Intervention de Cyrille Isaac-Sibille

Réunion du mercredi 20 janvier 2021 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCyrille Isaac-Sibille, rapporteur :

Cette proposition de loi relative à la création de points d'accueil pour soins immédiats (PASI) a été adoptée en première lecture par notre assemblée, à l'unanimité et avec l'avis favorable du Gouvernement, le 28 novembre 2019. Enrichie par la commission des affaires sociales du Sénat avant d'être, malheureusement, rejetée en séance publique, elle revient pour examen en deuxième lecture devant notre commission, ce dont je me réjouis.

Cette proposition de loi répond à une demande pressante de nos concitoyens de pouvoir être soignés rapidement pour des blessures accidentelles, telles des plaies ou des entorses, sans avoir à attendre des heures aux urgences, alors qu'ils pourraient être traités en soins de proximité. S'appuyant sur des expérimentations menées sous différentes appellations sur le territoire national de façon concluante, elle ne crée aucun dispositif. Elle ne vise qu'à labelliser et à identifier ces PASI comme outils mis à la disposition de la médecine ambulatoire de ville pour répondre de manière coordonnée à la demande des patients. Elle n'impose rien, sinon que ces soins soient facturés aux tarifs remboursés par la sécurité sociale, sans reste à charge. Enfin, elle permet d'apporter une réponse, certes modeste, aux difficultés que connaissent aujourd'hui nos services d'urgences.

En vingt ans, les passages enregistrés dans les services d'urgence ont crû de 10 millions à plus de 21 millions en 2017. Ce phénomène met en évidence une demande de plus en plus importante de soins non programmés, pour diverses raisons : vieillissement de la population, manque de disponibilité de médecins libéraux, exigence, de la part des patients, d'une réponse immédiate en termes de diagnostic et de prise en charge globale.

Il ressort des enquêtes menées ces dernières années par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques que près de 60 % des patients se rendent aux urgences, non en raison d'une urgence vitale ou d'un état grave, mais parce que les soins y sont plus accessibles et qu'ils peuvent y subir des examens complémentaires ou consulter immédiatement un spécialiste. C'est que la médecine de ville ne répond pas à leurs besoins. Les heures d'attente qu'ils passent aux urgences sont, malgré tout, autant de temps de gagné par rapport au circuit ambulatoire normal qui les oblige à prendre plusieurs rendez‑vous successifs – généraliste, biologiste, radiologue ou autres spécialistes –, qui seront nécessairement étalés sur plusieurs semaines, avant d'avoir une réponse définitive à leurs affections, diagnostic posé et traitement défini. Sans compter la perte de temps de travail.

Cette proposition de loi entend apporter sa pierre à cette problématique, en s'inscrivant dans l'édifice plus large du pacte de refondation des urgences et de la construction du futur service d'accès aux soins, qui est en cours de déploiement sur nos territoires. Une pierre modeste, certes, mais toutefois essentielle pour nos concitoyens par son caractère opérationnel.

Elle s'inspire d'une initiative développée en région Auvergne-Rhône-Alpes, à travers la création de structures dans lesquelles les médecins généralistes reçoivent sans rendez-vous des patients dont l'état nécessite des soins immédiats sans urgence vitale, durant la journée. Y sont pratiqués des actes de premier recours, grâce à un plateau technique léger, ainsi que des examens complémentaires, biologiques ou radiologiques, permettant d'orienter vers un spécialiste ou un hôpital, si nécessaire.

Le texte prévoit que ces structures soient normalisées par un cahier des charges, et clairement identifiées, sous l'appellation de point d'accueil pour soins immédiats, par un label PASI associé, par exemple, à une croix orange, complémentaire des croix vertes des pharmacies et rouges des urgences. Les PASI pourraient ainsi mailler le territoire d'une offre de soins non programmés graduée.

Le cahier des charges, défini par un arrêté du ministre de la santé, prévoira l'obligation de disposer d'un plateau technique d'imagerie et de biologie médicale, ou d'y avoir un accès à proximité. Les PASI devront également faire partie du projet territorial de santé (PTS) ou être pris en compte dans le projet de santé d'une ou plusieurs communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). En attendant qu'une CPTS soit constituée, le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) pourra labelliser un PASI existant, pour l'intégrer ensuite au projet de santé de la CPTS. Enfin, et c'est très important, les PASI devront mettre en œuvre le tiers payant et ne pas pratiquer de dépassement d'honoraires. En cas d'orientation du patient vers une autre structure de soins ou vers un professionnel de santé extérieur au PASI, une information devra lui être fournie sur la pratique ou non, par l'offreur de soins, du dépassement de tarifs et du mécanisme du tiers payant.

Je tiens à souligner la qualité du travail réalisé en commission par le Sénat, sous l'impulsion de la rapporteure de ce texte, notre collègue sénatrice Élisabeth Doineau. Je vous proposerai, d'ailleurs, de reprendre deux amendements adoptés à son initiative. Ils permettront de mettre l'accent sur la nécessaire complémentarité des PASI avec l'offre de soins présente dans le territoire, afin d'éviter toute concurrence entre les acteurs de santé ; d'ouvrir aux PASI la possibilité d'être des lieux privilégiés de déploiement des protocoles de coopération ; de mieux les positionner au sein du parcours de santé par l'information du médecin traitant si celui-ci est extérieur à la structure.

Ainsi enrichie dans le cadre d'un dialogue nourri entre nos deux assemblées, je ne doute pas que cette proposition de loi recueillera, comme en première lecture, l'approbation à l'unanimité de notre commission, puis de notre assemblée.

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