'autre part, et c'est évidemment fondamental, de la soutenabilité de nos finances sociales. Le déficit de la sécurité sociale devrait en effet dépasser cette année les 50 milliards d'euros, et celui de la branche maladie sera sans doute supérieur à 30 milliards d'euros.
Devant une telle situation, il n'est plus possible de rester passif devant une fraude aussi mal connue que potentiellement massive.
Dans la masse de la fraude aux prestations sociales, la fraude aux prestations d'assurance maladie tient une place toute particulière : selon les estimations particulièrement conservatrices menées par la Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM), les fraudes détectées se sont élevées en 2019 à près de 300 millions d'euros. Ce qui est bien loin des estimations de la Cour des comptes : selon elle, le montant total des fraudes aux prestations sociales aurait atteint au minimum 2 milliards d'euros en 2010.
Comment expliquer un tel écart ? En matière de fraude aux prestations d'assurance maladie, nous évoluons dans une véritable terra incognita, et ce malgré les nombreux rapports récents qui ont déploré cette situation.
Dans son rapport de novembre dernier, la Cour des comptes s'étonnait ainsi de ce que le ministère des solidarités et de la santé s'obstine à ne pas prescrire à la CNAM une estimation des fraudes aux prestations d'assurance maladie : rien de plus facile, pour ne pas résoudre un problème, que d'éviter de le quantifier. On ne peut pas accuser le Gouvernement de mener une politique du chiffre sur ce sujet : il n'y a ni politique, ni chiffre ! Ainsi la lettre de mission du nouveau directeur général de la CNAM ne comportait même pas le mot « fraudes ». C'est bien la preuve que l'on cherche à éviter le sujet.
La fraude aux cartes Vitale n'échappe pas à ce flou artistique généralisé. Sur ces deux dernières années, les estimations du nombre de cartes surnuméraires ont connu pas moins de cinq approximations différentes, dont deux issues de la même source, à savoir la direction de la sécurité sociale, qui varient entre 609 000 et 2,5 millions de cartes surnuméraires en circulation. Si les derniers chiffrages se resserrent autour du million de cartes en trop, cette méconnaissance ne peut qu'inquiéter quant au degré de motivation des autorités publiques actuelles à endiguer la fraude.
La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui, déposée l'année dernière au Sénat par le sénateur Philippe Mouiller, propose un chemin pour agir : expérimenter la mise en place de cartes Vitale biométriques. La France dispose en la matière d'une expertise et d'entreprises parfaitement capables de faire : elles sont d'ailleurs régulièrement sollicitées à l'étranger.
Ces cartes constituent la porte d'entrée de l'ensemble de nos concitoyens vers la prise en charge de leurs frais et du remboursement de leurs produits de santé : elles sont donc au cœur du pacte de confiance qui lie les assurés au système de santé. Or, tous les rapports l'ont établi, elles sont particulièrement exposées à la fraude.
La situation a certes été progressivement améliorée à mesure qu'ont été mis en place des dispositifs de sécurisation, comme la photo d'identité ou le portail inter-régimes visant à éviter les doublons. Mais comme le prouve le nombre de cartes surnuméraires, ces mesures sont loin d'être suffisantes pour faire face à trois types principaux de fraude aux cartes Vitale : le recours à des cartes volées ou perdues, en usurpant l'identité de leurs propriétaires, y compris pendant le délai actuel entre la déclaration de perte ou de vol et la désactivation de la carte ; l'utilisation d'une même carte pour faire le tour des prestataires de santé ou des pharmaciens et obtenir gratuitement plusieurs fois les mêmes médicaments qui seront aussitôt vendus sur un marché parallèle et souvent expédiés à l'étranger ; l'utilisation enfin d'une carte Vitale « prêtée » dans un cercle amical ou familial, entraînant potentiellement des erreurs de diagnostic ou de bonne prise en charge des prestations de santé.
Pour avancer sur la voie de l'authentification et de l'individualisation des droits, l'expérimentation de la carte Vitale biométrique par les organismes d'assurance maladie est donc, comme l'ont montré les débats au Sénat sur cette proposition de loi, tout à fait indiquée. La technologie biométrique a fait ses preuves sur notre sol depuis plus de dix ans en assurant l'identification et l'authentification des ressortissants français et étrangers, notamment, depuis 2008, par le biais du fameux passeport biométrique. Le stockage numérique des empreintes digitales offre aujourd'hui la meilleure garantie d'un versement ou d'un remboursement sécurisé des prestations d'assurance maladie. Cette expérimentation sera d'autant plus simple à mettre en œuvre que plusieurs entreprises françaises sont considérées comme des fleurons en matière de biométrie, et équipent des États étrangers de systèmes tel que celui que nous proposons.
J'observe que le Gouvernement a mis en place une autre expérimentation, celle d'une carte Vitale dématérialisée. Sans nier l'intérêt qu'elle présente, je ferai remarquer que les terminaux permettant de la lire pourraient être tout autant perdus, volés ou prêtés qu'avec les cartes Vitale actuelles, ce qui ne serait pas le cas avec une carte biométrique. Par ailleurs, cette dématérialisation suppose que les assurés disposent d'un smartphone ou d'une tablette, ce qui est loin d'être le cas de tout le monde.
S'agissant enfin des préventions relatives à la protection des données personnelles, je tiens à rassurer l'ensemble des commissaires : la carte Vitale biométrique s'inspire très largement de ce qui existe déjà pour le passeport, ce qui offre toutes garanties de sécurité. Le cadre juridique dans lequel elle s'insère permet de préserver l'ensemble des droits des assurés, tout comme leur consentement, dans le respect du règlement général de protection des données personnelles (RGPD).
Pour ce qui est du coût du dispositif, je tiens à rassurer mes collègues : c'est précisément pour cette raison que le Sénat propose de procéder à une expérimentation. À son issue, nous pourrons comparer sereinement et concrètement les mérites relatifs des cartes actuelles, des cartes dématérialisées et des cartes biométriques dans la lutte contre la fraude.
Je veux donc croire, chers collègues, que la volonté de préserver notre modèle social et nos finances publiques nous anime tous et que, partant de là, cette proposition de loi fera l'objet d'un consensus.
Légiférer en matière de fraudes revient à protéger le principe de solidarité qui sous-tend notre pacte républicain et à assurer l'efficacité de notre principe de solidarité nationale.
Loin des débats manichéens sur les catégories et sur les typologies de fraudes, il s'agit avant tout d'une question de justice sociale. Si la proposition de loi de nos collègues s'inscrit certes dans cette logique, elle propose la mise en place d'une expérimentation qui fait double emploi avec une autre, déjà en cours : c'est la raison pour laquelle le groupe La République en Marche y est opposé.
Si la biométrie constitue une piste de réflexion intéressante, elle doit être abordée en cohérence avec le partage de données, raison pour laquelle son expérimentation est déjà rattachée à celle actuellement menée sur la dématérialisation des cartes Vitale dans deux départements et qui sera prochainement étendue à dix autres. Les travaux sont donc déjà lancés, et la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a été saisie.
Grâce à l'article 47 ter nouveau du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021, la biométrie sera prochainement utilisée pour l'établissement des certificats d'existence dans le cadre du versement des pensions de retraite des bénéficiaires résidant à l'étranger ; autrement dit, c'est d'ores et déjà un outil que nous soutenons.
Pour ce qui est des cartes Vitale surnuméraires, l'enjeu est surtout de systématiser l'actualisation des données, et les débats parlementaires ont permis d'avancer sur le sujet.
Par ailleurs, si la fraude à la carte Vitale a été largement médiatisée, elle ne recouvre qu'une partie seulement des fraudes sociales. Nous progressons également sur leurs autres facettes, à travers l'adoption d'amendements visant à fluidifier les échanges de données entre organismes, à préciser la définition des fraudes et à alourdir leur sanction.
Ne nous y trompons pas : si les travaux sur la biométrie constituent l'une des clefs de la lutte contre la fraude, le cœur du débat se situe ailleurs, à savoir dans l'amélioration des échanges de données, de la transversalité et de la communication entre organismes en vue de contrôler les informations, et, ce faisant, de contrôler et de faciliter l'accès aux droits tout en assurant le versement d'une juste et équitable prestation.
La fraude aux cotisations sociales s'élève a priori entre 7 et 25 milliards d'euros, comme le précise le récent rapport de la commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales présidée par notre collègue Patrick Hetzel, rapporteur de la présente proposition de loi.
Bien que nous peinions à dénombrer les fraudeurs à la carte Vitale, leur indéniable existence porte atteinte à l'équilibre de notre pacte républicain et contribue à miner la confiance de nos concitoyens dans l'équité de notre système de santé : il s'agit autant d'un enjeu de cohésion sociale que d'un enjeu budgétaire.
Si le recours à une carte Vitale biométrique peut soulever des difficultés techniques, aucune piste ne doit être écartée dans la lutte contre la fraude sociale, d'autant que cette année, la crise de la covid-19 a historiquement aggravé le déficit de nos comptes sociaux.
Alors que le texte initial prévoyait de remplacer l'ensemble des cartes Vitale par leur version biométrique, celui adopté par le Sénat repose sur un dispositif beaucoup moins contraignant, puisqu'il se borne à mettre en place une expérimentation.
Comme le rapport l'indique, la fraude aux cartes Vitale s'inscrit dans le vaste paysage de la fraude à l'assurance maladie : elle n'est pas la plus significative au niveau financier, mais c'est la plus fréquente et celle qui porte le plus visiblement atteinte au pacte républicain qui fonde la solidarité nationale. Si les fraudes sont plurielles, le multi-usage de la même carte par plusieurs bénéficiaires de prestations d'assurance maladie n'est pas acceptable dans un contexte de tension de nos finances publiques.
Le nombre de cartes Vitale actives en circulation excède en effet de plus de 2 millions le nombre de bénéficiaires couverts par des caisses de sécurité sociale. La détention de plusieurs cartes Vitale valides permet à une personne de bénéficier indûment de prestations et alimente souvent un trafic parallèle de revente de médicaments.
Ce type de fraude s'explique en grande partie par un arsenal lacunaire de contrôle des droits : les contrôles menés par l'administration ne sont pas suffisants et les soignants considèrent que cela ne fait pas partie de leur rôle. L'adhésion des professionnels de santé, indispensable, est donc loin d'être acquise et semble particulièrement difficile à obtenir.
Face à ce constat, comme à son coût élevé, et parce que chaque euro fraudé est un euro manquant à l'assurance maladie, il est nécessaire de se mobiliser pour mettre en œuvre cette carte Vitale biométrique.
Cette proposition de loi s'inscrit dans une logique de lutte contre la fraude sociale, question qui a fait l'objet de nombreux travaux parlementaires ces dernières années, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Il y est proposé d'expérimenter la délivrance de cartes Vitale dotées d'éléments biométriques par un nombre de caisses d'assurance maladie fixé par voie réglementaire. L'objectif est de cibler la fraude à la carte Vitale et, de manière plus large, l'usurpation d'identité permettant de bénéficier de manière indue d'une prise en charge de frais de santé.
Si nous pouvons faire nôtre l'ambition de lutter contre la fraude qui pénalise les comptes sociaux, nous nous interrogeons sur le dispositif proposé.
En effet, l'introduction d'un élément biométrique au sein d'un titre ouvrant droit à des prestations sociales suppose la création d'un traitement spécifique de données dont le caractère particulièrement sensible exigera d'importantes précautions en matière de sécurité, et ce même dans le cadre d'une expérimentation. Or il ne semble pas que le dispositif réponde à cet enjeu essentiel. Par ailleurs, comment les équipements nécessaires à leur lecture seront‑ils fournis par les caisses autorisées à diffuser de telles cartes aux professionnels de santé ?
Enfin, une expérimentation de la carte Vitale électronique, dite APCB, est en cours et a, du fait de la crise, été prolongée jusqu'en 2021. L'introduction d'éléments biométriques sur la carte électronique fait en outre partie de sa feuille de route. Il semble donc opportun d'attendre son résultat, quitte à demander entre-temps un point d'étape au Gouvernement, avant de s'engager dans une autre tentative qui appellerait des coûts et des dispositifs de sécurité supplémentaires.
Pour ces raisons, et dans l'attente d'éléments concrets de la part du Gouvernement sur l'expérimentation en cours et sur ses perspectives de généralisation, le groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés n'apportera pas ses suffrages à la proposition de loi.
La proposition de loi entend, avec la carte Vitale biométrique, expérimenter un nouvel outil de lutte contre la fraude. Les débats au Sénat ont pourtant conduit à minimiser les montants imputés à la fraude sociale, et particulièrement ceux liés la fraude à la carte Vitale.
Le bilan 2018 de l'assurance maladie recense 261 millions d'euros de remboursements abusifs, soit 0,058 % du total annuel des prestations versées par la sécurité sociale, et dont la fraude à la carte Vitale, à en croire le rapport de la commission, ne représenterait qu'un montant faiblement significatif. Il n'est qu'à le rapporter à celui de la fraude fiscale, qui avoisine les 80 milliards d'euros annuels...
En revanche, les inconvénients de la mise en place d'une carte Vitale biométrique sont réels : nos collègues sénateurs ont ainsi rappelé que les données biométriques sont extrêmement sensibles et que leur stockage centralisé dans une base de données les exposera particulièrement aux risques de cybercriminalité.
Ces données changeraient également l'objet de la carte Vitale alors que le bénéfice du point de vue la lutte contre la fraude serait très marginal.
En outre, nos réflexions doivent prendre en compte le phénomène de non-recours qui entache autant notre cohésion sociale que la fraude. Si nous partageons la volonté de préserver notre modèle social, l'objectif doit être de réduire simultanément la fraude et le non-recours.
En réalité, le texte vise principalement certaines populations, essentiellement les étrangers en fin de droits.
Pour toutes ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés ne votera pas cette proposition de loi.
Cette proposition de loi adoptée par le Sénat vise à instituer une carte Vitale biométrique intégrant l'image numérisée des empreintes digitales du titulaire ; vous proposez, monsieur le rapporteur, de répondre aux fraudes à la carte Vitale en individualisant le document qui permettrait une mise à jour plus rapide.
Le 11 février dernier, la directrice de la sécurité sociale, Mme Mathilde Lignot-Leloup, avait annoncé lors de son audition un surnombre de 2,6 millions de cartes Vitale, chiffre faisant craindre une fraude sociale de grande ampleur.
Sans négliger l'importance de ce type de fraude, nous ne pouvons à ce stade de la discussion valider la réponse que vous nous proposez. La création d'une carte Vitale biométrique s'avérerait en effet extrêmement sensible en termes de protection de la vie privée et des données personnelles, les empreintes constituant, au sens du RGPD, des données sensibles. Leur traitement, pour le cas particulier de l'authentification des personnes, exige un avis de la CNIL au titre des formalités d'autorisation prévues à cette fin ; or le caractère nécessaire et proportionné au but visé du recueil et de la conservation de ces données n'est pas, en l'état, démontré.
Qui plus est, l'utilisation des empreintes – c'est-à-dire le recueil de données biométriques, leur contrôle par les professionnels de santé et l'adaptation du système de gestion des cartes Vitale – induirait d'importants coûts et délais de mise en œuvre.
Enfin, la mise en carte de cette nouvelle carte serait de nature à augmenter de façon substantielle le prix unitaire de chaque carte et, plus généralement, le coût global de leur gestion.
Une application carte Vitale sur smartphone est en cours d'expérimentation en vue de renforcer la sécurisation des usages. Ce dispositif pourrait représenter une forte valeur ajoutée dans la lutte contre la fraude : ainsi les droits pourront être mis à jour en temps réel sans s'immiscer trop loin dans des données éminemment personnelles.
L'utilisation des nouvelles technologies nécessite en effet un jeu d'équilibre entre respect de la liberté individuelle et sécurité du bien commun.
Le groupe Agir ensemble n'est donc pas favorable à la proposition de loi.
Je salue l'initiative du groupe Les Républicains. La proposition de loi adoptée au Sénat s'inscrit évidemment dans la logique des préconisations de la commission d'enquête présidée par Patrick Hetzel et dont j'ai eu la chance et l'honneur d'être le rapporter, dans la mesure où elle vise à expérimenter un outil supplémentaire dans la lutte contre la fraude sociale.
Commençons par dissiper tout malentendu : l'opposition fréquente entre la fraude fiscale des riches et une fraude sociale des pauvres, qu'il conviendrait « d'excuser », ne correspond en rien à la réalité, comme nous avons pu le constater au cours de nos investigations. Dans de nombreux cas, et cela vaut également pour les cartes Vitale, la fraude sociale est une fraude organisée s'appuyant sur une connaissance fine des mécanismes de versement de prestations sociales qu'elle détourne. Elle n'est donc pas du tout le fait de personnes vulnérables ayant du mal à boucler leurs fins de mois, mais bien de réseaux installés à l'étranger et composés d'individus qui pratiquent la multidélinquance.
Je ne serais pas aussi optimiste que notre collègue Carole Grandjean sur la volonté gouvernementale de prendre ce sujet à bras-le-corps : si certains amendements au PLFSS ont en effet été adoptés, beaucoup d'autres, qui reprenaient certaines préconisations de la commission d'enquête, ont été rejetés. Et lorsque le ministre évoque le sujet, il est toujours dans le déni de la réalité de la fraude sociale.
L'adoption de cette proposition de loi, que le groupe UDI et Indépendants soutient, sera un pas supplémentaire dans la prise de conscience des pouvoirs publics de l'urgence à traiter ce fléau.
Décidément, le groupe Les Républicains a le sens des priorités : j'ai siégé hier dans une autre commission qui étudiait une autre proposition de loi qui avait pour cible les sans-papiers bénéficiant de l'aide médicale de l'État (AME) et qui visait à leur retirer, en pleine explosion de la pauvreté, le bénéfice de la tarification préférentielle dans les transports publics.
Il s'agit cette fois-ci de mettre en place une usine à gaz totalement liberticide, et pour récupérer quoi ? Seulement 11 millions d'euros, correspondant à des fraudes très marginales puisqu'elles ne représentent que 5 % du total, au lieu de s'attaquer à des détournements bien plus substantiels. Savez-vous à combien s'élève la fraude à l'impôt sur les sociétés ? 27 milliards. L'évasion fiscale ? 80 milliards. La fraude à la cotisation sociale – pas du fait des bénéficiaires, je parle de l'autre côté : entre 6,8 et 8,4 milliards d'euros. Cela ne vous intéresse pas, j'entends bien ; mais c'est là qu'il faut viser si l'on veut récupérer des marges de manœuvre.
Or la carte Vitale sert à connaître les droits de son titulaire ou de ses ayants droit : il ne s'agit donc pas d'une carte de paiement, encore moins d'une carte d'identité. Une fois de plus, vous reprenez une mesure qui figurait, sous le numéro 71, dans le programme de l'extrême droite défendu en 2017 par Marine Le Pen.
Cette proposition de loi est par conséquent nulle et non avenue, sauf si l'on considère qu'il faut décidément préparer le terrain pour son arrivée au pouvoir.
Je salue cette initiative : si l'on veut lutter contre la fraude, il faut effectivement, monsieur Hetzel, s'en donner les moyens.
Votre proposition tend à instaurer une carte Vitale intégrant une image numérisée des empreintes digitales de son bénéficiaire : je regrette que le Gouvernement et la majorité ne la soutiennent pas, car elle sécurise tant l'utilisation de la carte Vitale que l'identité de son titulaire. Le préjudice lié à cette fraude est difficilement chiffrable, mais lorsque l'on voit que l'écart entre nombre de cartes en circulation et le nombre de personnes résident en France va de deux à cinq millions, on est en droit de se poser des questions et de vouloir y apporter réponse, à plus forte raison quand le déficit de la sécurité sociale atteint un niveau aussi abyssal. La lutte contre la fraude sociale est un enjeu essentiel.
Le ministère de la santé et la majorité souhaitent privilégier la dématérialisation, qui pourtant a montré ses limites. Comment prévenir le prêt d'une carte Vitale, en principe personnelle, aux membres de l'entourage de son titulaire, qu'il soit familial et amical, et qui alimente parfois un trafic ? Comment prévenir le tourisme pharmaceutique ? Comment procéder avec les personnes âgées, dépendantes ou fragiles qui seraient exclues du dispositif alors même qu'elles constituent les cibles prioritaires des utilisateurs de cartes volées ? Il faut donc aller plus loin.
Monsieur le rapporteur, alors que nous ne possédons pas tous une carte Vitale comportant notre photo d'identité, que pensez-vous de la généralisation de la deuxième génération pour limiter les fraudes à l'assurance maladie ? Si votre expérimentation s'avérait positive, comment généraliser la nouvelle carte biométrique, dans quelles conditions et à quel prix ? En tout état de cause, nous devons améliorer notre connaissance du sujet et vous pouvez compter sur notre soutien total.
J'ai suivi de très près toutes les auditions de la commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales, qui sont très nombreuses : l'une des mesures évoquées y a été la création et généralisation de la carte Vitale biométrique, que la proposition de loi vise à expérimenter.
La fraude à la carte Vitale est en effet une des plus fréquentes et celle qui porte le plus visiblement atteinte au pacte républicain qui fonde la solidarité nationale. À l'heure où les comptes sociaux atteignent des déficits vertigineux, il ne faut écarter aucune piste pour lutter contre la fraude sociale. Il s'agit d'un enjeu budgétaire et de cohésion sociale pour nos concitoyens.
Le Gouvernement a au mois de mai dernier mis en place le déploiement de la carte Vitale dématérialisée : ce dispositif est peu satisfaisant dans la mesure où les bénéficiaires sont simplement invités, et non contraints, à une identification biométrique. Cette expérimentation, fondée de fait sur le volontariat, ne cible donc aucunement les fraudeurs à l'encontre desquels nous voulons précisément agir. Je m'interroge donc sur le coût de déploiement de ce dispositif alors que les crédits correspondants auraient pu être consacrés à une plus large expérimentation de la carte Vitale biométrique.
Concrètement, monsieur le rapporteur, comment cela va‑t‑il se passer pour les professionnels de santé, une infirmière, un kinésithérapeute dans son cabinet ? Que devront-ils faire, combien de temps cela leur prendra-t-il, sachant que le leur est compté, combien leur en coûtera-t-il ? Au-delà de la lutte contre la fraude, j'attends des réponses pratiques.
Il y a de cela quelques années, j'ai rendu un rapport sur les fraudes fiscales et sociales : les montants en jeu n'avaient aucun rapport, madame Autain, avec celles que vous venez d'avancer. Il ne s'agit pas de pointer du doigt tel ou tel ; j'avais même suggéré que les sommes récupérées dans le cadre de la lutte contre la fraude sociale soient consacrées au financement du reste à charge et du ticket modérateur afin qu'ils n'augmentent pas. N'oublions pas qu'un rapport impitoyable a montré que l'accès aux soins a régressé entre 2012 et 2017 en raison de l'augmentation du reste à charge ; ce que je ne puis accepter, moi qui suis également professionnel de santé.
Monsieur le rapporteur, comment articulez-vous votre dispositif avec l'expérimentation en cours en vue d'éviter toute redondance ?
Ce n'est pas parce qu'on aborde une question qui gêne qu'elle est a priori mauvaise, tant s'en faut. Les fraudes à la carte Vitale, je les vis chaque semaine ; et si certains en doutent, je les invite à venir voir la réalité sur place.
Je note avec intérêt, Madame Grandjean, que vous avez communiqué une information nouvelle : l'expérimentation actuellement menée connaîtrait une évolution. Cela étant, comparaison n'est pas raison : la proposition de loi offre la possibilité de sécuriser la question de l'identité tout au long du processus. Si l'on ne fait qu'ajouter une donnée biométrique à l'expérimentation en cours, cela ne changera pas fondamentalement la donne pour ce qui touche aux usurpations d'identité contre lesquelles il convient de lutter.
Madame de Vaucouleurs a posé la question, reprise par M. Isaac-Sibille puis par M. Vigier : comment cette carte Vitale biométrique va-t-elle fonctionner sur le plan opérationnel ? Les choses sont très simples : cela ne changera absolument rien pour les professionnels de santé et notamment pour les pharmaciens. Il faudra évidemment les équiper de nouveaux terminaux, qui permettront de reconnaître l'obsolescence d'une carte, mais fonctionneront exactement de la même façon que les terminaux actuels, à ceci près qu'ils seront bien plus sûrs. Ces professionnels ont donc eux-mêmes tout intérêt à aller dans ce sens, puisque cela sécurisera globalement le processus.
Madame Biémouret s'est interrogée sur les écarts d'estimation de la fraude. L'institution probablement la plus capable de donner des chiffres fiables, c'est la Cour des comptes. Qui plus est, une fraude est une fraude, il ne s'agit pas de hiérarchiser quoi que ce soit : comme l'a dit M. Brindeau, il n'y a pas la fraude du riche et la fraude du pauvre. Si nous voulons maintenir notre pacte social, nous devons en effet lutter contre les fraudes quelles qu'elles soient. Et le bénéfice n'a rien de marginal, madame Autain : j'ai d'autres chiffres à vous communiquer, qui permettront de relativiser vos propos.
Monsieur Christophe, s'agissant de la protection de la vie privée, les garanties qui seront apportées sont les mêmes que pour le passeport biométrique. Lisez à ce sujet le rapport de la sénatrice Catherine Deroche : elle a pris soin de s'assurer qu'il n'y ait pas de problème de sécurisation des données.
M. Brindeau a été rapporteur de la commission d'enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales : c'est dire s'il connaît parfaitement le sujet. Ce qui nous a frappés, au cours de nos travaux, c'est le développement de la fraude en bande organisée. Arrêtez de penser que c'est uniquement une fraude du pauvre : nous parlons bel et bien d'une fraude en bande organisée qui se fait au détriment de l'ensemble de la communauté nationale. C'est cela, le sujet ! Cette fraude devient de plus en plus massive et nous devons la combattre parce qu'elle permet à des réseaux criminels de capter facilement de la ressource au prix de risques pénaux extrêmement faibles. Ne pas intégrer cette donnée, c'est passer à côté d'un enjeu essentiel.
Madame Autain, j'aime beaucoup vos formules : une « usine à gaz liberticide », je vous laisse la responsabilité de vos propos. Non ! Nous apportons des garanties en matière de conservation des données.
Voyons de quoi il retourne. Vous avancez qu'il ne s'agit que de 11 millions d'euros. On peut considérer qu'il y a actuellement 1,8 million de cartes Vitale surnuméraires. En partant du principe que chaque personne consomme par an, en moyenne, 3 000 euros de soins et de biens médicaux, il est facile d'en déduire que la fraude potentielle est de 5,4 milliards d'euros. Vous soutenez que la fraude fiscale est plus importante, en essayant de créer une dichotomie très manichéenne. Les recettes dans le budget de l'État de l'impôt sur les sociétés sont de 30 milliards d'euros : réduire une fraude de 5,4 milliards n'est pas totalement dénué de sens.
Rappelons enfin que ces cartes Vitale sont utilisées par les réseaux pour acquérir des médicaments qui partent à l'étranger où ils sont revendus très cher. Considérez-vous, madame Autain, que le rôle de la collectivité nationale est de financer les réseaux étrangers qui commercialisent des médicaments a priori destinés aux Français ? Je vous laisse juge de vos propos.
Monsieur Perrut, concernant l'aspect financier que vous évoquez fort pertinemment, il y aurait évidemment un coût qu'il ne faut pas négliger, de l'ordre de 10 euros par carte biométrique, à rapporter à celui de 5 euros pour une carte de deuxième génération. Il convient également de prendre en compte le coût des nouveaux terminaux d'accueil. Mais, en tablant sur un déploiement raisonnable et des coûts maîtrisés, on arrive à environ 500 millions d'euros, à mettre en balance avec les 5,4 milliards d'économies potentielles. En réalité, le retour sur investissement pourrait se faire relativement rapidement.
Monsieur Ramadier, vous alliez dans le même sens ; il faut, à un moment donné, pouvoir avancer sur ce sujet.
Monsieur Isaac-Sibille, je pense vous avoir répondu en répondant à Mme de Vaucouleurs.
Monsieur Vigier, pour vous rassurer, l'idée est assez simple. Une expérimentation est en cours avec la carte Vitale dématérialisée ; nous proposons une autre expérimentation avec des cartes biométriques. À un moment donné, on tire un trait et on compare. Initialement, le Sénat avait souhaité aller vers une généralisation de la carte biométrique, avant de se ranger à l'idée d'une expérimentation pour en vérifier la pertinence. Nous restons donc dans un cadre tout à fait mesuré. En tout état de cause, l'objectif pour les finances sociales est bien de réaliser à terme une économie d'au moins 5 milliards d'euros.
Article 1er : Expérimentation d'une carte Vitale biométrique
Cette proposition de loi ne me semble pas répondre aux enjeux. Elle apparaît problématique sinon dangereuse, car elle dessine un modèle de société inquiétant : celle du traçage numérique généralisé. Ce n'est pas dans cette société que nous souhaitons vivre. Tout le monde, moi le premier, souhaite s'attaquer à la fraude, qui est bien souvent le prétexte à détricoter les droits et à les remettre en cause. Cela étant, il y a une disproportion de moyens dans ce que vous proposez, sur le plan symbolique mais aussi financier. Vous avez cité le chiffre de 500 millions d'euros pour la mise en place du dispositif, alors que, dans le rapport d'information de la commission des affaires sociales du Sénat, le coût de la fraude documentaire est estimé entre 117 et 139 millions d'euros pour l'année 2019. Cette affaire va vous coûter plus cher au bout du compte que ce qu'elle va vous rapporter – les chiffres ont d'ailleurs été repris dans le rapport de la Cour des comptes de septembre 2020. Il y a une très grande extrapolation. Cela n'ôte rien à la nécessité de combattre ce que vous avez appelé la fraude en bande organisée. Il faut s'en donner les moyens ; mais les vôtres ne sont absolument pas les bons et sont même assez inquiétants.
Y a-t-il eu des réflexions sur la possibilité technique d'intégrer le dossier médical partagé (DMP) à la nouvelle carte Vitale biométrique ? Ce serait un progrès formidable.
Je voulais réaffirmer la volonté du groupe La République en Marche de lutter efficacement contre les fraudes aux prestations sociales. Les travaux effectués à l'Assemblée nationale et au Sénat ont fait largement avancer le sujet dans les PLFSS 2020 et 2021. L'expérimentation lancée en mai 2019, dans le Rhône et les Alpes‑Maritimes, sur plus de mille personnes, va être étendue à dix autres départements. Nous souscrivons pleinement à son extension biométrique, puisque la e-carte Vitale sera complétée par des éléments de biométrie. Le DMP y est évidemment accessible – c'est même un de ses principaux intérêts. Cette expérimentation répond à plusieurs objectifs : vérifier l'usage d'une application mobile dans le cadre de la facturation ; assurer la bonne intégration de l'e-carte Vitale dans le système actuel ; recueillir la perception de ses utilisateurs, ainsi que les indicateurs nécessaires pour éclairer une décision de généralisation. Tout cela démontre à quel point la phase expérimentale est nécessaire et combien les investissements doivent être faits de manière intelligente au regard des retours que nous aurons eus.
La commission rejette l'article 1er.
Article 1er bis : Limitation de la durée d'une carte Vitale à celle de l'ouverture des droits des assurés
La commission rejette l'article 1er bis.
Article 2 (supprimé)
La commission maintient la suppression de l'article 2.
Article 3 : Gage financier
La commission rejette l'article 3.
La commission ayant rejeté l'ensemble des articles, la proposition de loi est considérée comme rejetée.
La commission poursuit ensuite l'examen de la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (nº 3470) (Mme Stéphanie Rist, rapporteure).
Article 4er bis et 4 ter (nouveaux) : Instauration d'un cadre légal pour l'intervention individuelle de praticiens bénévoles dans les établissements publics de santé
La commission examine, en présentation commune, les amendements identiques AS250 de M. Sylvain Maillard et AS295 de Mme Annie Vidal ainsi que les amendements identiques AS251 de M. Sylvain Maillard et AS296 de M. Marc Delatte.
Lors de la crise sanitaire du printemps 2020, les établissements de santé ont bénéficié de l'aide spontanée de nombreux volontaires qui ont contribué aux activités hospitalières, à titre bénévole, et rendu de multiples services. Il apparaît essentiel de développer ce bénévolat individuel, qui est complémentaire des actions encadrées par des associations de bénévoles. Le code de la santé publique ne prévoit expressément le bénévolat au sein des établissements publics de santé que dans des cas limités et dans un cadre uniquement associatif, pour l'accompagnement des malades en fin de vie et pour apporter un soutien à toute personne accueillie dans l'établissement. Les amendements AS250 et AS295 visent ainsi à permettre le développement du bénévolat au sein des établissements publics de santé.
Mon amendement AS296 complète celui de mes collègues. En plus de mettre en lumière et de saluer l'engagement bénévole des professionnels de santé lors de la crise sanitaire, y compris celui des soignants devenus parlementaires, il vise surtout à pérenniser la possibilité de faire appel à des médecins et sages-femmes bénévoles, notamment, sans le limiter au seul cadre de l'état d'urgence sanitaire.
Vos amendements visent à fournir un cadre légal à l'intervention à titre individuel de bénévoles et de praticiens bénévoles. On ne peut qu'encourager et saluer de telles initiatives.
Avis favorable.
La commission adopte successivement ces amendements.
Article 4 quater (nouveau) : Lutte contre le cumul irrégulier d'activités par les agents des établissements publics de santé
La commission examine l'amendement AS252 de M. Sylvain Maillard.
Le fonctionnaire consacre l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. En matière de santé, le cumul d'activités irrégulier est particulièrement préjudiciable à la qualité des soins prodigués aux patients et, dès lors, à leur sécurité. Or les dispositions relatives à l'interdiction de cumul d'activités sont difficilement applicables en l'état, dans la mesure où les établissements publics de santé ne disposent pas de moyens pour contrôler les éventuels cumuls irréguliers de leurs personnels. La découverte de ces cumuls est très souvent le fruit du hasard.
Afin de rendre ces dispositions effectives, il convient d'autoriser les établissements publics de santé à demander à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de leur communiquer les données concernant l'embauche éventuelle de leurs agents par un autre employeur, par le biais de la consultation du fichier national de déclaration, en toute conformité avec la finalité du fichier, qui est de lutter contre le travail illégal.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
Après l'article 4
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, la commission rejette l'amendement AS100 de M. Thibault Bazin.
Puis elle examine les amendements AS273, AS274 et AS275 de M. Cyrille Isaac-Sibille, l'amendement AS275 faisant l'objet d'un sous-amendement AS332 de Mme Isabelle Florennes.
Mes trois amendements ont été travaillés avec la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés solidaires. Je crois beaucoup à l'importance de faire converger nos différents systèmes de santé : établissements publics, des établissements de santé privés d'intérêt collectif (ESPIC), à but non lucratif, et des établissements privés. Dans les établissements publics, les praticiens peuvent avoir une activité libérale, avec dépassement et reste à charge. Mes trois amendements visent à permettre aux praticiens des ESPIC d'exercer une activité libérale, avec un éventuel dépassement mais sans reste à charge, leur rémunération étant prise en charge par la sécurité sociale ou par la mutuelle.
Vos trois amendements portent sur un sujet auquel je suis sensible et sur lequel nous devons en effet échanger. Vous voulez autoriser les praticiens intervenant dans les établissements privés participant du service public à avoir une activité libérale, selon les mêmes règles que ce qui est autorisé pour les praticiens hospitaliers. Si cela semble légitime à première vue, il est pourtant difficile de comparer point par point les conditions d'exercice en hôpital public et en ESPIC. Une mission est actuellement conduite par l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'Inspection générale des finances (IGF) pour évaluer le différentiel de charges entre les hôpitaux et les ESPIC. Elle devrait aboutir début 2021 et nous permettra d'y voir plus clair.
Le sujet de la proposition de loi est plutôt l'attractivité de l'hôpital public. Or celui-ci est, de ce point de vue, sur la corde raide, et il ne faudrait surtout pas risquer de dégrader encore l'attractivité relative du secteur public. Nous devons débattre de votre proposition avec le Gouvernement : c'est pourquoi je vous propose de retirer vos amendements et de les redéposer en séance.
M. Isaac-Sibille soulève une question d'équité importante entre les hôpitaux publics et les ESPIC, eux aussi investis d'une mission de service public – peu importe qu'elle soit débattue aujourd'hui ou la semaine prochaine. On aurait de la peine à imaginer qu'alors que les praticiens hospitaliers ont le droit – que l'on peut contester, mais le fait est là – d'avoir une activité libérale dans l'hôpital public, selon des conditions encadrées de temps et de rémunération, leurs confrères exerçant dans des ESPIC ne puissent user du même droit, tout aussi encadré. À trop introduire de disparités, on risque d'entrer dans un jeu de concurrence malsain où, faute d'avoir une attractivité suffisante, on essaie d'empêcher le voisin de recruter des praticiens. Cela n'est pas sage. Si l'on veut favoriser l'attractivité des hôpitaux publics et des ESPIC, commençons par améliorer le sort des praticiens, leurs conditions de travail et de rémunération, dans l'ensemble des établissements et au lieu de les empêcher d'aller dans la structure voisine. Il faut avoir des règles assez comparables entre ces deux types d'établissements, d'autant qu'ils sont à ce point identiques que la plupart des usagers ne voient pas la différence et que, dans beaucoup de villes, ils fonctionnent de façon parfaitement complémentaire avec l'hôpital public.
Je partage l'avis de la rapporteure : ayons cette discussion en séance avec le ministre. J'adhère aussi aux propos tenus par Jean-Louis Touraine. Ces amendements sont très intéressants : les ESPIC contribuent aux missions de service public et permettent d'amplifier l'offre de soins dans tous les territoires. Les amendements permettent d'apporter de l'équité entre les ESPIC eux-mêmes, puisque tous n'ont pas exactement les mêmes autorisations ni les mêmes droits, et entre les ESPIC et les établissements publics. Enfin, ils posent une question fondamentale et permettent de dépasser les clivages entre le public et le privé d'intérêt collectif. À l'heure où nous avons besoin d'exercices coordonnés et de complémentarité des acteurs de soin, cela me semble essentiel.
Il faut voir de quelle manière on pourrait modifier, peut-être dans une réforme hospitalière à venir, le statut des praticiens hospitaliers en leur laissant une certaine liberté, en ménageant des passerelles entre le public et le privé, par exemple, ou en définissant des statuts contractuels, qui simplifierait grandement leur recrutement. Cela pourrait améliorer l'attractivité des établissements publics et augmenter le nombre de candidatures, dès lors que la liberté y serait plus grande ; c'est du reste ce que demande l'association des praticiens hospitaliers.
Le statut des praticiens hospitaliers date de 1984. La question du recrutement hospitalier est un vaste sujet, et il y a eu des évolutions considérables dans la pratique. Notre collègue Isaac-Sibille envisage-t-il d'accorder aux praticiens des ESPIC qui décideraient de ne pas avoir d'activité libérale, une indemnité d'engagement de service public exclusif, comme cela se pratique dans les établissements ?
Je suis très heureuse que le texte nous donne l'occasion d'avoir ce débat, qui existe depuis longtemps dans les ESPIC. Je partage l'avis de la rapporteure : il faut que nous l'ayons en séance la semaine prochaine. Mon sous-amendement AS332 vise à modifier la fin de la seconde phrase du troisième alinéa de l'amendement AS275 afin d'autoriser les établissements de santé privés à but non lucratif à conclure des contrats d'exercice libéral avec des praticiens libéraux dans le respect du dispositif de l'option pratique tarifaire maîtrisée chirurgie et obstétrique. Cette précision a son importance et évite notamment les effets de bord sur la prise en charge pour les patients.
Je remercie les collègues, qui sont a priori plutôt favorables à mes amendements. La stratégie « Ma Santé 2022 » entendait favoriser une mixité d'exercice. Je ne demande pas d'instaurer l'égalité absolue, mais seulement de faire converger les différents systèmes. Dans les établissements publics, les praticiens hospitaliers peuvent avoir des honoraires libres avec un dépassement d'honoraire non pris en charge ; je propose de limiter l'activité libérale dans les ESPIC à des dépassements pris en charge en totalité par la sécurité sociale et les mutuelles – ce qui laisse un reste à charge nul, contrairement à ce qui se fait dans l'hôpital public.
Dans la mesure où il me semble important que le ministre ait en séance l'éclairage de la commission, je maintiens mes amendements.
Monsieur Isaac-Sibille, il y a aussi des avantages dans le statut des médecins en ESPIC, puisqu'ils sont régis par la convention collective de 1951. On ne peut donc pas comparer directement les uns et les autres.
Monsieur Door, il est prévu, dans le cadre de « Ma Santé 2022 », de faire évoluer les statuts des praticiens hospitaliers afin d'améliorer l'attractivité de l'hôpital. Les ordonnances devraient arriver en mars 2021.
Je remercie M. Isaac-Sibille de maintenir ses amendements. Il est important de nous positionner en amont de l'examen dans l'hémicycle, ne serait-ce que pour montrer que la commission des affaires sociales a un avis sur ces questions hautement symboliques, qu'il soit d'ailleurs favorable ou défavorable, avant d'en débattre avec le Gouvernement.
La commission rejette successivement les amendements AS273 et AS274.
Puis elle rejette le sous-amendement AS332.
Enfin, elle rejette l'amendement AS275.
La commission examine ensuite les amendements identiques AS148 de Mme Valérie Six, AS153 de M. Stéphane Viry, AS277 de Mme Isabelle Valentin et AS285 de Mme Josiane Corneloup.
Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport pour étudier la possibilité de rétablir l'égalité de traitement entre tous les établissements de santé, publics ou privés, qui exercent des missions de service public hospitalier assorties d'obligations et de contraintes identiques. Tant qu'il n'y aura pas de revalorisation, ces établissements resteront confrontés à de lourds problèmes pour recruter et fidéliser leurs assistants et praticiens spécialistes, faute d'attractivité. L'idée est d'avancer vers cette réforme que nous appelons de nos vœux.
Je le disais tout à l'heure, la mission IGAS-IGF sur le différentiel de charges entre les hôpitaux publics et les ESPIC nous apportera les éléments de réponse dont nous avons besoin à ce sujet, début 2021. Attendons d'en connaître les conclusions et les effets de la réforme du statut de praticien hospitalier pour aborder à nouveau, si besoin, la question des praticiens des ESPIC.
Avis défavorable.
La commission rejette les amendements identiques.
CHAPITRE IV SIMPLIFICATION DE LA GOUVERNANCE DANS LES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
Article 5 : Revalorisation de la place du service et le rôle du chef de service
La commission est saisie de l'amendement AS255 de Mme Stéphanie Rist, qui fait l'objet des sous-amendements AS318 de M. Jean-Louis Touraine, AS323 de M. le rapporteur général, AS334 et AS333 de Mme Annie Chapelier, AS319 de M. Jean-Louis Touraine, AS317 de M. Didier Martin et AS335 de Mme Annie Chapelier.
Mon amendement tend à préciser l'article 5, notamment les modalités de nomination des chefs de service, qui n'étaient pas détaillées dans l'article initial. Cet article est au cœur de la proposition de loi : il permet de revaloriser le rôle du chef de service, visage humain de la gouvernance hospitalière. Ce rôle avait été minoré par la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (« HPST »), qui a renforcé, a contrario, le rôle du chef de pôle, dans une logique médico-économique. Depuis, le chef de service n'a plus d'existence au niveau de la loi. Il est temps d'y remédier. Les précisions que je vous propose d'adopter sont apparues nécessaires au cours des auditions que j'ai menées.
L'amendement permet de créer le rôle de chef de service dans un article à part et non pas dans celui consacré au chef de pôle, afin de bien distinguer les deux, ce qui répond en partie aux préoccupations exprimées par M. Door dans son amendement AS16 et Mme Chapelier dans son amendement AS186. Il est bien entendu que l'organisation en pôles reste l'organisation de droit commun, car elle a sa pertinence ; en revanche, l'article 8 permettra aux établissements de santé qui le souhaitent de déroger à cette organisation en pôles. Cela peut être très utile, notamment dans les très petits hôpitaux.
L'amendement permet encore de préciser les modalités de nomination du chef de service puisque la loi préciser ces modalités de nomination pour le chef de pôle.
Il rend enfin possible la mention du lien avec l'encadrement de proximité, ce qui répond aux préoccupations de Mme Chapelier.
Je tiens par ailleurs à répondre aux autres questions que vous avez soulevées dans vos amendements.
Concernant les budgets de service, je n'y suis pas favorable. Il est clairement ressorti des auditions qu'une grande majorité des chefs de service étaient satisfaits de l'équilibre actuel et ne souhaitaient pas avoir trop de tâches administratives. Gérer le budget au niveau du pôle semble le plus pertinent.
Pour ce qui est des conseils de service, nous y reviendrons mais nous ne souhaitons pas rigidifier l'organisation des services ; c'est d'ailleurs pour cette raison que la loi « HPST » les avait supprimés.
Mon sous-amendement AS318 tend à préciser que les personnels correspondent aux personnels médicaux autant que paramédicaux. Au-delà de l'aspect formel, il est important de rappeler que, dans le service hospitalier revalorisé que nous appelons de nos vœux, les responsabilités incombent à toute l'équipe pilotée par le chef de service, en binôme avec le cadre de santé.
L'article 5 tel qu'il est proposé de le rédiger s'inscrit dans l'objectif de revalorisation des chefs de service, notamment en définissant les services comme l'échelon de référence dans les domaines de « qualité et de sécurité des soins, d'encadrement de proximité des équipes, d'encadrement des internes et des étudiants en santé ainsi qu'en matière de qualité de vie au travail ». Mon sous‑amendement AS323 vise à y ajouter l'organisation et la pertinence des soins.
Mon sous-amendement AS334 tend tout d'abord à préciser que le chef de service travaillera en étroite collaboration avec le cadre de santé, conformément à une préconisation du rapport du Pr. Claris et à la demande, souvent exprimée durant nos auditions, de voir le chef de service et le cadre de santé former un binôme managérial équilibré et opérationnel.
Le sous-amendement AS333 précise que les services disposent d'un budget affecté, faisant écho, là encore, à une préconisation du rapport Claris : la revalorisation des services suppose de reconnaître réglementairement la fonction de chef de service, mais également de la rémunérer en tant que telle et de développer l'intéressement collectif des équipes.
Le sous-amendement AS319 tend à préciser que les services disposent d'un budget de service. La majorité des personnes auditionnées ont exprimé très fortement ce souhait, notamment lors de l'audition du professeur Olivier Claris. Il apparaît souhaitable de la concrétiser dans cette proposition de loi.
Le service étant doté d'une certaine indépendance et autonomie d'exécution, l'objectif de mon sous-amendement AS317 est de souligner le rôle-clef du chef de service dans la définition du projet managérial de l'établissement dont nous discuterons à l'article 11.
À ce propos, madame la rapporteure, la nouvelle rédaction que vous nous proposez dans votre amendement ne précise pas que le chef de service serait un praticien hospitalier. Est-ce une omission ou une volonté délibérée ? Il me paraîtrait utile de mentionner que le chef de service est un praticien hospitalier.
Les conseils de service avaient disparu au profit notamment des conseils de pôle. Si l'on veut redonner une dynamique constructive au service, il faut lui accorder les moyens nécessaires en leur affectant un budget, permettre à tous les acteurs du service de travailler ensemble, en associant les cadres de soin et rétablir les conseils de service. C'est ce que propose mon sous-amendement AS335.
Cet article 5 était très attendu depuis de nombreuses années. Je bats ma coulpe : j'avais voté en faveur de la loi « HPST » et de la création des pôles à l'époque. Nul n'est parfait... J'ai réalisé à la longue que les services étaient beaucoup plus importants que les pôles, qui peuvent rassembler des spécialités aussi diverses que la cardiologie, l'urologie, etc.
En revanche, la notion d'échelon de référence reste floue, ce qui pourrait avoir des conséquences sur les compétences, les ressources humaines, les budgets, la discipline, au sein des services dès lors qu'ils sont coupés des pôles. Si l'on ne s'intéresse plus qu'au service et non plus au pôle, il serait bon de faire disparaître ce flou juridique. La proposition de M. Martin consistant à préciser que les chefs de service sont des praticiens hospitaliers et non des administratifs va également dans ce sens.
Je salue, comme tout le monde, la réhabilitation du rôle de chef de service : c'était une avancée très attendue dans les établissements. Le service est l'échelon de référence en matière médicale, en matière de qualité et en matière de sécurité. C'est la référence médicale : c'est dans le service qu'on va, et non dans le pôle, quand on a une consultation. Cela étant, les pôles ont eux aussi un intérêt en raison de leur rôle administratif et médico-économique, ce qui soulage d'autant la tâche des services.
Concernant les budgets de service, la quasi-totalité des personnes auditionnées y étaient plutôt défavorables : cette demande était plutôt marginale. Force est de constater que les budgets de pôle permettent d'avoir une latitude plus large, notamment pour les plans d'investissement, d'un effet de masse plus importante au moment d'opérer des choix, dans le cadre évidemment d'une stratégie collective et commune. Il n'y a pas à opposer pôles et services : ils peuvent tout à fait fonctionner de manière complémentaire.
Merci pour votre question, monsieur Martin : nous préciserons d'ici à la séance que les chefs de service seront bien des praticiens hospitaliers.
Monsieur Door, la réécriture que nous proposons précise largement les missions des services.
Je rends un avis favorable aux sous-amendements AS318, AS323 et AS334. En revanche, je rends un avis défavorable aux sous-amendements AS333, AS319 et AS335.
Enfin, je suis favorable au sous-amendement AS317 de M. Didier Martin s'il accepte de le rectifier en écrivant « de management » plutôt que « managérial », en cohérence avec un amendement que je présenterai à l'article 11.
Je suis d'accord. J'en profite pour soutenir les propos de Mme Vidal qui a souligné l'importance des pôles qui jouent un rôle de pilotage et de transversalité au sein des établissements qu'ils ont aidé à se transformer. Ils représentent, à mon avis, le bon échelon de délégation de gestion fonctionnelle. Les budgets de pôle ont ma préférence plutôt que les budgets de service.
La réhabilitation de l'entité « service » était nécessaire, mais reste malheureusement très partielle : on aurait pu aller plus loin, par exemple en retenant un mode de nomination des chefs de service qui ne les fasse pas dépendre de la seule décision du directeur d'établissement.
Au cours de notre tour de France des hôpitaux, j'ai beaucoup entendu parler de l'organisation des pôles, parfois sans aucune cohérence médicale, en regroupant des disciplines sans aucun rapport les unes avec les autres : l'objectif principal, osons le dire, était de parvenir à un pilotage par les coûts, ce qui explique une bonne partie des problèmes de l'hôpital public. J'ai l'impression qu'on l'oublie un peu !
Reste ensuite cette affaire de management. Le terme est à la mode : le new public management et compagnie a envahi toute la fonction publique, y compris la fonction publique hospitalière, ce qui nous écarte des véritables enjeux du service public. Il y a là derrière toute une philosophie qui n'est pas sans poser question.
Je ne suis pas d'accord avec M. Dharréville : management et service public ne s'opposent pas, bien au contraire. Une bonne politique managériale permet d'offrir un service public de qualité et de le renforcer. Par ailleurs, en tant qu'ancienne manager, je suis favorable aux budgets affectés car ils permettent, même s'ils sont modestes et n'ont pas l'envergure d'un budget d'organisation totale, de disposer d'une certaine autonomie et de donner du sens aux décisions.
La commission adopte successivement les sous-amendements AS318, AS323, AS334 et AS317 tel qu'il vient d'être rectifié.
Elle rejette successivement les sous-amendements AS333, AS319 et AS335.
Elle adopte ensuite l'amendement AS255 sous-amendé.
En conséquence, l'article 5 est ainsi rédigé et les amendements AS16 de M. Jean‑Pierre Door, AS186 de Mme Annie Chapelier, AS244 de M. le rapporteur général, AS128 de M. Jean-Louis Touraine, AS224, AS225 et AS187 de Mme Annie Chapelier, AS17 de M. Jean‑Pierre Door, AS63 de Mme Marine Brenier et AS226 de Mme Annie Chapelier tombent.
Article 6 : Possibilité de regrouper la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques et la commission médicale d'établissement
La commission étudie l'amendement de suppression AS18 de M. Jean-Pierre Door.
L'article 6 prévoit de permettre, à titre expérimental, le regroupement de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques (CSIRMT) et de la commission médicale d'établissement. Cette proposition ne nous semble pas présenter un grand intérêt, pour des raisons de fond, du fait de leurs missions respectives, et de forme, en raison de leur composition. La CME s'intéresse, par définition, au projet médical, à de pures questions médicales, en lien ou non avec le service, quels que soient les praticiens, qui ont été élus par leurs pairs. En revanche, la commission des soins concerne davantage les paramédicaux, les infirmiers, les kinésithérapeutes, les services techniques et ses consultations pour avis portent sur l'organisation des soins. Regrouper ces deux commissions ne présenterait pas d'intérêt.
En revanche, nous pourrions organiser un dialogue, un débat, entre les représentants de ces deux commissions autour de sujets communs aux deux catégories de personnels. Ce serait plus utile que de fusionner ces deux commissions qui ne poursuivent pas les mêmes objectifs. D'où mon amendement de suppression.
Avis défavorable.
Vous souhaitez supprimer la possibilité pour les établissements qui le souhaitent de fusionner la CME et la commission des soins. Je suis pour ma part très attachée à cette disposition qui correspond à la mesure 22 du Ségur de la santé et répond aux préoccupations de nombre d'hôpitaux.
Les hôpitaux ne seront évidemment pas obligés d'y recourir, mais cette proposition peut intéresser les hôpitaux de petite taille qui voudraient rapprocher les médecins et les soignants non médecins.
Toutefois, vous avez raison, dans votre exposé des motifs, sur deux points. En effet, cette disposition fait écho à l'article 8 de la proposition de loi. Cependant, l'article 8, tel qu'il sera précisé par mon amendement AS214, prévoit qu'il s'agit d'une dérogation à l'organisation en pôles et en services. La présente dérogation est donc complémentaire et non pas concurrente.
Pourquoi ne pas préciser, dans ce cas, que l'expérimentation est volontaire ? Sans précision, elle peut être comprise comme une obligation.
Mon amendement précise que le directeur peut décider de ce regroupement, sur proposition conjointe des présidents de la CME et de la commission des soins. S'il peut en décider, c'est qu'il n'y a pas d'obligation.
Une chose me perturbe un peu : on ne parle pas beaucoup de la représentation syndicale dans votre projet de réorganisation, ni au niveau des instances, ni à celui du mécanisme de décision. Je m'inquiète de la tournure que prend la discussion : la proposition de loi ne cesse de gonfler et on ne cesse d'y mettre de la levure avec tous ces amendements et ces sous-amendements qui se surajoutent... Au bout du compte, nous aurons un texte qui ne ressemble plus du tout à la proposition initiale et je ne sais ce qu'elle mettra en œuvre du Ségur de la santé – à l'origine, c'est la promesse qui nous avait été faite. Je m'inquiète aussi de la manière dont tout cela aura été discuté avec les acteurs concernés.
C'est bien la traduction de la mesure 22 du « Ségur », telle qu'elle résulte du travail avec les représentations syndicales et des accords signés en juillet dernier. Il y a bien eu une concertation et, pour ma part, je suis ravie du travail parlementaire qui précise utilement le texte.
La commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie, en discussion commune, des amendements AS314 de la rapporteure et AS188 de Mme Annie Chapelier.
Mon amendement tire les conséquences de nos auditions en précisant qu'il s'agit bien d'un droit d'option, à savoir une dérogation, et non pas d'une expérimentation, ce qui correspond beaucoup mieux à l'esprit de l'article 6 et répond du même coup aux préoccupations exprimées dans les amendements AS40 et identiques ainsi qu'à l'amendement AS188 de Mme Chapelier. Il prévoit par ailleurs que cette fusion a lieu sur proposition conjointe du président de la CME et du président de la CSIRMT. Enfin, cette décision devra recueillir préalablement l'avis conforme de ces deux commissions, ce qui satisfera les amendements de Mme Six et de M. Isaac-Sibille, très pertinents, que j'ai souhaité prendre en compte.
Mon amendement proposait également une autre rédaction de l'article mais celui de Mme Rist est bien meilleur.
L'amendement AS188 est retiré.
La commission adopte l'amendement AS314.
En conséquence, l'article 6 est ainsi rédigé et les amendements AS45 de Mme Jeanine Dubié, AS40 de M. Bernard Perrut, AS129 de M. Jean-Louis Touraine, AS146 et AS145 de Mme Valérie Six ainsi que l'amendement AS156 de M. Cyrille Isaac-Sibille tombent.
Article 7 : Poursuite de l'intégration des groupements hospitaliers de territoire par le prisme des directions communes
La commission en vient aux amendements de suppression AS19 de M. Jean-Pierre Door, AS50 de M. Pierre Dharréville, AS60 de Mme Marine Brenier, AS101 de M. Thibault Bazin, AS147 de Mme Valérie Six et AS199 de Mme Gisèle Biémouret.
L'article 7 prévoit que tout poste de chefferie d'établissement dans un groupement hospitalier de territoire laissé vacant est systématiquement confié à l'établissement support du groupement. Autrement dit, le directeur de l'établissement socle du GHT « impose » pendant un an une direction à l'établissement secondaire en plaçant à sa tête, par exemple, un directeur adjoint de l'établissement socle. Pour nous, la décision doit venir de la base : le directeur n'étant plus là, un directeur adjoint de l'établissement secondaire doit pouvoir, avec l'accord du président de la CME et du conseil de surveillance, s'adresser à l'établissement socle pour obtenir une direction.
Il est arrivé qu'en cas de vacance de poste, il n'y ait même plus d'appel à candidature, au niveau de l'agence régionale de santé (ARS) ou du centre de gestion, pour reprendre la direction : on impose un tel, c'est comme ça, un point, c'est tout. Je l'ai moi-même vécu. Il faut savoir si la décision vient de la base ou si elle est imposée par la hiérarchie : si l'on veut éviter les conflits, on a tout intérêt, comme nous l'avons vu à l'article 4, à partir de l'hôpital secondaire et à remonter jusqu'au GHT et à éviter que la décision ne soit pas imposée d'en haut. D'où mon amendement de suppression.
Mon amendement a le même objet. J'ai déjà expliqué au cours de la discussion générale ce que je pensais cet article : en confiant systématiquement à l'établissement support du GHT la direction de tout établissement trouvant en situation de vacance de poste de son chef d'établissement, on ne fera qu'accélérer le mécanisme d'intégration que vous souhaitez : à terme, il n'y aura plus d'établissements mais simplement des antennes. Cette situation n'est pas sans poser problème ; je peux d'ailleurs le constater dans mon propre territoire où un de nos hôpitaux est membre d'un GHT. Il serait bon qu'il conserve une direction spécifique plutôt que d'être géré depuis l'établissement socle.
Je compléterai les propos de M. Dharréville car j'ai été confrontée à la même situation. L'article 7 prévoit de confier systématiquement à l'établissement support du GHT la direction commune de tout établissement partie de son GHT se trouvant en situation de vacance de poste.
La direction du centre hospitalier de Roubaix, qui compte treize établissements, 3 000 salariés dont 230 médecins, a été laissée vacante durant plusieurs mois ; c'est le directeur du centre hospitalier de Tourcoing, la ville voisine, qui a assuré l'intérim. Je n'ose imaginer les conséquences pour la gestion du centre hospitalier de Roubaix si, en application de cet article 7, la direction en avait été confiée au directeur de l'établissement support du GHT Lille Métropole Flandre Intérieure, le centre hospitalier régional universitaire de Lille, qui gère pas moins de 16 000 professionnels, 3 222 lits et 2 920 étudiants...
L'existence de certains hôpitaux tient à un combat permanent des soignants, médecins, personnels administratifs. Si l'échelon du directeur qui est, en quelque sorte, leur porte-parole, celui qui défend l'établissement, disparaît, j'ai tout lieu de craindre, pour l'avoir vu, que l'établissement ne périclite, que certaines décisions ne soient prises à son détriment par le directeur de l'établissement support du GHT. La vie d'un établissement passe aussi par la présence d'un directeur qui le soutient et fait remonter les demandes et les besoins.
Si ces amendements de suppression étaient adoptés, ils m'empêcheraient de vous proposer une réécriture de cet article qui répondrait à vos légitimes inquiétudes et interrogations, également exprimées lors des auditions. Les rapports de l'IGAS et de la Cour des comptes ont démontré, faits à l'appui, que plus on avançait dans l'intégration des GHT, plus on améliorait l'offre de soins. J'ai bien compris que le caractère systématique de l'attribution de ce poste pouvait avoir un côté dérangeant, d'autant plus que les GHT sont assez hétérogènes. La réécriture que je vous vais vous soumettre devrait être de nature à vous rassurer.
Tout d'abord, au vu de la taille de l'établissement ou pour toute autre raison, le directeur général de l'ARS pourra considérer qu'une direction commune n'a pas de sens. Dans les cas que vous avez cités, où l'établissement concerné est de grande taille, la nouvelle rédaction de l'article apportera toute assurance à cet égard.
Vous craignez que l'établissement ne soit happé par l'établissement support. Là encore, la nouvelle rédaction est à même d'apaiser vos inquiétudes en prévoyant que, dans une situation de vacance, le poste soit d'abord confié à l'établissement support pendant une durée transitoire d'un an seulement. Le directeur général de l'ARS pourra ensuite décider de prolonger cet intérim en une direction commune, après avis du comité stratégique du GHT, du comité des élus locaux du GHT et du conseil de surveillance de l'établissement partie.
Ces garde-fous permettent de vous donner le sens politique de cette mesure. Ils permettent d'avancer dans l'intégration des GHT car les faits montrent que l'offre de soins peut en être améliorée lorsque le système fonctionne bien ; mais si ce n'est pas le cas, il faut pouvoir lancer un appel à candidature pour mettre fin à l'intérim confié au directeur de l'établissement support.
Il serait intéressant de pouvoir débattre de cette réécriture ; aussi serai-je défavorable à ces amendements de suppression.
Je voudrais vous faire deux propositions. Premièrement, il ne faut pas que l'appel au directeur de l'établissement support pour assurer la direction en intérim de l'établissement partie du GHT soit automatique.
Deuxièmement, il ne faut pas supprimer l'appel à candidature durant l'année de l'intérim ; sinon, au bout d'un certain temps, plus personne ne se portera candidat... L'appel à candidature émane du conseil de surveillance et de la direction qui s'adressent à l'ARS : celle‑ci peut fort bien répondre que l'existence d'une direction par intérim rend inutile l'appel à candidature. C'est ainsi que l'on s'acheminera, lentement mais sûrement, vers une candidature unique de l'établissement socle. De nombreux hôpitaux de proximité et hôpitaux secondaires sont opposés à cette automatisation de l'intérim confié au directeur de l'établissement support.
Madame la rapporteure, vous nous demandez de ne pas supprimer l'article 7 car vous allez le réécrire. Vous supposez que la rédaction que vous nous proposerez nous conviendra ; or, même ainsi réécrit, cet article n'est toujours pas acceptable. Il va à rebours de l'attention que nous devons porter aux territoires.
Vous dites que le directeur général de l'ARS pourra reconsidérer les choses ; mais dans une région de taille XXL comme le Grand-Est, qui regroupe la Lorraine, l'Alsace et la Champagne-Ardenne, on en est au troisième directeur général de l'ARS en six mois. Dans de telles conditions, la vision à long terme et la connaissance des territoires ne sont pas forcément au rendez-vous !
L'établissement support pourra assurer l'intérim pendant un an, dites-vous, mais on sait bien comment les choses se passent. Certes, l'avis du conseil de surveillance sera sollicité, mais les avis consultatifs, on peut en faire ce que l'on veut : il faut que le conseil de surveillance, le comité stratégique et le comité territorial des élus locaux décident. Pourquoi avez-vous peur de ce qu'ils diront ? Ils pourraient très bien estimer, après avoir écouté quelques explications, que cet intérim est dans leur intérêt et qu'il crée des synergies.
En réalité, vous partez d'un postulat automatique et systématique, qui vaudrait tout le territoire : toute intégration aboutira à un meilleur fonctionnement. Pas forcément ! Cela dépend vraiment des personnes. Je peux vous parler de cas très concrets : s'il y avait eu une direction commune pendant la crise sanitaire, la maternité de Lunéville, par exemple, aurait fermé. Certains établissements ont mis en commun leurs structures d'achat, mais leur approvisionnement est aujourd'hui plus long et coûte plus cher : les synergies ne sont pas toujours au rendez-vous. Il faut procéder à des évaluations : dans certains endroits, cela marche très bien, et tant mieux, mais pas dans d'autres, pour des raisons qu'il faut accepter. Il ne faut pas brusquer, comme vous voulez le faire, les élus locaux ; il faut leur faire confiance. Ce qui compte pour ceux, c'est la santé de leur territoire, et ce sont eux les mieux placés pour exprimer des avis.
J'entends les arguments des uns et des autres ; nous souhaitons tous ici saluer la qualité de notre système de santé, l'investissement des professionnels, mais aussi conduire les transformations nécessaires. Au-delà des enjeux financiers déjà évoqués, nous devons travailler collectivement à une meilleure organisation de notre système de santé.
Les GHT sont évidemment une pierre de plus à l'édifice de l'amélioration de l'offre de soins. En Lorraine, celui qui s'est organisé autour du centre hospitalier régional universitaire de Nancy a fait ses preuves, notamment dans un contexte de vacance de postes. La constitution de ces groupements est donc utile : elle se fait dans l'intérêt de nos concitoyens et permet de préserver l'offre de soins sur l'ensemble des territoires, y compris aux endroits où la présence d'un hôpital peut être reconsidérée. Les GHT doivent permettre aux établissements menacés de mieux organiser les spécialités qu'ils vont conserver ainsi que leur offre de soins de suite.
Il faut bien lire l'article 7 tel que proposé pas notre rapporteure : il y est question d'intérim, non d'intégration systématique ou de mise sous tutelle.
Je sais que cela peut angoisser certains d'entre vous, mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Préférez-vous un système sans chef ou avec un chef intérimaire ? Je vous pose la question, chers collègues de l'opposition.
Si vous défendez l'intérim, c'est que vous savez qu'une vacance de poste peut être l'occasion de porter un autre regard sur le fonctionnement d'un établissement. Il est toujours intéressant d'avoir une analyse un peu nouvelle sur un établissement qui a son histoire et qui doit lui aussi évoluer.
J'ai posé la question à des personnes que je connais et qui jouent un rôle de direction dans les hôpitaux. Pour prendre l'exemple de ma ville, la directrice générale du centre hospitalier universitaire (CHU) de Dijon...
N'ayez pas peur des CHU, monsieur Bazin, vous en aurez peut‑être besoin un jour !
La directrice générale du CHU de Dijon, disais-je, m'a dit avoir déjà assuré, au cours d'une carrière qui n'est pas excessivement longue, treize intérims. Elle ne ressemble vraiment pas à un dictateur : elle est restée dans son rôle de haut fonctionnaire et a travaillé dans l'intérêt général. N'ayons pas peur de l'intérim : voyons-y plutôt une chance et une façon de manifester notre solidarité vis-à-vis des établissements qui connaissent des vacances de postes.
L'intérim existe depuis longtemps. Dans mon département, par exemple, lorsqu'il y avait une vacance de poste, un intérim était assuré par le directeur de l'hôpital d'Auch. Mais en recentralisant, vous êtes en train de changer insidieusement la loi de 2016 de modernisation de notre système de santé, qui a créé les GHT. Ceux-ci n'ont fait l'objet d'aucune évaluation parlementaire. Les études de l'IGAS et de la Cour des comptes se sont limitées aux seuls aspects financiers : peut-être les GHT ont-ils permis de réaliser des économies, mais aucune évaluation n'a montré ce qu'ils ont apporté aux malades, aux usagers de l'hôpital et des services de santé.
Lorsqu'un hôpital est dirigé par un directeur par intérim qui s'y rend une fois par semaine, quel interlocuteur avons-nous ? Il n'y a pas que des CHU. Pendant dix ans, j'ai présidé le conseil de surveillance de l'hôpital de Condom : nous avons dû nous battre pour garder un poste de directeur, que nous avons finalement obtenu et qui nous a permis de rénover l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) dépendant de l'hôpital. Si nous n'avions pas eu de directeur, je ne sais pas comment nous aurions fait – les choses se seraient peut-être faites, ou pas. La présence d'un directeur est importante pour tout le monde, y compris pour la paix sociale de l'établissement.
J'irai dans le même sens que Gisèle Biémouret. Depuis un mois et demi, un établissement de ma circonscription a un directeur par intérim. Celui-ci est très compétent mais le personnel, dans sa diversité, a besoin d'un véritable directeur d'établissement, en particulier dans cette période difficile. L'intérim doit durer le moins longtemps possible pour que l'établissement puisse se projeter dans l'avenir et que le personnel puisse avoir des relations stabilisées. Or vous organisez l'inverse : vous rendez même la direction invisible. S'il s'agit de confier systématiquement la direction des hôpitaux à des établissements supports gigantesques – le territoire de certains GHT couvre un nombre très important d'établissements hospitaliers –, cela ne peut pas marcher. Vous dites qu'il faut faire confiance aux acteurs, mais avec ce type de mesures, je ne suis pas sûr que vous preniez cette direction.
Je voudrais porter une parole un peu rassurante. Vous donnez le sentiment que cette direction commune empêche de tourner en rond, mais je vais vous donner l'exemple d'un centre hospitalier de ma circonscription, dans une commune de 7 500 habitants, qui abrite des services de gériatrie, de soins de suite et de réadaptation, plus un EHPAD. Après un certain temps sans directeur, une direction commune avec le CHU, établissement support situé à 50 minutes de là, a finalement été mise en place. Force est de constater que tout fonctionne bien et qu'une dynamique est désormais à l'œuvre dans l'établissement.
Ce qui est vrai dans un territoire ne l'est pas forcément dans un autre, mais je crois beaucoup à la vertu de cet intérim. Ce qui empêche les directions communes, c'est souvent une certaine frilosité, une habitude de travailler en silos, un manque de connaissance des uns et des autres ; une direction commune peut permettre à des gens qui ne l'auraient pas fait dans d'autres conditions de se mettre autour d'une table, de discuter, d'apprendre à se connaître et à monter des projets ensemble. Vous y voyez un outil dirigé contre les territoires et les élus, alors qu'il s'agit au contraire d'un outil au service d'une offre de soins dynamique.
Enfin, Mme Biémouret a déploré le manque d'évaluation des GHT ; la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) va lancer prochainement une évaluation, qui sera menée par M. Dharréville et Mme Dufeu, et dont nous attendrons les conclusions avec une grande impatience.
L'article 7 pose une vraie bonne question concernant la vie et l'évolution des GHT. Comme nous avons pu le constater lors des auditions, la rédaction initiale de l'article, qui prévoit une solution automatique, n'était pas sans poser problème, mais la réécriture proposée par notre rapporteure, qui offre une solution passant par un intérim et la consultation des différents acteurs, nous permet d'avancer de façon plus efficace et de mieux répondre aux attentes des acteurs de terrain. Je vous invite donc à ne pas voter la suppression de l'article, afin que nous puissions examiner les autres amendements qui s'y rapportent, en particulier l'amendement de réécriture globale de notre rapporteure.
Je n'imagine pas qu'un établissement n'ait pas un directeur dédié. Nous vous avons expliqué les problèmes concrets que nous rencontrons dans nos territoires. Je vous ai donné l'exemple du CHR de ma circonscription, dont la direction a été pendant longtemps assurée par intérim. Depuis cinq ans, le directeur de l'ARS a changé quatre fois : croyez-vous qu'il était à même de pourvoir au recrutement interne du directeur de notre CHR ? C'est impensable !
Je regrette l'allusion de M. Martin à propos des CHU ; à mon sens, ils ne sont pas concernés par la proposition de loi, dont l'objet est de restaurer la confiance des patients et de simplifier notre système de santé, par essence territoriale, départemental. La France en compte une trentaine de ces grosses usines : nous en avons besoin, mais les CHU sont loin des territoires et n'intéressent pas les habitants de nos régions.
Les établissements qui nous intéressent ici sont les hôpitaux de proximité, les hôpitaux secondaires situés dans l'orbite des GHT. Ils ont besoin d'une direction, mais pas d'une direction d'en haut, lointaine, d'une direction des ARS ou du ministère de la santé. Ils ont besoin de proximité, comme le demandent les élus locaux. Nous en parlerons lors de l'examen du projet de loi « 3D ». Il faut que les élus locaux, les conseillers départementaux, les conseils régionaux, se battent pour avoir des hôpitaux de proximité. Je ne dis pas qu'il faut ouvrir des hôpitaux dans les petites communes, mais qu'il faut maintenir en tout cas les hôpitaux existants et leur donner une direction.
Pourquoi rendre automatique la nomination d'une direction intérimaire située à l'échelon supérieur ? Tout cela peut se faire à l'échelon local. Par exemple, un directeur adjoint déjà en place peut assurer l'intérim en attendant la nomination d'un nouveau directeur. Quand ce n'est pas possible, on peut s'adresser à l'hôpital support du GHT, si l'on entretient avec lui de bons rapports – ce qui n'est pas le cas partout. Les problèmes de direction sont des problèmes humains, et il peut y avoir des situations conflictuelles. Évitons les conflits. !
J'ai proposé à Mme la rapporteure de supprimer le caractère automatique de l'appel à l'échelon supérieur. Dans la période d'intérim, les conseils de surveillance doivent pouvoir lancer un appel à candidatures pour le poste de direction. Sinon, au bout d'un an, on ne fait plus d'appel, on se dit que ça va comme ça, et on continue. C'est ainsi que l'on voit disparaître les bureaux de poste, les trésoreries municipales, les palais de justice !
J'entends ce que vous dites, monsieur Door, mais, à titre personnel, je suis très fière du CHU de Dijon, de ses très beaux plateaux techniques et de ses grandes compétences !
Lors des auditions, nous nous sommes aperçus que cet article 7 pourrait prêter à discussion. Je parlerai du fond lorsque Mme la rapporteure nous proposera une nouvelle écriture de l'article. Le groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés ne votera pas ces amendements de suppression, mais compte bien faire évoluer la rédaction de l'article afin d'éclaircir différents points.
Monsieur Door, il faut absolument maintenir nos hôpitaux de proximité, dites-vous, mais dans le GHT que nous connaissons tous les deux, s'il n'y avait pas eu de direction commune, une maternité aurait fermé. Vous demandez que l'intérim ne soit pas automatiquement confié à l'établissement support ; mais après avoir échangé sur ce sujet, nous avons précisé que le directeur général de l'ARS pouvait décider de ne pas rendre cet intérim automatique. Vous dites que l'on doit continuer à lancer des appels à candidatures, mais si une candidature arrive alors que l'intérim se passe bien et qu'une nouvelle offre de soins est créée dans l'hôpital de proximité, que faudra-t-il faire ? Tout annuler et revenir en arrière ? Parce que nous avons été à votre écoute, des mesures allant dans votre sens ont été ajoutées dans la nouvelle rédaction de l'article.
Vous dites que les directeurs d'établissement ne souhaitent pas ces directions communes. Certes, j'ai entendu les craintes des représentants du Syndicat des managers publics de santé, notamment à propos de leur évolution de carrière, puisqu'il s'agit d'emplois fonctionnels. Mais rien n'empêche de maintenir, dans l'établissement de proximité, un de ses directeurs adjoints sur un emploi fonctionnel – c'est d'ailleurs ce qui s'est passé dans la direction commune que nous avons sur notre territoire, monsieur Door, car il faut évidemment qu'un directeur adjoint soit présent en permanence dans l'établissement pour échanger avec les équipes.
Vous dites que les élus locaux doivent être investis sur ce sujet. Je suis d'accord avec vous : c'est la raison pour laquelle nous avons ajouté, en plus de l'avis du conseil de surveillance de l'établissement concerné, l'avis des élus du GHT.
Madame Biémouret, je ne comprends pas vos craintes. La création des GHT, que vous avez proposée en 2016, avait pour but de garantir à tous les patients d'un territoire un égal accès aux soins aux plus gros établissements, où qu'ils résident sur le territoire, en posant le principe d'une prise en charge graduée. Vous avez vous-même voté ce principe en 2016 ; vous me dites maintenant qu'il ne faut surtout pas avancer dans cette direction... Le seul intérêt de l'article 7 est d'accroître encore l'intégration des GHT, pour une meilleure prise en charge des patients dans les territoires.
Vous soutenez qu'il n'y a plus de directeur sur place. Mais si ! Dans les directions communes mises en place dans les groupements hospitaliers les plus intégrés, qui fonctionnent bien, il y a dans chaque établissement un directeur adjoint et un directeur des affaires médicales ou des soins. Rien n'empêche de déployer des directeurs dans les territoires. À mon sens, il ne faut pas supprimer l'outil qu'est le GHT, mais modifier notre façon de l'utiliser. Nous devons tous œuvrer au bon fonctionnement de ces GHT : nous savons qu'ils créent de l'offre de soins.
Monsieur Dharréville, quand on nomme un directeur par intérim pour aller vers une direction commune, c'est pour donner aux équipes une vision commune et mettre fin à une compétition entre les établissements, dont les plus faibles se sortent moins bien que les plus forts. Les différents rapports sur ce sujet – celui de l'IGAS n'est pas qu'un rapport comptable – montrent bien que la prise en charge des patients et l'offre de soins sont meilleures dans les groupements qui fonctionnent bien. En tant qu'élus, nous devrions travailler à un meilleur fonctionnement de cet outil plutôt que de rester en retrait ou de revenir en arrière.
La commission rejette les amendements de suppression.
Elle examine ensuite, en discussion commune, l'amendement AS316 de la rapporteure, qui fait l'objet des sous-amendements AS338 de M. Paul Christophe, AS324 de M. Didier Martin, AS326 de M. Cyrille Isaac-Sibille, des sous-amendements identiques AS322 de M. Paul Christophe et AS325 de M. Cyrille Isaac-Sibille ainsi que du sous‑amendement AS327 de M. Philippe Vigier, et l'amendement AS189 de M. Paul Christophe.
Je me suis un peu étendue dans mes commentaires, mais je tiens beaucoup aux GHT...
Du coup, j'ai défendu par avance mon amendement, qui vise à réécrire l'ensemble de l'article 7.
C'est avec beaucoup de prudence que j'aborde ce sujet. La rédaction initiale de l'article 7 n'était pas de nature à me satisfaire, au regard notamment du rapport de l'IGAS qui parlait de fusions, et même de fusions-absorptions.
Mme la rapporteure a évoqué les craintes des directeurs. Permettez-moi d'y ajouter les craintes des agents et des syndicats qui les représentent, dans la perspective de ces éventuelles fusions.
La nouvelle rédaction proposée va dans le bon sens ; cela dit, nous souhaitons y apporter quelques modifications : ainsi, mon sous-amendement AS338 vise à consacrer le caractère temporaire de l'intérim confié au directeur de l'établissement support. D'autres amendements, que je présenterai un peu plus loin, tendront à préciser le caractère des avis sollicités et la durée de l'intérim.
Le sous-amendement AS324 vise à ajouter le mot « motivée » après le mot « opposition ». Nous souhaitons que le directeur général de l'ARS motive son opposition à l'intérim proposé et que celle-ci fasse l'objet d'un débat, y compris avec les élus locaux.
À l'évidence, deux visions s'opposent.
Mme la rapporteure souhaite clairement aller vers davantage d'intégration des établissements au sein d'un GHT : elle imagine un directeur général, qui serait le directeur de l'établissement support, et des postes fonctionnels de directeur dans chaque établissement. Cette vision peut se défendre : aux termes de l'amendement relatif aux créations de postes qu'elle a défendu à l'article 4, c'est d'ailleurs le directeur de l'établissement support qui gère les ressources humaines du GHT.
Face à cette vision intégrée, la crise nous pousse à en adopter plutôt une autre, une vision de proximité dans laquelle les groupements de coopération sanitaire (GCS) doivent permettre de faire travailler ensemble les hôpitaux publics, les ESPIC et les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), dans un bassin de vie à taille humaine pouvant regrouper jusqu'à 150 000 habitants. C'est cette vision que l'on retrouvait dans « Ma Santé 2022 », celle d'un hôpital de proximité, où tout le monde se retrouve au sein du bassin de vie pour proposer une meilleure offre de soins.
Mon sous-amendement AS326 vise à définir la notion de vacance. Dans votre esprit, dès lors que le directeur d'un établissement part, son poste est déclaré vacant et le directeur de l'établissement support le récupère automatiquement. On voit bien que vous allez vers l'intégration. De deux choses l'une : si tout se passe bien, il n'y a aucun problème pour recruter un nouveau directeur ; mais dans le cas contraire, des discussions sont nécessaires. Il vaut mieux convaincre que contraindre : cela demande du travail et du temps.
Le sous-amendement AS322 vise à faire des avis des conseils de surveillance et des conseils d'administration du GHT et de l'établissement concerné des avis conformes et non plus seulement consultatifs. Avec un avis simple, la décision reviendrait de fait au directeur de l'ARS. Notre sous-amendement ne témoigne d'aucune défiance envers les directeurs d'ARS, mais il faut bien dire que dans ma région des Hauts‑de‑France, l'agence est bien éloignée des territoires. Nous voulons préserver le lien de confiance avec les territoires ; la procédure de l'avis conforme en est un préalable.
Il vaut mieux convaincre que contraindre, disais-je, et cela demande du travail. Notre sous-amendement AS325 tend également à rendre les avis conformes, car l'accord du comité territorial des élus locaux et du conseil de surveillance nous paraît nécessaire. Si prend le temps de convaincre tout le monde en amont, les choses se passent bien, mais si l'on contraint les acteurs, elles se passent mal.
Quant au sous-amendement AS327, il vise à empêcher que l'article 7 n'entraîne des fusions d'établissements.
Mon amendement AS189, que j'avais déposé avant que Mme la rapporteure n'ait déposé le sien, vise à souligner le caractère temporaire de l'intérim. Nous étions plutôt partis pour six mois. Après tout, si toutes les parties prenantes sont d'accord pour fusionner, pourquoi attendre un an ? Et si elles sont toutes d'accord pour ne pas fusionner, pourquoi attendre ce même délai ? Cela nuirait à la bonne conduite de l'établissement.
Je suis favorable au sous-amendement AS324 de M. Martin, qui précise que l'opposition du directeur de l'ARS doit être motivée.
Le sous-amendement AS326 de M. Isaac-Sibille renvoie à des discussions que nous avons souvent eues. Il vise à faire commencer l'intérim après deux tours de recrutement ; or c'est déjà ainsi que cela se passe : accepter ce sous-amendement reviendrait à maintenir la situation actuelle et l'article 7 n'aurait plus aucun sens ; j'en demande donc le retrait. Pour ma part, je propose d'avancer vers l'intégration des GHT, car nous savons que c'est ce qui marche et ce qui crée de l'offre de soins.
L'amendement AS189 de M. Paul Christophe est satisfait par ma réécriture de l'article 7, qui plafonne à un an maximum la durée de l'intérim – il pourrait donc ne pas dépasser six mois. J'en demande donc le retrait.
Les sous-amendements identiques AS322 et AS325 tendent à exiger un avis conforme. Pour avoir siégé dans les instances concernées – comité stratégique, comité territorial des élus locaux, conseil de surveillance –, je sais qu'un avis conforme bloquerait le système. Là encore, l'adoption de ces sous-amendements aurait donc le même effet qu'une suppression de l'article 7, dans la mesure où elle bloquerait les avancées vers l'intégration des GHT. Je précise que le comité stratégique est constitué du président du GHT, des directeurs médicaux et de l'ensemble des directeurs des établissements. Alors que nous avons besoin de renforcer les décisions médicales et administratives, le simple fait de demander un avis conforme au comité stratégique bloquerait le système et empêcherait de mettre en avant le projet médical. Avis défavorable, donc.
Malheureusement, votre réponse est assez édifiante : elle témoigne d'une défiance vis-à-vis de la responsabilité des uns et des autres. Je ne vois pas en quoi l'avis conforme constituerait un blocage : il montrerait au contraire l'adhésion du territoire au groupement hospitalier. Vous inversez le problème et j'en suis assez contrarié. Vous savez ce que cela signifie quant à mon vote sur cette proposition de loi.
La commission rejette le sous-amendement AS338.
Elle adopte ensuite le sous-amendement AS324.
Puis elle rejette successivement le sous-amendement AS326, les sous-amendements AS322 et AS325 ainsi que le sous-amendement AS327.
Enfin, elle adopte l'amendement AS316 sous-amendé.
En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé et les amendements AS39 de M. Bernard Perrut, AS257 de M. Jean-Louis Touraine, AS70 de Mme Jeanine Dubié, AS59 de Mme Marine Brenier, AS158 de M. Cyrille Isaac-Sibille, AS69 de Mme Jeanine Dubié, AS245 du rapporteur général, AS196 de Mme Gisèle Biémouret, AS190 de M. Paul Christophe, AS304 de Mme Gisèle Biémouret, AS35 de M. Guillaume Chiche, AS58 de Mme Marine Brenier, AS71 de Mme Jeanine Dubié, AS102 de M. Thibault Bazin, AS159 de Mme Justine Benin, AS157 de M. Cyrille Isaac-Sibille et AS208 de M. Philippe Vigier tombent.
Après l'article 7
La commission est saisie de l'amendement AS270 de M. Jean-Louis Touraine.
Cet amendement vise un double objectif : simplifier les démarches et améliorer l'intégration des GHT en pérennisant certaines dérogations au droit des autorisations afin que ceux-ci puissent se voir accorder une autorisation d'activité de soins et d'équipements matériels lourds, dont on sait le caractère stratégique pour la structuration de l'offre publique dans les territoires. Plutôt que de créer un nouveau système, nous proposons de permettre à des groupements d'établissements de santé d'assurer ensemble l'exploitation d'une autorisation unique sur un territoire. Le dossier d'autorisation serait déposé auprès de l'ARS, après avis conforme du comité stratégique du GHT, pour les activités traitées dans le projet médico-soignant partagé de ce dernier.
Enfin, je propose que l'établissement support puisse porter des autorisations pour le compte d'établissements parties au GHT. L'établissement support serait ainsi autorisé à exercer cette fonction pour tout ou partie des établissements qui contribuent au GHT, et sur tout ou partie des activités soumises à autorisation.
Au vu des débats que nous venons d'avoir, et même si je peux vous rejoindre sur le fond, il semble prématuré de gérer les autorisations au niveau des GHT. Par ailleurs, des expérimentations peuvent déjà permettre de déroger au droit des autorisations. Enfin, une réforme très importante du droit des autorisations est en cours. Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement AS116 de Mme Martine Wonner.
. Cet amendement, nul ne s'en étonnera, porte sur la santé mentale, tant il me semble important d'assurer une véritable dynamique, au sein des territoires de santé, entre la psychiatrie et les autres activités de soins. Jusqu'à présent, des dérogations à l'inclusion des établissements publics de santé mentale dans les GHT étaient prévues. Il convient de mettre un terme à cette possibilité.
Je considère également qu'il faut renoncer à ces dérogations. Toutefois, nos auditions ont confirmé ce qu'indique la Cour des comptes dans son rapport : ces dérogations disparaîtront sans heurts, avec l'accord des professionnels de terrain, d'ici à 2022. Il semble donc inutile d'inscrire dans la loi la disposition proposée. Demande de retrait ou avis défavorable.
. La psychiatrie a toujours été un domaine rebelle ! Il faut parfois insister un peu pour encourager les acteurs de la santé mentale à rejoindre les GHT. À l'heure actuelle, vous savez comme moi qu'ils freinent avec force, madame la rapporteure. Je prends note de votre réponse et maintiens l'amendement, car il importe de leur adresser un message fort.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS130 de M. Jean-Louis Touraine.
. Il vise un objectif partagé par Mme la rapporteure. Pour renforcer les GHT, il est nécessaire que les établissements publics disposent des outils permettant la simplification et l'adaptation des dispositifs de pilotage à la gestion territorialisée. La crise sanitaire a clairement démontré à quel point les GHT peuvent et doivent être consolidés, car ils sont pertinents et efficaces. Il s'agit d'approfondir la coopération en leur sein, dans le cadre d'une stratégie de groupe public intégré, en leur permettant de se doter de la personnalité morale. Tel est l'objet du présent amendement.
Dans son rapport annuel sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, publié le mois dernier, la Cour des comptes consacre un chapitre au déploiement des GHT. Les magistrats ont constaté que l'absence de personnalité juridique était lourde de conséquences. Je les cite : « Il s'agit d'un compromis juridique trouvé en 2016, qui emporte aujourd'hui des conséquences dommageables en termes d'adaptabilité opérationnelle, s'avère consommateur de ressources et pousse les acteurs au maintien d'un statu quo ». Afin de progresser davantage, nous demandons que les GHT aient la possibilité – rien de plus ! – d'acquérir une personnalité morale.
Nos débats sur les GHT démontrent qu'une telle évolution, que j'approuve, est prématurée. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS52 de M. Pierre Dharréville.
. Quatre ans après la création des GHT, dans le cadre de la loi de modernisation de notre système de santé promulguée en 2016, l'amendement prévoit un rapport évaluant leurs conséquences en matière d'offre publique de soins, de conditions de travail des personnels hospitaliers et de qualité des soins. Un tel rapport nous aiderait à rédiger celui dont nous sommes chargés dans le cadre de la MECSS, en permettant de procéder à des évaluations croisées sur un sujet important.
Le rapport élaboré dans le cadre de la MECSS devrait répondre à ces questions. Nous disposons aussi du rapport de l'IGAS et de celui de la Cour des comptes.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine les amendements identiques AS38 de M. Bernard Perrut et AS137 de M. Jean-Louis Touraine.
. La crise sanitaire a démontré la nécessité de déployer et de coordonner les politiques de santé de façon très concrète et décloisonnée, à l'échelle des territoires. Elle a illustré la pertinence de la coopération entre établissements de santé, qu'ils soient publics ou privés. Ils ont été les acteurs du premier recours, aux côtés des usagers et des élus. Un cadre juridique commun à tous les acteurs et efficace n'est-il pas souhaitable ? Tel est tout l'objet de notre réflexion.
Afin de donner corps à l'échelle territoriale et de concrétiser les filières nécessaires à l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, nous proposons que les acteurs de santé de chaque territoire de démocratie sanitaire rédigent un projet territorial de santé (PTS) leur permettant de se rencontrer autour des parcours de santé des patients. En l'absence d'initiative des acteurs locaux, le directeur général de l'ARS serait chargé d'en arrêter un, grâce aux documents fournis par eux. Ainsi, la mise en œuvre de PTS irait de pair avec une simplification du millefeuille territorial, dans le respect des uns et des autres.
. Dans son rapport, le Pr. Olivier Claris indique que les PTS ont vocation à créer une dynamique territoriale associant les divers acteurs de santé, notamment les GHT, les communautés psychiatriques de territoire, les CPTS, les médecins libéraux et les professionnels de l'hospitalisation et de la santé à domicile, tout en permettant d'assurer la cohésion des politiques et des financements, dans une logique territoriale, préférable à une logique en « tuyaux d'orgue ». Or la crise sanitaire a démontré qu'il était urgent de coordonner les politiques de santé à l'échelle du territoire. Pour lui donner corps, nous proposons la définition d'un PTS dans chaque territoire, ce qui permettrait aux acteurs de la santé de se rencontrer autour des parcours de soins des patients. Si les acteurs locaux ne s'emparent pas de cet outil dans les deux ans après la promulgation de la présente loi, le directeur général de l'ARS compétente arrêtera un PTS, sur la base des diagnostics et des documents qu'ils lui auront fournis.
Chers collègues, je suis ravie que vous mettiez en avant les PTS, que nous avons créés dans le cadre de la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, adoptée en 2019. Ces projets de soins reposent notamment sur les CPTS, qui sont de plus en plus nombreuses, sans toutefois couvrir le territoire national. Il me semble donc prématuré d'imposer la création de projets territoriaux de santé, au risque d'en faire des instruments plus administratifs que soignants. Il convient de favoriser au préalable le développement des CPTS, dans le cadre desquelles s'inscrivent les PTS.
Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle examine l'amendement AS240 de M. Philippe Vigier.
. L'amendement vise à créer des groupements de santé de territoire, dont l'objectif est de réunir et de rapprocher les acteurs de santé des secteurs public et privé, qu'ils soient hospitaliers ou libéraux, présents sur un même territoire. Il s'agit de développer une structure de collaboration entre établissements publics de santé, cliniques privées et professionnels libéraux, au sein des CPTS.
M. Philippe Vigier m'a interrogée à ce sujet ce matin, lors de la discussion générale. J'ai indiqué que les protocoles de coopération entre professionnels de santé, les GCS et les PTS répondent à ses attentes. Demande de retrait ou avis défavorable.
. Vous souhaitez créer, en quelque sorte, un bloc de l'hôpital public à l'échelle du territoire, en renforçant les GHT. Nous souhaitons favoriser la coopération, à une échelle plus réduite, entre le secteur public, les ESPIC et le secteur privé au sein des CPTS. Ces deux visions sont distinctes. La vôtre a pour effet d'épaissir le mur séparant secteur public, ESPIC, secteur privé et médecine de ville. La nôtre a pour effet de créer des passerelles entre eux, dont la crise a démontré qu'elles sont nécessaires. Je regrette que tel ne soit pas le cas. L'amendement va dans le même sens que les amendements identiques qui précèdent. Il faut créer des liens et des passerelles, pas des murs. Je suis très déçu de vos réponses aux amendements du groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés. En somme, vous souhaitez renforcer la forteresse de l'hôpital et rendre impossible tout dialogue entre lui et les EPIC, le secteur privé et la médecine de ville.
Rien n'empêche un établissement de santé membre d'un GHT de participer à un GCS, à une coopération renforcée ou à un PTS dans son bassin de vie. Nous en avons débattu à plusieurs reprises. Je considère comme vous qu'il faut faciliter la coopération de l'hôpital avec le secteur privé et la médecine de ville.
Qu'apporte-t-il de plus ? Permettez-moi de vous faire observer qu'il ne permet d'inscrire dans la loi aucune disposition supplémentaire relative aux PTS, aux protocoles de coopération ou aux GCS !
. Monsieur Isaac-Sibille, je comprends vos attentes. Toutefois, il existe d'ores et déjà de nombreuses entités : CPTS, PTS, schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS), GHT, conseils territoriaux de santé (CTS) – j'en passe et des meilleures ! Pour les personnes travaillant au sein des directions des hôpitaux, qui sont chargées de leur gestion quotidienne et de la qualité des soins, plus on ajoute de couches au millefeuille, plus l'organisation de la vie de tous les jours est complexe, en raison d'une bureaucratisation accrue de l'hôpital. Il faut s'en tenir à un objectif de bon sens, que nous partageons, comme l'a rappelé Mme la rapporteure.
. Madame Dufeu, nous proposons un outil opérationnel. La crise sanitaire a démontré que, en dépit des beaux discours, chacun a tendance, à l'hôpital, même en tenant compte de variations régionales, à travailler dans son couloir. Pour inverser cette tendance, il faut un outil opérationnel.
. Madame la rapporteure, contrairement à ce que vous affirmez, nos positions ne sont pas tout à fait identiques. Vous souhaitez donner davantage d'importance aux GHT – nous avons eu tout à l'heure un débat similaire au sujet des CHU. Or plus le GHT est large et fort, moins il dialogue avec les autres acteurs de santé. Il faut créer un outil opérationnel permettant de renforcer la coopération entre l'hôpital public, l'hôpital privé et la clinique privée au sein de la CPTS. Il ne s'agit pas d'épaissir le millefeuille, au contraire. Vous avez une vision verticale, j'ai une vision horizontale et opérationnelle. C'est pourquoi nous soutenons l'amendement de notre collègue Philippe Vigier. Vous construisez un mur, nous lançons des passerelles : les choses sont assez simples.
. Je remercie mes collègues du Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés d'avoir défendu mon amendement tandis que j'étais retenu ailleurs.
Je ne surprendrai pas Stéphanie Rist en affirmant que j'ai depuis longtemps théorisé la question. L'exemple des tuyaux d'orgue est parlant : ils ne communiquent pas entre eux, mais jouent de façon complémentaire. En l'espèce, la difficulté est que les oppositions entre secteur public et secteur privé perdurent.
J'ai la chance d'être élu d'un territoire dont la CPTS a été donnée en exemple par le Président de la République lorsqu'il a présenté le plan « Ma Santé 2022 ». Elle a servi de modèle – je n'y suis pour rien, je ne suis pas l'auteur de son discours. Je suis donc très à l'aise pour aborder ce sujet. Nous avons commencé par tout décloisonner, ce qui nous a permis, soit dit en passant, d'ouvrir des centres covid-19 dans tout le département d'Eure-et-Loir, de façon à éviter l'encombrement des hôpitaux publics.
Si nous n'adoptons pas l'amendement, nous passerons à côté de quelque chose. Je veux bien tout entendre, mais la pratique quotidienne, telle que je l'ai vécue depuis plusieurs années, et tout particulièrement depuis le printemps, démontre que les dispositions proposées fonctionnent. Comme l'a très bien dit Cyrille Isaac-Sibille, elles ne déshabillent personne. Elles placent les acteurs de santé dans une situation de complémentarité et de responsabilité partagée.
Arrêtons de dire « Non, c'est pas moi, c'est ma sœur qui a cassé la machine à vapeur » ! Cela ne fonctionne pas ! La CPTS est le lieu où l'on se rassemble pour définir le parcours de soins. D'ailleurs, nous examinerons tout à l'heure un amendement de Thomas Mesnier relatif à l'instauration d'un numéro d'appel unique. J'ai écrit tout cela dans le rapport de la commission d'enquête sur l'égal accès aux soins des Français sur l'ensemble du territoire et sur l'efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour lutter contre la désertification médicale en milieux rural et urbain.
Chers collègues, allez passer une nuit dans un service de régulation médicale, comme je l'ai fait ! Vous verrez ce qu'il en est du rôle des pompiers et du numéro blanc ! Vous constaterez qu'ils ne se parlent pas et qu'ils se téléphonent pour trouver des lits ! Quand on a vécu cela, on ne raisonne plus comme avant ! Si vous ne me croyez pas, je vous emmène ! Allons passer quatre jours sur le terrain, chacun en reviendra transformé ! Ce que je dis n'a rien de désagréable ! Verba volant, scripta manent !
Monsieur Vigier, nous partageons cette vision, et vous le savez. Je considère simplement que votre amendement est satisfait. Je le lis : « L'ensemble des acteurs publics et privés du système de santé présents sur un territoire, qu'ils soient hospitaliers ou libéraux peuvent se regrouper au sein d'une organisation commune dénommée groupement de santé de territoire ». Au nom près, tout cela existe. Vous avez d'ailleurs indiqué avoir agi dans ce cadre. Peut-être faut-il retravailler l'amendement en vue de la séance publique. En l'état, il n'ouvre aucune possibilité nouvelle.
. Nous avons agi à l'échelle d'un petit territoire, en contournant un peu le cadre légal. Malheureusement, la technostructure est ainsi faite que, si le cadre légal ne vient pas d'en haut, il ne fonctionne pas. Je me permets de le dire avec modestie.
La commission rejette l'amendement.
Article 7 bis (nouveau) : Création d'un service d'accès aux soins non programmés
La commission examine l'amendement AS248 du rapporteur général.
. Cet amendement important reprend une proposition que j'ai formulée dans deux précédents rapports, ainsi qu'un engagement de la majorité et du Gouvernement repris, devenu la mesure 1 du pacte de refondation des urgences et la mesure 26 du Ségur de la santé. Il m'a semblé intéressant de l'inscrire dans la présente proposition de loi.
Il s'agit d'intégrer le service d'accès aux soins (SAS) dans la loi, au même titre que d'autres services publics de santé, tels que le service d'aide médicale urgente (SAMU). Pour prolonger le débat que nous venons d'avoir, j'indique que le SAS tend à créer du lien entre la médecine de ville et la médecine hospitalière, qui en assurent la cogestion à parité. Il permet, grâce à un numéro d'appel unique et à une plateforme numérique, d'assurer un accès aux soins vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, qu'il s'agisse d'une urgence vitale ou d'une urgence ressentie. Il s'agit pour les Français d'un progrès manifeste. Au demeurant, vingt-deux sites pilotes viennent d'être sélectionnés pour le lancement du SAS dès le mois de janvier 2021. Allons-y ! Cette réforme est très attendue par les professionnels de santé. Je vous invite à la graver dans le marbre de la loi, chers collègues.
Avis favorable. Il s'agit d'une simplification pour les patients et pour l'offre de soins, qui améliore le système de santé.
. J'ai à nouveau le sentiment que la présente proposition de loi constitue le dernier véhicule législatif possible pour inscrire dans la loi un peu tout ce qui vous passe par la tête, chers collègues de la majorité. En l'espèce, la disposition proposée, qui ne figure pas dans le texte initial, ne fait pas l'unanimité. Elle risque même de mettre le feu à la caserne ! En effet, la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France a formulé une vision des choses distincte, que ses représentants ont présentée il y a quelques semaines devant la mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19, présidée par Julien Borowczyk.
Visiblement, il n'existe aucun consensus à ce sujet. Les sapeurs-pompiers proposent de distinguer ce qui relève des soins d'urgence de ce qui relève de l'accès aux soins. Chacun connaît les difficultés qu'ils rencontrent pour participer à l'effort en matière de secours aux victimes. Instaurer un numéro unique ne suffit pas, il faut aussi définir le fonctionnement des services concernés. Je rappelle que trois expérimentations du modèle proposé par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers sont en cours, dans trois régions distinctes. Elles semblent assez concluantes. Il me semble nécessaire, à tout le moins, de prendre le temps de consacrer un débat à ces enjeux, plutôt que de légiférer au détour d'une proposition de loi.
. J'ai le sentiment que M. le rapporteur général est mû par un sentiment d'urgence, et qu'il tente de faire passer une disposition au forceps, alors même que des députés travaillent depuis plusieurs mois, de façon transpartisane, au renforcement du modèle de la sécurité civile, en s'efforçant de déterminer la meilleure façon d'intégrer les sapeurs-pompiers dans le traitement des crises. Monsieur le rapporteur général, j'ai le sentiment que vous souhaitez brûler les étapes et interdire toute solution alternative à la vôtre.
Oui, la question de l'amélioration du traitement des appels est sur la table, non à titre de vœu, mais d'objectif. Oui, le 15 a parfois été saturé et débordé pendant la crise sanitaire – je rejoins Philippe Vigier sur ce point. Oui, il en résulte des situations indignes du point de vue médical, notamment dans les départements où le délai de traitement des appels est trop long, ce à quoi il faut remédier. Mais vous vous contentez, par le biais de votre amendement, de juxtaposer un numéro à ceux qui existent, au lieu de traiter le fond du problème.
Je puis témoigner qu'il existe, dans certains départements, des plateformes communes au SAMU et au service départemental d'incendie et de secours (SDIS). Tel est notamment le cas dans les Vosges. Les praticiens du SAMU qui y travaillent et les sapeurs-pompiers peuvent témoigner qu'elles fonctionnent à merveille et qu'aucune organisation territoriale n'est meilleure. Par votre amendement, vous fermez la porte à l'évaluation et à la généralisation de cette expérimentation, menée depuis quelques années dans plusieurs départements, pour imposer votre modèle et votre vision. Je considère que vous allez beaucoup trop vite en besogne. Comme l'a dit Pierre Dharréville, vous prenez prétexte du véhicule législatif dont nous débattons pour tenter d'imposer votre point de vue, alors même qu'il existe manifestement des solutions alternatives pour améliorer l'organisation des centres de traitement des appels d'urgence.
. L'objet de l'amendement est d'instaurer un service universel d'appels d'urgence, accessible à chacun sur le territoire national. J'estime que nous abordons ce sujet de façon un peu rapide, sans tenir compte de toutes les observations que nous avons recueillies. Au demeurant, l'auteur de l'amendement le sait très bien, car la Fédération nationale des sapeurs-pompiers a adressé aux parlementaires une note relative à l'expérimentation du SAS. Il est intéressant de lire ce document avant de prendre position à ce sujet. Il tire les enseignements de la crise du covid-19, et considère comme vaine la prétention d'instaurer un numéro unique d'appel d'urgence englobant situations d'urgence et besoins de soins non programmés. Par ailleurs, il indique que la superposition du 113 au 15 serait synonyme de dégénérescence de notre modèle. Les sapeurs-pompiers y voient « une confusion délibérée avec le numéro 112 ayant pour objet et pour effet de l'empêcher de devenir l'unique numéro d'appel de toutes les urgences ». Ils ne contestent pas la nécessité d'une modernisation, mais estiment qu'elle doit être articulée autour du 112 et du 116-117. Il va de soi que chaque appel au secours doit faire l'objet d'une réponse sans délai.
Monsieur le rapporteur général, votre amendement, soit dit dans le respect de votre volonté, ne me semble pas fondé sur une analyse suffisamment étayée. Il convient d'auditionner les représentants des sapeurs-pompiers, du SAMU et de la sécurité civile. Comme l'a rappelé Stéphane Viry à l'instant, dans certains territoires, une organisation commune est d'ores et déjà envisagée ou organisée. Il convient également de prendre connaissance des positions respectives de l'Assemblée des départements de France, de l'Association des maires de France, des syndicats de médecins et des représentants des hôpitaux. Grâce à la vision qui en résultera, nous pourrons créer une véritable coopération entre les services de secours, voire une mutualisation des efforts de celles et ceux qui œuvrent en ce sens.
. L'amendement présenté par le rapporteur général vise à inscrire dans la présente proposition de loi la création du SAS, prévue dans le pacte de refondation des urgences – je salue le travail mené dans ce cadre. La nécessité de créer le SAS a été réaffirmée dans le cadre du Ségur de la santé. Il s'agit de l'un des engagements majeurs de la majorité en faveur de l'accès aux soins et du renforcement du partenariat entre médecine de ville et hôpital.
Toutefois, j'aimerais appeler l'attention sur plusieurs points. Ce projet très ambitieux et très structurant connaîtra très bientôt une traduction concrète pour plus de 40 % des Français. En effet, le Gouvernement a annoncé ce lundi la sélection de vingt-deux territoires pilotes, où la nouvelle régulation mixte entre médecine de ville et hôpital sera mise en œuvre dès le début de l'année 2021. Ils expérimenteront ce nouveau modèle tout au long de l'année 2021, en vue de sa généralisation.
Si attendu qu'il soit, le SAS ne fait pas l'unanimité. Notre groupe considère qu'il est délicat, voire imprudent de définir par amendement certains principes essentiels de son organisation, par anticipation des réponses à plusieurs questions qui se posent toujours, s'agissant notamment du statut juridique du SAS et de son articulation avec celui du SAMU, et des évaluations qui seront menées dans le cadre de cette expérimentation, sur la base des organisations les plus porteuses testées par les territoires pilotes. Nous devons également débattre de son articulation avec d'autres dispositions présentées par notre majorité, notamment la proposition de loi visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers, déposée par notre collègue Fabien Matras, que nous devons examiner bientôt.
Pour ces raisons, notre groupe estime – je m'en excuse auprès de notre rapporteur général, même si cela n'enlève rien à la qualité des travaux qu'il a menés – qu'il est prématuré d'adopter l'amendement dès à présent.
. L'objectif d'un numéro de téléphone accessible à toute la population est indispensable. Il faut absolument résoudre ce problème. Lors de la précédente législature, j'étais membre de la mission d'information sur l'organisation de la permanence des soins. De nombreuses plateformes départementales permettaient d'opter pour le 18 ou le 15, et d'éviter ainsi la bataille entre les rouges et les blancs. Dans le Loiret, une plateforme dédiée, gérée par le SDIS, répartit les appels entre le 18 et le 15.
Monsieur le rapporteur général, vous avez évoqué une cogestion à parité du SAS par l'hôpital et la médecine de ville. Or, dans le cadre de la mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19, les représentants des syndicats de médecins ont confirmé leur préférence unanime pour le 116-117. Comment répartir les appels entre le numéro unique que vous proposez, le 116-117 et les plateformes du 15 et du 18 ? Bon courage pour résoudre le problème et instaurer un numéro d'appel permettant d'assurer la permanence des soins – vous l'appelez le SAS, nous l'appelions permanence des soins ambulatoires (PDSA) – permettant à la population française d'obtenir une réponse en cas d'appel !
. Le département de l'Indre-et-Loire, où je suis élu, a été retenu pour expérimenter le SAS. Je suivrai cela de très près.
Le sujet est complexe. Les rapports entre les SDIS et le SAMU ne sont pas toujours parfaits. À Tours, les appels ont récemment été dégroupés. Il importe que nos concitoyens obtiennent une réponse à leurs demandes par téléphone. Elle doit être précise et étayée, car elle fait l'objet d'un enregistrement, pour des raisons d'ordre médico-légal. Il est souhaitable de procéder à des expérimentations, car il faut avancer en matière de plateforme téléphonique et de traitement des patients. Nous en tirerons le bilan afin de déterminer le meilleur modèle selon les territoires. Je tenais à apporter ma pierre à l'édifice.
. Il est très pertinent de soulever cette question. Toutefois, j'aimerais demander à M. Thomas Mesnier comment son amendement s'articule avec l'expérimentation en cours de déploiement. S'il en constitue la suite, il faudra tenir compte de ses résultats dans les vingt-deux sites retenus. Plusieurs problèmes demeurent en suspens ; ils feront l'objet d'un arbitrage au terme de l'analyse des résultats de l'expérimentation. Comme Mme Annie Vidal, je m'interroge sur le rapport entre l'amendement et l'expérimentation, qui n'en est qu'à ses débuts.
La commission d'enquête a réalisé de nombreuses auditions et entendu plusieurs intervenants. J'avais alors souligné le parti pris des pompiers. Un constat assez unanime, dont on a peu parlé, avait émergé : au milieu de tout cela, il y a un patient, qui attend une réponse étayée. Il nous faut donc une plateforme d'appel unique qui traite la demande de A à Z. Lorsque l'on se plaint d'une douleur thoracique, les minutes comptent quand il s'agit d'un infarctus, alors que ce n'est pas le cas s'il s'agit d'une douleur thoracique musculaire. Mais le patient peut difficilement le déterminer, et ce n'est pas son rôle. C'est celui de la plateforme d'intervention d'urgence. Seule une plateforme centralisée est capable d'apporter cette réponse, sans que le patient perde du temps en changeant d'interlocuteur.
Nous avons également parlé de l'expérience de médecin régulateur. Il se trouve que je réalise deux à trois nuits de régulation par mois au 15 de Saint-Étienne. Je sais donc ce qu'il en est et à quel point nous avons besoin d'une régulation globale pour simplifier et fluidifier l'activité des centres 15.
Enfin, lorsqu'on parle avec les pompiers, ils nous disent souvent qu'ils croulent sous les services de soins à la personne et les transports médicaux. Un tel sas permettrait d'éviter ce type de surenchère. Les pompiers ne sont pas là pour ça – ce n'est pas décrédibiliser leur mission que de le dire. L'idée de Thomas Mesnier est donc particulièrement intéressante.
Je remercie Thomas Mesnier pour sa proposition. Il est intéressant de faire activement travailler le public et le privé autour d'une plateforme. Mais n'est-ce pas un peu précipité, alors qu'une expérimentation est en cours ? Ce n'est en outre pas le moment de faire sortir les pompiers de leur caserne. Je crois beaucoup aux solutions locales ; je ne sais pas si on peut imposer la même solution dans tous les territoires.
Dans le Bas-Rhin, nous avons malheureusement subi le crash du mont Sainte-Odile et la réflexion sur ce sujet avait été engagée dans les mois qui ont suivi la catastrophe, suite aux dysfonctionnements entre le 15, le 18 et les équipes soignantes qui auraient pu intervenir de façon beaucoup plus efficiente si elles s'étaient coordonnées.
Pour autant, j'appelle à la prudence car, depuis cette époque, le Bas-Rhin est un territoire d'expérimentation et de concertation. Adopter un tel amendement serait réducteur : il convient d'aller au bout de l'expérimentation sans brûler les étapes.
Les Yvelines expérimentent également ; je m'en félicite. Le temps de l'expérimentation est nécessaire pour trouver les bonnes modalités de fonctionnement. L'amendement a du sens, mais finissons l'expérimentation pour en valider la pertinence.
Monsieur Viry, il s'agit bien d'une réponse à une problématique de fond, celle de l'accès aux soins. Je soutiens cette proposition à titre personnel depuis un certain temps, mais elle a été reprise par le Gouvernement et la majorité à travers le pacte de refondation des urgences et le « Ségur » – c'est sa mesure 26.
Vous avez évoqué l'engorgement du 15. Vous avez raison : c'est pourquoi nous souhaitons revoir la structure « sous le capot » et prévoir des moyens supplémentaires : 360 millions d'euros sont sur la table pour la part hospitalière du service d'accès aux soins et la négociation conventionnelle en cours avec les médecins libéraux comporte un volet sur le sas.
Vous avez également parlé de plateforme interconnectée avec les pompiers ; l'amendement ne l'interdit pas et il est d'ailleurs utile d'avancer afin de renforcer les coopérations.
Nous souhaitons que la médecine générale soit accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Actuellement, quand vous appelez le 15, vous pouvez joindre un urgentiste en cas d'urgence vitale, mais vous n'aurez un généraliste que le soir et le week‑end. Il s'agit donc d'améliorer l'accès aux soins. Ensuite, les CPTS, compétentes en matière de soins non programmés, vont répondre.
Monsieur Perrut, le sujet est lié à la santé et concerne à la fois les urgences et la médecine de ville. Je n'ai pas travaillé seul l'année dernière pour élaborer mon rapport, mais avec une équipe de terrain, composée du patron du plus gros SAMU de France, celui de Lille, de deux médecins généralistes et d'une infirmière hospitalière.
Madame Vidal, monsieur Touraine, l'amendement ne pose que les grands principes et il n'est pas question de préempter les résultats de l'expérimentation. La mise en œuvre sera ensuite déclinée par voie réglementaire.
Monsieur Door, actuellement, pour disposer d'une réponse à une question de santé, on a le 15, le 116-117, une foultitude de numéros de permanence de soins. L'amendement vise à tous les fusionner derrière un seul numéro afin de donner une réponse aux patients et de le rassurer. Quand vous avez un problème de santé, ce n'est pas à vous de savoir si c'est une urgence vitale ou une urgence ressentie. Le service de santé, grand service public, doit s'occuper de vous, quel que soit votre problème.
Monsieur Isaac-Sibille, vous plaidez pour les passerelles entre la ville et le privé. C'est le cas. En outre, nous tissons aussi des passerelles avec les pompiers. Rassurez-vous, il n'est pas question de toucher aux équilibres actuels : les pompiers gèrent le 18 ; demain, ce sera le 112. Aujourd'hui, quand vous avez une question relative à votre santé, vous appelez le 15, le 116-117, le numéro de PDSA ; demain, ce sera le 113 puisque les expérimentations sont lancées. Peut-être pourra-t-on aller plus loin, avec des plateformes interconnectées.
Nous ne faisons qu'inscrire les grands principes dans la loi. Nous pourrons peut-être acté en séance que la mise en œuvre de cet article sera déclinée par voie réglementaire, une fois les expérimentations lancées.
La santé ne fait pas souvent l'objet de lois. Il est donc intéressant de se saisir de cette proposition de loi pour graver dans le marbre les engagements du « Ségur », dont celui-ci.
La commission adopte l'amendement.
Article 8 : Droit d'option des établissements de santé en matière de modalités d'organisation interne et de gouvernance
La commission est saisie de l'amendement AS315 de la rapporteure.
Cet amendement de rédaction globale corrige les références légistiques dont plusieurs amendements, comme l'amendement AS62 et les amendements identiques, soulignent qu'elles ne sont pas les bonnes.
Il précise qu'il s'agit bien uniquement d'une dérogation à l'organisation en pôles et en services. Il permettra notamment aux plus petits établissements ou à ceux qui le souhaitent de ne plus être organisés en pôles. C'est une demande très forte du terrain et des praticiens hospitaliers.
Enfin, il précise les modalités de mise en œuvre de ce droit d'option, et notamment qu'il sera décidé de manière conjointe par le directeur et le président de la CME d'un établissement public de santé. L'avis conforme de la CME et de la CSIRMT ainsi que l'avis du comité technique d'établissement seront nécessaires.
L'amendement satisfait ainsi toutes les demandes exprimées par vos amendements.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 8 est ainsi rédigé et les amendements AS20 de M. Jean‑Pierre Door, AS72 de Mme Jeanine Dubié, AS62 de Mme Marine Brenier, AS131 de M. Jean-Louis Touraine, AS141 de Mme Valérie Six, AS160 de Mme Perrine Goulet, AS227 et AS228 de Mme Annie Chapelier ainsi que l'amendement AS209 de M. Philippe Vigier tombent.
Après l'article 8
La commission examine, en discussion commune, les amendements AS74 de Mme Jeanine Dubié ainsi que les amendements AS253 et AS254 de M. Yannick Kerlogot.
L'amendement AS74 vise à renforcer la démocratie sanitaire, en incluant un sénateur et un député du territoire dans le conseil de surveillance des établissements de santé publics.
M. Kerlogot n'étant pas présent en raison des restrictions sanitaires, je défends les amendements AS253 et AS254. Il souhaite que les députés puissent siéger au conseil de surveillance. Le second amendement est de repli, le député siégeant seulement avec voix consultative.
Ces amendements posent la question de la place des élus dans la gouvernance de notre système de soins. Il me semble que le vecteur législatif le plus adapté serait le projet de loi dit « 3D », qui pourrait prendre en compte le sujet de façon plus globale. Il serait restrictif de s'en tenir uniquement aux conseils de surveillance. Je vous propose donc le retrait de vos amendements.
M. Kerlogot m'indique qu'il procédera à une nouvelle rédaction pour la séance publique. Je vais donc les retirer.
Les amendements sont retirés.
Article 9 : Élargissement de la composition du directoire des établissements publics de santé
La commission examine l'amendement de suppression AS21 de M. Jean-Pierre Door.
J'y suis défavorable. Il me semble important de laisser la possibilité aux établissements d'introduire des personnalités qualifiées au sein du directoire des établissements publics.
La commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement AS256 de la rapporteure.
Lors des auditions, j'ai entendu les critiques faites à cet article et la nécessité de le préciser. Vos amendements vont pour la plupart dans le même sens et soulèvent des questions auxquelles il faut répondre.
L'article prévoit de supprimer la limite de nombre de membres du directoire mais personne ne veut d'un directoire à cinquante membres et ce n'est pas l'esprit de cet article. En outre, il faut garder la condition de majorité médicale, qui fait consensus, et un nombre de membres impairs pour qu'une majorité puisse se dégager.
Enfin, la nomination imposée d'étudiants et d'usagers au conseil de surveillance pose des problèmes aux plus petits centres hospitaliers qui ne disposent pas forcément du « vivier » nécessaire. Par exemple, il n'y a pas d'étudiants en santé dans tous les établissements.
Le présent amendement revient sur le déplafonnement du nombre de membres du directoire : le directoire sera ainsi limité à neuf membres – onze pour les CHU. Il précise les modalités de nomination des personnels soignants non médicaux en son sein, ainsi que les modalités de désignation des étudiants et usagers, personnalités qualifiées au statut particulier, dont la désignation sera facultative.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 9 est ainsi rédigé et les amendements AS85 de Mme Jeanine Dubié, AS178 de Mme Caroline Janvier, AS36 de M. Guillaume Chiche, AS61 de Mme Marine Brenier, AS201 de Mme Gisèle Biémouret, AS133 de M. Jean-Louis Touraine, AS9 de Mme Isabelle Valentin, AS43 de Mme Séverine Gipson et AS328 de Mme Jeanine Dubié tombent.
Après l'article 9
La commission est saisie de l'amendement AS294 de M. Jean-Louis Touraine.
Il s'agit d'un amendement du groupe La République en Marche qui concerne les établissements publics de santé, personnes morales de droit public administrativement et financièrement autonomes. Il vise à doter le directeur d'établissement public de santé d'outils de prévention des conflits d'intérêts, efficaces et adaptés aux spécificités de sa fonction, sur le modèle de ceux prévus par la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. S'il se trouvait en situation de conflit d'intérêts, le directeur se verrait déporté et le directeur de l'ARS pourrait nommer la personne qui se substituerait à lui sur les sujets objets du conflit d'intérêts, et uniquement ceux-ci.
Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement. Le président du conseil de surveillance n'est pas l'autorité hiérarchique du directeur, ni le chef de service de l'établissement. Il n'a donc aucune compétence pour se prononcer et analyser les conflits d'intérêts pouvant affecter le directeur.
En outre, le code de la santé publique prévoit que le président du conseil de surveillance est élu parmi les membres du conseil, composé notamment de représentants du personnel de l'établissement. La situation pourrait donc être délicate.
Enfin, votre proposition risque fort d'être censurée par le Conseil constitutionnel car elle méconnaît le principe d'égalité de traitement au sein de la fonction publique hospitalière. Je vous propose donc de revoir votre amendement pour la séance.
Il va tout de même falloir trouver une solution afin que quelqu'un puisse se substituer au directeur sur les sujets litigieux.
L'amendement est retiré.
Puis la commission examine les amendements AS47, AS46 et AS48 de Mme Martine Wonner.
L'amendement AS46 vise à élargir le champ de recrutement des directeurs de centres hospitaliers, qui ont un profil classique. Ils sont très souvent issus de la haute administration et de formation avant tout politique et managériale. Notre amendement prévoit que deux des trois personnes proposées pour le poste de directeur devraient être issues du personnel hospitalo-universitaire.
L'amendement AS47 vise à rendre le processus de nomination des directeurs plus transparent et démocratique. Il vise également à favoriser les nominations de professionnels de santé. Il institue une direction bicéphale des CHU, en prévoyant qu'un second directeur soit nommé parmi le personnel hospitalo-universitaire de l'établissement. Cela contribuerait aussi à rassurer M. Touraine sur les conflits d'intérêts.
Afin de favoriser une gouvernance plus médicale qu'administrative et budgétaire, comme par le passé, l'amendement AS48 plaide pour une codirection des CHU, un médecin issu de l'établissement venant appuyer les personnels administratifs.
Je suis défavorable à ces amendements. En l'état actuel du droit, les directeurs de CHU sont nommés par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Je suis d'accord avec vous, il faut diversifier les profils et remédicaliser la gouvernance, comme nous le faisons avec l'article 5. Mais le dispositif que vous prévoyez me semble inapplicable.
La commission rejette successivement les trois amendements.
Article 10 : Lutte contre les abus liés à l'intérim médical
La commission examine l'amendement AS135 de M. Jean-Louis Touraine.
L'intérim médical est devenu central dans les territoires où la démographie médicale est particulièrement tendue. L'amendement propose d'intégrer au SROS un volet spécifique à la permanence des soins, précisant les modalités de réponse aux besoins de santé de la population en soins non programmés.
Nous souhaitons également que le directeur général de l'ARS puisse suggérer des mesures correctives aux établissements concernés, afin de garantir un nombre de professionnels permanents suffisant. Nous proposons qu'il puisse déférer certains actes au tribunal administratif, si la décision de recourir à l'intérim médical n'est pas conforme au SROS.
Enfin, il conviendrait que le comptable public puisse écrêter la rémunération irrégulière d'un praticien afin qu'elle soit conforme aux conditions fixées par la réglementation, ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas.
Vous souhaitez que le directeur général de l'ARS indique d'abord au directeur de l'établissement les actions correctrices à mettre en œuvre – coopérations ou fusions de lignes de permanence des soins par exemple – afin de garantir un nombre de professionnels permanents suffisant. Or ce n'est pas ce que nous visons puisque nous souhaitons un véritable contrôle de légalité de l'acte. Le dispositif que vous proposez ralentirait considérablement le processus.
Évidemment, cela n'empêche pas l'ARS de travailler en parallèle avec l'établissement concerné à ses problèmes de recrutement.
Sur l'écrêtement, M. Mesnier a également déposé un amendement, et le sujet est assez technique. Vous connaissez bien sûr le principe de séparation de l'ordonnateur et du comptable, qui est le même dans tous les établissements et collectivités publics. Pour faire simple, soit le comptable paye conformément au mandat de l'ordonnateur, soit il le rejette, pour défaut de justificatifs par exemple, mais il ne peut décider d'ajuster le montant car il deviendrait alors ordonnateur. En outre, il n'aurait pas les moyens techniques de le faire, un comptable ne pouvant éditer une fiche de paie. En effet, le calcul d'une paie et de ses cotisations relève uniquement de la direction des ressources humaines de l'hôpital.
Je vous propose donc de laisser sa chance à ce très bel article, et de ne pas risquer de le rendre inopérant.
Je reformulerai mon amendement en tenant compte de vos remarques car il va plus loin et il est plus large que les dispositions que vous prévoyez, et auxquelles, bien entendu, j'adhère. Le sujet est important et il faut, une bonne fois pour toutes, se donner les moyens de corriger ces malencontreux excès.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite les amendements AS241 et AS311 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
Je pensais connaître l'hôpital public mais, lors des auditions, j'ai découvert que la rémunération de certains praticiens pouvait atteindre 18 000 euros par mois ! L'amendement AS241 précise que le présent article ne concerne pas uniquement les intérimaires au sens strict, mais également les contrats de gré à gré.
L'amendement AS311 transforme la possibilité pour le directeur général de l'ARS de déférer au tribunal administratif les délits dont il a connaissance en obligation. Des dispositions similaires sont prévues pour le comptable public car tout fonctionnaire qui a connaissance d'un délit doit faire le nécessaire.
Cela permet de viser tous les contrats temporaires, pas uniquement l'intérim, mais aussi les contrats de gré à gré. J'y suis très favorable.
La commission adopte successivement les amendements.
Elle en vient à l'amendement AS22 de M. Jean-Pierre Door.
Cet amendement du groupe Les Républicains vise modifier la rédaction de l'article pour ne pas faire peser sur les directeurs toute la responsabilité dans le recours à des intérimaires. Souvent, ils se trouvent face à un dilemme : devoir fermer provisoirement un service faute de médecins en nombre suffisant ou recruter des intérimaires.
L'amendement permet dans ce cas au directeur d'hôpital de faire appel au directeur de l'ARS pour l'aider à trouver une solution et faire face aux situations d'urgence.
Même s'il est justifié que le directeur de l'hôpital puisse appeler le directeur de l'ARS, l'amendement entérine le fait que les directeurs d'hôpitaux ont le droit de ne pas respecter la loi. Je ne peux donc pas y être favorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement AS134 de M. Jean-Louis Touraine.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel qui remplace le terme d'intérim par celui d'entreprise de travail temporaire, plus conforme juridiquement.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS246 du rapporteur général.
Vous proposez que le comptable public puisse procéder au rejet du paiement de la rémunération irrégulière. Je souhaite transformer cette possibilité en obligation, mais aussi que le comptable public puisse non pas rejeter le paiement de la rémunération, mais procéder à l'écrêtement du montant de la rémunération supérieur à la rémunération régulière fixée par décret.
Pour les mêmes motifs que précédemment, en raison du principe de séparation de l'ordonnateur et du comptable, mon avis sera défavorable.
Je ne comprends pas l'argument de la rapporteure. Lorsque vous êtes élu, qui procède à l'écrêtement si vous êtes parlementaire ? Pourtant, l'ordonnateur et le payeur sont bien séparés dans ce cas.
L'amendement est retiré.
Puis la commission examine l'amendement AS161 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
Le comptable public « procède » et non « peut procéder » au rejet du paiement de la rémunération irrégulière.
Je suis favorable à cet amendement, qui renforce la portée de cet article en rendant systématique le rejet de l'ordre par le comptable.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS280 de M. Jean-Louis Touraine.
Il convient de donner la possibilité au comptable public de procéder à un écrêtement de la rémunération irrégulière plutôt qu'au rejet du paiement de celle-ci, ce qui permettra notamment de ne pas bloquer certains établissements confrontés à des difficultés de recrutement de praticiens tout en favorisant une pleine application des principes et propositions de lutte contre le mercenariat médical.
Je vous propose là encore de retravailler d'ici la séance publique en raison du principe de séparation de l'ordonnateur et du comptable, lequel ne peut pas procéder à un écrêtement.
L'amendement est retiré.
Puis la commission examine l'amendement AS309 de la rapporteure.
La préoccupation soulevée par l'article 10 porte en grande partie sur les plus petits centres hospitaliers, ceux qui sont les plus fragiles, et dont certains recourent beaucoup à l'intérim médical. Je ne souhaite pas qu'une application immédiate de la loi les mette en difficulté et je propose donc de reporter de six mois l'entrée en vigueur de la disposition, ce qui permettra à la fois aux établissements concernés d'anticiper et de s'organiser en conséquence, et aux comptables publics de prévoir le contrôle des dépenses correspondantes.
La commission adopte l'amendement.
Enfin, elle adopte l'article 10 modifié.
Article 11 : Création d'un projet managérial à l'hôpital
La commission examine l'amendement de suppression AS51 de M. Pierre Dharréville.
L'article 11 vise à rendre obligatoire un volet managérial dans le projet d'établissement. Dans le prolongement du new management public, il poursuit ainsi l'introduction des règles du management privé dans la gestion de l'hôpital public. Or, cette vision comptable et gestionnaire est justement à l'origine du malaise hospitalier et de la souffrance des soignants. La raison d'être de l'hôpital public n'est pas la gestion mais le soin, le service au public. Cette méthode de management, qui n'est pas nouvelle, a déjà fait beaucoup de dégâts et, à notre sens, n'est en rien un modèle.
Avis défavorable. Les auditions que nous avons menées montrent que cette mesure symboliquement importante issue du Ségur de la santé et du rapport du Pr. Claris est très attendue.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements AS247 du rapporteur général et AS310 de la rapporteure.
Conformément à la recommandation n° 1 du rapport Claris, il convient de préciser que le projet d'établissement comporte un volet de management mais, aussi, de gouvernance, lequel inclut les modalités de désignation de tous les responsables hospitaliers au sein de l'établissement.
L'amendement AS310 est retiré.
La commission adopte l'amendement AS247.
Elle examine ensuite l'amendement AS292 du rapporteur général.
Lui aussi issu du Ségur de la santé et des propositions de La République en Marche, cet amendement vise à inclure dans le projet d'établissement un volet écoresponsable.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
Elle examine ensite l'amendement AS120 de M. Didier Martin.
Ce projet de gouvernance et de management doit être « participatif ». En effet, il n'est pas possible que, dans la grande communauté des hôpitaux, un petit nombre de personnes commande : cela ne fonctionne pas. Il convient donc d'associer médecins et non-médecins.
Par ailleurs, il convient de préciser à l'alinéa 5 que les objectifs du projet d'établissement doivent être atteints « collectivement » – il n'est pas question de mettre la pression sur tel ou tel individu ou catégorie – et qu'il doit tenir compte des besoins et des attentes « individuels et collectifs ». Le management participatif doit être en effet un outil de développement personnel de chaque agent de la communauté hospitalière et proposer des conditions de travail favorables.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS307 du rapporteur général.
Quasi rédactionnel, il vise à inclure « les valeurs managériales de l'établissement » dans le projet.
Avis défavorable, la notion de « valeurs managériales » n'étant pas très explicite.
L'amendement est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement AS163 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
Il convient de préciser que les formations managériales doivent être obligatoirement dispensées.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS136 de M. Jean-Louis Touraine.
Je propose d'intégrer au projet managérial des mesures de prévention des risques psycho-sociaux. En effet, la qualité de vie au travail est un enjeu important dans les services hospitaliers et le renforcement des compétences managériales doit passer en partie par une meilleure prise en compte du bien-être des équipes soignantes, question que le rapport Claris a mise en évidence : « Les responsables de service et de pôle doivent également être aptes à s'assurer d'actions de prévention des risques psycho-sociaux auxquels sont exposés de manière spécifique les personnels soignants, médicaux et paramédicaux ».
La gestion des risques, y compris psycho-sociaux, relève du projet social de l'établissement, en concertation avec les organisations syndicales, et peut être ensuite intégrée dans le projet d'établissement.
La commission adopte l'amendement.
Enfin, elle adopte l'article 11 modifié.
Chapitre V Simplification et gouvernance des organismes régis par le code de la mutualité
Article 12 : Impossibilité pour les organismes régis par le code de la mutualité de fusionner avec des entités régies par d'autres codes
La commission adopte l'article sans modification.
Article 13 : Possibilité, pour les mutuelles, de recourir aux visioconférences et au vote électronique en assemblée générale
La commission examine l'amendement AS264 de la rapporteure.
Cet amendement de réécriture globale de l'article n'en modifie pas le sens. Il permet aux mutuelles de recourir aux visio-conférences et autres moyens de télécommunications pour leurs réunions d'assemblée générale ; il précise les conditions dans lesquelles le recours à la visio-conférence et au vote électronique doit être opéré et il ouvre la possibilité aux mutuelles de s'opposer, dans leurs statuts, au recours à la visioconférence, aux autres moyens de télécommunication ou au vote électronique.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 13 est ainsi rédigé.
Article 13 bis (nouveau) : Correction d'une erreur rédactionnelle dans le code de la mutualité
La commission examine l'amendement AS149 de M. Philippe Chalumeau.
C'est improprement que la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises (« PACTE ») a introduit le terme de « société » dans le code de la mutualité alors que les organismes régis par ce code ne sont pas des sociétés au sens juridique du terme. Il convient donc de le remplacer par celui de « mutuelle, union ou fédération ».
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
Après l'article 13
La commission examine, en discussion commune, les amendements AS152 de M. Philippe Chalumeau et AS125 de Mme Danielle Brulebois.
Le code de la mutualité prévoit un statut des administrateurs mutualistes afin qu'ils puissent exercer leur mandat dans de bonnes conditions. Aujourd'hui, seuls le président du conseil d'administration et les administrateurs auxquels des attributions permanentes ont été confiées peuvent bénéficier du régime indemnitaire ainsi que, pour les travailleurs indépendants, de la compensation de la perte de salaire. Tous les administrateurs doivent pouvoir bénéficier de ce régime indemnitaire.
Je précise que ce dispositif se ferait à enveloppe constante, celle-ci étant calculée par le décret n° 2010-212 du 1er mars 2010 relatif à l'indemnité des administrateurs des mutuelles disposant que « le montant total des indemnités [...] ne peut excéder celui du total des quinze plus hautes rémunérations versées à ses salariés par cet organisme ». Il s'agit simplement de répartir différemment les indemnités.
Le cadre légal restreint en effet la reconnaissance de l'engagement des administrateurs d'instances mutualistes aux seuls présidents du conseil d'administration et aux administrateurs auxquels sont confiées des attributions permanentes. Or, les mutuelles ont évolué et interviennent de plus en plus largement au bénéfice de la collectivité, de l'intérêt général et de nos concitoyens, ce qui suppose aussi que les administrateurs s'investissent en fonction des projets et qu'ils passent beaucoup de temps sur leurs enjeux.
Dès lors, une distinction entre les administrateurs auxquels sont confiés des attributions permanentes et les autres n'a plus beaucoup de sens, au contraire ! Il importe donc de reconnaître leur engagement, y compris ponctuel ou à temps incomplet. Je pense en particulier à tous les administrateurs qui continuent d'avoir une activité professionnelle principale comme les travailleurs indépendants ou libéraux.
Mon amendement vise donc à supprimer une disposition trop restrictive et permettra en outre d'intégrer dans ce cadre les investissements occasionnels ou à temps incomplet des administrateurs au sein des instances mutualistes. Il contribue ainsi à les encourager à s'engager. Par ce biais, les administrateurs travailleurs indépendants seront éligibles à l'indemnisation.
Avis défavorable, ces amendements étant en contradiction avec le caractère non lucratif des mutuelles même si, je suis d'accord avec vous, l'ensemble des administrateurs des organismes mutualistes doit pouvoir concilier vie professionnelle et engagement mutualiste bénévole.
Le régime indemnitaire est fixé par décret. Je propose simplement de répartir différemment l'enveloppe.
En effet. Cela permettra d'attirer les personnes de bonne volonté qui ne veulent pas pour autant perdre leur journée.
La répartition des indemnités relève de la libre administration des mutuelles. Un tel dispositif ne coûte rien et encourage des travailleurs indépendants à s'engager.
Si l'enveloppe totale des indemnités reste la même, les administrateurs qui ont des fonctions permanentes seront moins indemnisés qu'aujourd'hui, ce qui pourrait perturber la gouvernance et le fonctionnement des mutuelles.
L'enveloppe n'est en effet pas extensible et l'on déshabillerait Pierre pour habiller Paul.
La commission rejette successivement les amendements.
Article 13 ter (nouveau) : Modification des modalités de calcul des indemnités versées aux administrateurs des mutuelles ayant la qualité de travailleurs indépendants
Article 13 quater (nouveau) : Précision des cas dans lesquels les mutuelles sont considérées comme participant à des missions de service public
La commission elle examine les amendements AS126 et AS124 de Mme Danièle Brulebois.
Le principe mutualiste repose sur l'entraide au sein d'un collectif. À la différence d'organismes privés lucratifs, les fonctions d'administrateurs dans les instances de gouvernance des organismes mutualistes sont bénévoles et, à la différence des organismes publics, ces mêmes fonctions sont assurées par des membres du corps social qui compose la mutuelle : les adhérents.
Le code de la mutualité prévoit toutefois que, dans certaines conditions, les organismes mutualistes puissent compenser les conséquences financières pour les administrateurs. Les salaires sont remboursés aux employeurs lorsqu'il s'agit d'administrateurs issus de l'entreprise et une indemnité peut être attribuée aux travailleurs indépendants, laquelle demeure néanmoins encadrée par arrêté du ministre de la santé, ce qui soulève deux problèmes : tout d'abord, son montant ne permet pas de couvrir la perte de ressources et les coûts induits sur l'activité, en particulier lorsqu'il s'agit de professionnels libéraux ce qui, ensuite, restreint l'attractivité pour les indépendants et crée un biais de représentation au bénéfice d'autres catégories socio-professionnelles dans les instances.
Mon amendement AS126 vise donc à corriger ce biais car il n'y a aucune raison de maintenir un tel obstacle à la libre administration et à l'autonomie des structures mutualistes, celles-ci n'étant ni des établissements publics, ni des services publics. Cette forme de tutelle n'a plus lieu d'être.
Les travailleurs indépendants représentent une part importante de notre tissu économique et social et ne doivent pas être exclus des instances de gouvernance. Au contraire, il convient de faciliter leur participation, dans des conditions comparables à celles qui sont réservées aux salariés.
Le code de la mutualité reconnaît aux organismes mutualistes la faculté de mettre en œuvre une action sociale ou de créer et d'exploiter des établissements ou services, de conduire des actions à caractère social, sanitaire, médico-social, sportif ou culturel et de réaliser des actions de prévention, activités réunies sous le vocable « services de soins et d'accompagnement mutualistes ». Au-delà de ses fonctions bien connues de complémentaire santé, le mouvement mutualiste, depuis ses origines, est un acteur de premier plan en matière de soin et d'action sociale. Dans ce domaine, il se caractérise par sa faculté d'initiatives, sa propension à innover et à répondre aux besoins grâce à l'engagement de ce qui le constitue : ses adhérents, ses sociétaires, sa gouvernance et ses ressources.
Comme nous l'avons constaté récemment avec l'épidémie de covid-19 et comme cela nous a été confirmé lors des auditions, l'agilité, la réactivité, le travail en réseaux sont l'ADN du mouvement mutualiste, ce en quoi il contribue sans ambiguïté aucune à la défense de l'intérêt général. C'est ce caractère alternatif, unique en son genre mais indispensable à notre collectivité et à notre paysage médical, que j'entends préserver par l'amendement AS124 visant à confirmer le caractère autonome des services de soin et d'action sociale. Ils ne sont pas des services publics mais une offre de soins privée au service de l'intérêt général et, à ce titre, ils interviennent avec d'autres acteurs privés du secteur sanitaire et social. Mon amendement complète ainsi dans le code de la mutualité la disposition que nous avons adoptée dans le cadre de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (« ASAP ») en supprimant le contrôle théorique de l'État.
La commission adopte successivement les deux amendements.
Chapitre VI Simplification des démarches des personnes en situation de handicap
Article 14 : Création d'une plateforme numérique d'information et de services à destination des personnes handicapées
La commission examine l'amendement AS114 de M. Thibault Bazin.
Cet amendement de clarification vise à mieux articuler les relations entre la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui assure la maîtrise d'œuvre de la plateforme numérique nationale d'information et de service personnalisés.
Défavorable. Je ne vois pas très bien la valeur ajoutée de cet amendement mais nous pouvons en rediscuter d'ici la séance publique.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel AS282 de la rapporteure.
Elle examine ensuite l'amendement AS300 de Mme Annie Vidal.
Cette plateforme à destination des personnes en situation de handicap doit être également accessible à leurs proches aidants et à leurs représentants légaux.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
Puis elle examine, en discussion commune, l'amendement AS230 de Mme Annie Chapelier, les amendements identiques AS169 de la rapporteure et AS298 de M. Didier Martin ainsi que les amendements AS80 de Mme Jeanine Dubié et AS305 de M. Thibault Bazin.
Il convient de s'assurer de l'interopérabilité entre cette plateforme numérique et les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), demande récurrente des usagers que nous avons auditionnés.
La plateforme numérique d'information et de services constituera une réelle avancée pour les personnes en situation de handicap à condition de respecter l'exigence d'accessibilité à destination de ces personnes, telle que définie à l'article 47 de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des chances. Il importe de rappeler cet impératif d'accessibilité, qui doit être au cœur de ce projet numérique. Il en va de même pour l'exigence d'interopérabilité, nécessaire pour garantir une bonne articulation de cette plateforme avec les services numériques existants.
Il importe en effet que cette plateforme numérique garantisse l'égalité des droits et des chances, l'interopérabilité et la sécurité.
L'excellent amendement de Mme Chapelier prévoit une interopérabilité avec les MDPH mais cet amendement, cosigné par Mme Dubié, l'étend en outre à la caisse d'allocations familiales, à la caisse primaire d'assurance maladie, à l'URSSAF, au chèque emploi service universel, à France Connect et au DMP. Je sais que Mme la rapporteure est très attachée à l'interopérabilité, comme l'avons constaté encore hier soir dans l'hémicycle.
Je suis favorable à l'amendement de M. Martin, identique au mien, et je vous prie de bien vouloir retirer les autres à son profit car il les satisfait plus largement.
Les amendements AS230, AS80 et AS305 sont retirés.
La commission adopte les amendements identiques AS169 et AS298.
Elle examine ensuite l'amendement AS299 de M. Thierry Michels.
Cette plateforme numérique est une belle avancée pour la simplification de l'accès au droit des personnes handicapées. L'amendement que je défends au nom du groupe La République en Marche vise à renforcer ce dispositif en le complétant par la prise en compte du retour d'expérience des personnes handicapées qui l'utilisent.
En prenant en compte leurs remarques, il s'agit de faciliter encore plus l'utilisation de la plateforme, quel que soit le handicap. Rappelons-le : « Rien pour nous sans nous ». Avec cet amendement, nous réaffirmons l'importance de mettre les personnes handicapées au cœur des politiques publiques et des lois que nous votons.
Suivant l'avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS238 de Mme Michèle de Vaucouleurs.
Il convient d'inscrire dans cet article le principe de complémentarité de cette plateforme avec les structures de proximité telles que les MDPH ou les maisons de l'autonomie.
Il me semble satisfait mais, s'il rassure, je m'en remets à la sagesse de la commission.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS239 de Mme Michèle de Vaucouleurs.
Pour se prémunir de certaines évolutions possibles de la plateforme, il serait souhaitable qu'elle ne propose pas un service unique lorsqu'il existe une offre alternative ou concurrentielle.
Je peux comprendre qu'il doive être réécrit ou précisé mais son objectif mérite d'être inscrit dans le « dur » de la loi. Si vous le souhaitez, nous pouvons y travailler ensemble en vue de la séance publique.
Je suis favorable au principe du maintien de la possibilité de l'accueil physique pour les démarches des personnes handicapées mais je ne suis pas favorable à ce que la plateforme s'inscrive dans un cadre juridique flou.
Comme je l'ai dit pour votre précédent amendement, il existe déjà des dispositions législatives qui garantissent qu'on ne passera pas au « tout numérique » pour les démarches et l'orientation des personnes handicapées. Je crois que telle était votre inquiétude.
Pas tout à fait avec cet amendement. En l'occurrence, les orientations ou les prescriptions qui figureront sur cette plateforme, par exemple vers une structure d'accueil, un hébergement ou un service, doivent l'être uniquement dans le cadre d'une démarche administrative obligatoire ou faute d'alternative. La plateforme ne doit pas proposer automatiquement tel service ou telle prestation en fonction des informations qui ont été fournies par l'usager.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine les amendements AS164 et AS306 de M. Cyrille Isaac-Sibille.
Si l'interopérabilité est essentielle, il ne sert à rien de multiplier les outils. Je tiens donc à préciser à l'alinéa 2 que cette plateforme ne contient que des données administratives et non pas médicales, lesquelles relèvent du dossier médical personnalisé. S'il devait en être autrement, nous aurions de surcroît des problèmes avec la CNIL. Les systèmes d'information, dans notre pays, sont déjà très nombreux !
Le deuxième amendement dispose quant à lui que « la plateforme numérique nationale d'information et de services personnalisés ne contient aucune donnée de santé ».
Avis défavorable.
L'interopérabilité fait partie des objectifs de cette plateforme. Il n'est pas possible d'opérer un tel cloisonnement. J'ajoute que la notion de données « administratives » n'est pas juridique.
Je suis prêt à retirer mon premier amendement mais le second est essentiel. Nous refaisons en permanence des systèmes d'information : ne multiplions pas les bases de données numériques de santé ! 2 milliards d'euros ont été affectés au développement de la chaîne du DMP, nous avons déjà un coffre-fort sécurisé, et il me semble invraisemblable d'en créer un autre ! Oui à l'interopérabilité, car la plateforme doit pouvoir intégrer des informations qui, avec l'autorisation de la personne en situation de handicap ou de sa famille, proviennent du DMP, mais ne créons pas un deuxième coffre‑fort ! Cela reviendrait à marcher sur la tête.
Il ne s'agit pas d'un outil supplémentaire mais d'une simplification. Les personnes en situation de handicap ont déjà une plateforme à leur disposition mais elle ne répond pas à leurs attentes. Cette plateforme n'est pas un coffre-fort contenant des données de santé.
L'exigence d'interopérabilité est réelle, notamment avec les nouveaux systèmes d'information de la MDPH, afin de simplifier les démarches administratives.
Cette plateforme intègrera les données des MDPH et n'est en rien un nouvel outil de stockage des données de santé. Elle rassemble les données mais elle ne les crée pas.
C'est tout le problème des données de santé, qui sont sensibles et qui n'ont pas besoin d'être centralisées. Il n'est pas possible de mentionner sur cette plateforme telle ou telle pathologie au vu et au su de tous. Si elle doit intégrer des données de santé, ces dernières doivent l'être dans un coffre-fort, lequel fera double emploi alors que l'interopérabilité vise précisément à éviter la création d'outils supplémentaires.
Cette plateforme organise l'interconnexion des données et n'est en rien un outil : elle organise leurs croisements. Il n'est pas question de créer un nouveau DMP.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle examine ensuite l'amendement AS231 de M. Philippe Vigier.
L'habilitation de la CDC à gérer cette nouvelle plateforme doit pouvoir faire l'objet d'un agrément de la Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM), sinon, il faudra prévoir des modes de cryptage et des modes dégradés en fonction des prescripteurs. On ne peut en effet penser, d'un côté, que les data sont précieuses et confidentielles et, d'un autre côté, les laisser en accès libre.
L'article 14 vise justement à habiliter la CDC à gérer cette plateforme car elle est l'opérateur adéquat pour mener à bien cette mission : elle a en effet une expérience dans la gestion de plateformes numériques avec « Mon compte formation » et assure un haut niveau de sécurisation des données.
Par ailleurs, une habilitation par la CNAM laisserait entendre que la plateforme ne gèrerait que des données de santé ; or ce n'est pas le cas puisqu'elle accompagnera les personnes en situation de handicap pendant tout leur parcours et qu'elle gérera aussi des données relatives au handicap, à la formation, à l'emploi, à la scolarisation, etc. Je suis donc défavorable à votre amendement.
Qui mieux que la CNAM peut connaître l'ensemble des éléments concernant les assurés ? Ceux qui font la nomenclature feront en sorte qu'elle soit respectée.
Je suis toujours prudent avec les plateformes numériques. Nous avons constaté récemment combien les choses peuvent se compliquer et combien la tentation est forte de récupérer des data. À un moment ou à un autre, des assureurs peuvent par exemple entrer dans le champ du traitement et les utiliser. Je suis favorable à l'interopérabilité et à l'organisation des interconnexions mais, ensuite, les modes de protection et les modes dégradés doivent être au rendez-vous.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement AS229 de Mme Annie Chapelier.
Le Gouvernement doit remettre au Parlement un rapport présentant un bilan d'étape de la feuille de route MDPH 2022, les auditions ayant montré combien leur déploiement est hétérogène.
Mme Vidal ayant évoqué l'existence d'une autre plateforme, inefficace et inopérante, pourquoi ne précise-t-on pas qu'elle est supprimée au bénéfice de celle-ci ?
J'ajoute que le terme de « plateforme » a bien été retenu, même si je peux entendre que celle-ci organise en fait l'interconnexion des données.
« Mon parcours handicap » constitue la première brique de cette plateforme. Notre idée est de poser une brique après l'autre. Un véhicule législatif était nécessaire afin que la CDC puisse gérer une plateforme qui contiendra des données de santé.
J'ajoute que Sophie Cluzel, secrétaire d'État auprès du Premier ministre chargée des personnes handicapées, a installé un comité stratégique afin de suivre le déploiement de la feuille de route MDPH 2022, qui intègre une importante dimension numérique. Un rapport ne me paraissant pas nécessaire en l'état, je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 14 modifié.
Article 15 : Gage de recevabilité
La commission adopte l'article 15 sans modification.
Je précise que le groupe Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés n'ayant pas reçu des éclairages suffisants sur les articles 7 et 14, il s'abstiendra.
La commission adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La réunion s'achève à dix-neuf heures cinquante.