Je n'ai pas la réponse.
S'agissant de la question sur la lenteur et les moyens en place, au rythme de ces derniers jours, nous serons capables de vacciner un million de personnes en janvier. Hier, 50 000 personnes ont été vaccinées. Nous disposons de 300 centres, lesquels seront au nombre de 600 en fin de mois. La vaccination dans les maisons de retraite s'accélère. De nombreux éléments laissent penser qu'un million de personnes, voire davantage, seront vaccinées à la fin du mois. Il est évident que la France a démarré plus doucement que l'Allemagne et d'autres pays européens. Je pense que la comparaison doit s'établir avec les pays de l'Union européenne car nous avons reçu les vaccins en même temps et dans les mêmes quantités rapportées au nombre d'habitants. La France, peut-être de façon trop stricte initialement, a prioritairement mis en avant la vaccination des résidents et du personnel des maisons de retraite, ce qui relève d'une stratégie ambitieuse, mais complexe car elle nécessite de livrer des vaccins dans 14 000 établissements en France. Contrairement à l'Allemagne – et je défends la position française qui a été décidée bien avant que j'entre dans la réflexion sur ces questions – la France a décidé d'apporter le vaccin aux sujets à vacciner plutôt que le contraire. L'Allemagne transporte des résidents de maison de retraite dans des autobus vers les centres de vaccination. Je respecte ce choix qui est certainement plus efficace en termes de rapidité, mais qui peut poser problème sur le plan éthique. La contrainte supplémentaire est que ce choix ralentit la vaccination, mais, au moins, nous sommes extrêmement solides.
Dès qu'il était clair que la vaccination serait faisable et sûre à travers l'expérience française et internationale, il y avait toutes les raisons d'accélérer, ce qui a été fait à partir des derniers jours de décembre, même si certains éléments étaient trop complexes et surinterprétés. Nous avons formulé des propositions sur la simplification de la vaccination en supprimant le concept de consultation prévaccinale, qui crée le doute et complique le processus. Une vaccination peut être effectuée sur la base d'un questionnaire et d'une consultation auprès d'un médecin en présence d'une réponse posant un problème médical. Si tout est clair et que la personne ne souhaite pas particulièrement rencontrer un médecin préalablement, elle peut être vaccinée immédiatement après. Cette mesure de simplification qui était nécessaire permet une accélération. Il n'est pas scandaleux qu'une organisation aussi complexe nécessite des ajustements, lesquels ne seront pas les derniers.
Il me semble que le train est désormais sur ses rails, mais l'évaluation ne pourra intervenir qu'après quelques mois. Certains pays européens, comme la Belgique et les Pays‑Bas, ont commencé après la France.
Les élus locaux s'estiment insuffisamment associés à la mise en route de la vaccination. Or, à travers l'Association des maires de France, l'Association des départements de France et Régions de France, ils sont en interaction extrêmement fréquente avec le cabinet du ministre. Je l'ai également été à titre personnel. Les agences régionales de santé (ARS) sont en contact avec les élus locaux, lesquels jouent un rôle majeur. Je ne vois pas ce qui s'oppose à l'instauration de la meilleure collaboration possible entre l'organisation de santé et les élus locaux pour créer et organiser au mieux ces centres de vaccination au niveau local en étant aidé pour obtenir le personnel adéquat et assurer les livraisons. Ont été évoquées des difficultés autour des seringues et des aiguilles, mais la France dispose de suffisamment de matériel pour éviter la pénurie. Il s'agit d'un enjeu important et les élus locaux sont parfaitement légitimes à évoquer ce sujet et à agir en interaction avec les ARS.
J'ignorais que la direction générale de la santé avait eu recours à quatre cabinets. S'agissant d'une démarche qui a été effectuée à grande distance de moi, je ne la commenterai pas particulièrement.
Le nombre d'enfants contaminés est supérieur en Angleterre, ce qui n'est pas forcément lié au variant anglais. L'analyse est complexe dans ce pays qui fait face à une flambée de covid avec le virus variant et non variant. Il convient d'attendre d'être plus informés pour conclure sur cette question.
Le processus et les conditions de fabrication sont absolument de même nature et sont évalués par les agences réglementaires de la même façon que pour les vaccins classiques. Aux États-Unis, cent personnes de la Food and Drug Administration ont été affectées à l'examen du dossier de Pfizer, qu'il s'agisse de la qualité du produit, des modalités de fabrication, des informations de composition, des essais précliniques, des informations sur les essais cliniques sécurité et efficacité, et du process de fabrication. L'évaluation a été accélérée au regard de l'urgence de la pandémie, mais par cent personnes. Il doit en être de même au niveau de l'Agence européenne. Je vous assure que les processus d'évaluation suivis par les agences réglementaires européenne, britannique, américaine, canadienne, etc. ont donné lieu à des avis convergents selon des critères extrêmement stricts.
Les Anglais utilisent l'expression « to cut the corners », c'est-à-dire « couper les coins », pour qualifier les actions menées de manière accélérée. Nous n'avons aucunement coupé les coins, ce que pourront confirmer un très grand nombre de scientifiques qui ont été impliqués dans l'évaluation. L'analyse bénéfice-risque montre des chiffres extrêmement impressionnants en termes de bénéfice et de très faibles risques. Nous connaissons le risque d'hypersensibilité une fois sur cent mille, essentiellement chez des personnes qui présentent des antécédents détectables par interrogatoire avant vaccination et qui peuvent être traitées. Aucun décès n'est associé au vaccin sur les vingt millions de personnes vaccinées dans le monde à ce jour.
Vous suggérez que les nouveaux variants sont liés à la vaccination, ce qui est totalement inexact. Ces variants étaient présents avant le début de la vaccination. Au regard du faible nombre de personnes vaccinées, nous ne voyons pas comment ces vaccins pourraient entraîner une pression de sélection sur les variants. Nous savons que le variant britannique est présent en Grande-Bretagne depuis au moins deux à trois mois, même s'il a mis du temps à émerger. Le vaccin n'a joué absolument aucun rôle en la matière. Il est vrai que nous pouvons imaginer qu'un vaccin exerce un jour une pression de sélection et fasse émerger un variant qui nécessiterait une modification des vaccins, mais, en l'état, les différents variants qui arrivent en Grande-Bretagne, en Afrique du Sud et au Japon sont naturels. Ces virus mutent constamment. Certains peuvent être éventuellement sélectionnés. À ce stade, nous n'avons pas la certitude que ces variants sont plus contagieux, même si cela est possible, ce qui implique la plus grande vigilance.
En Israël, 18 % des sujets qui ont fait l'infection avaient reçu la première dose de vaccin, ce qui corrobore les résultats des essais cliniques. Il a été montré que la protection débute douze jours après la vaccination. Par conséquent, il est clair que la grande majorité des 18 % de sujets ont été contaminés un, deux, trois ou cinq jours après le premier vaccin, ce qui est attendu. Ces chiffres n'apportent aucune information supplémentaire que de confirmer le résultat des essais cliniques. La situation serait problématique si elle était observée chez des sujets vingt jours après le premier vaccin et, a fortiori, après la seconde dose.
Il n'existe pas de traitement précoce contre le SARS-CoV-2 à ce jour.
Les essais cliniques ne comptent que quelques centaines de personnes âgées de plus de 75 ans, ce qui ne permet pas de montrer un bénéfice de façon statistique. Néanmoins, nous n'avons eu aucun cas d'infection chez ces personnes. Des essais cliniques qui porteraient sur des milliers, voire des dizaines de milliers de personnes âgées de plus de 75 ans sont infaisables pour des raisons pratiques et éthiques. Nous sommes obligés d'émettre l'hypothèse selon laquelle si le vaccin est efficace jusqu'à 75 ans, ce qui est indiscutablement montré, il existe un fort espoir de protéger les personnes âgées de plus de 75 ans. Au regard de leur risque de mourir, il serait non éthique de ne pas leur proposer la vaccination en priorité.
Les mutations du virus de la grippe diffèrent de celles des coronavirus. Le virus de la grippe excelle dans la recombinaison entre souches virales différentes avec, par exemple, un morceau de virus humain et un virus aviaire. Nous voyons émerger des virus franchement différents à l'égard desquels nous n'avons pas ou moins d'immunité. Les vaccins ne sont pas très efficaces, ce qui explique que, chaque année, émergent des virus relativement différents qui imposent de revacciner annuellement, de surcroît avec des vaccins qui ne sont pas très efficaces. Les coronavirus mutent comme tous les virus, notamment les virus ARN, mais ils ne semblent pas recombiner de cette façon ou très rarement. Nous pouvons espérer ne pas voir émerger de résistance ou de semi-résistance au vaccin par ce mécanisme. La comparaison avec les vaccins grippaux n'est probablement pas pertinente sous réserve de l'état des connaissances.
Il est vrai que les Allemands ont commencé la vaccination plus tôt que les Français et sont plutôt bien organisés, mais ils ont choisi de transporter les personnes âgées vers les centres de vaccination, ce que je respecte, mais qui ne me paraît pas optimal. Nous payons le prix d'une vaccination plus lente, mais que je trouve relativement acceptable.
Je ne suis pas spécifiquement informé de la situation des Alpes-Maritimes et de la ville de Nice. Dans la mesure du possible, il faut une adéquation du nombre de centres, lesquels sont parfois trop nombreux, et un nombre suffisant de doses par site. Les centres peuvent organiser des équipes mobiles pour vacciner les personnes âgées à domicile. Les élus locaux, qui connaissent leurs populations, peuvent les contacter, voire les déplacer. Ils jouent un rôle majeur.
Après la première injection, à partir de J12, où la protection commence, jusqu'à J21, le niveau de protection est de 86 %. La seconde dose protège à 95 %. Ne pas injecter la seconde dose serait de la folie car, même si nous ne disposons pas des informations à ce jour, il est plus que probable qu'elle permette un effet boost qui favorise une réponse immunitaire plus forte et plus durable. Son retardement fait l'objet de discussions en fonction de l'augmentation du nombre de cas car il permettrait de vacciner davantage de personnes, lesquelles devront néanmoins recevoir la seconde dose à terme. Une réflexion est en cours dans une volonté de politique commune européenne. À ce jour, aucun pays n'a franchement décidé de retarder la seconde dose. En tout état de cause, il convient de ne pas dépasser six semaines de délai et il faut absolument que la seconde dose soit injectée.
Chacun souhaite que les professionnels de santé, y compris les personnes exerçant des fonctions médico-sociales, soit un peu plus de 2 millions de personnes, puissent être vaccinées. La vaccination est ouverte à 1,2 million de ces personnes. Nous souhaitons accélérer en incluant les libéraux, notamment de plus de 50 ans. Parallèlement, des millions de Français présentent un risque élevé de mourir du covid et d'être hospitalisés. En fonction des doses de vaccins disponibles, je pense que cette population sera relativement vite concernée, ce qui fait partie de la réflexion qui a cours en parallèle selon les préconisations de la HAS avec les personnes âgées de 65 à 74 ans. J'espère qu'il sera rapidement possible de vacciner tous les professionnels de santé, ce qui est difficile dans l'immédiat avec 2,5 millions de doses disponibles en janvier.
Il convient d'être vigilant vis-à-vis des variants, lesquels ne sont pas plus sévères. Il n'est pas certain qu'ils soient plus infectieux. Ils impactent le diagnostic car il faut modifier les tests. À ce stade, je dirais qu'ils n'impactent pas la vaccination, mais ce sujet est à suivre de très près.