Intervention de Corinne Dromer

Réunion du mercredi 20 janvier 2021 à 15h00
Commission des affaires sociales

Corinne Dromer, présidente du Comité consultatif du secteur financier (CCSF) :

Je ne m'occupe en fait pas du tout d'AERAS puisque le CCSF est une instance de concertation qui réunit des banquiers, des assureurs, les consommateurs, les syndicats représentant le personnel de ces établissements. Je peux toutefois vous indiquer que le CCSF a été saisi de ce sujet mais sous un angle un peu particulier, celui du taux de l'usure.

Nous avons en France un taux de l'usure pour protéger les consommateurs. Il est publié tous les trimestres par la Banque de France et se décompose selon des tranches soit de crédit de consommation avec trois tranches selon le montant soit, au-delà de 75 000 euros, de crédit immobilier avec à nouveau trois tranches qui dépendent de la durée pour les taux fixes – moins de dix ans, entre dix et vingt ans, plus de vingt ans – et un taux de l'usure pour les prêts à taux variable.

Pour déterminer le taux de l'usure, il faut déterminer le taux effectif global – comprenant les intérêts, les frais de dossier et l'assurance – à partir duquel est calculé un taux effectif moyen auquel il faut rajouter un tiers. Par exemple, dans le cas d'un crédit à la consommation dont les taux sont relativement élevés, avec un taux effectif moyen qui correspond aux taux constatés actuellement de 7,5 %, le taux de l'usure est de 9,97 % donc assez élevé. En revanche, dans les crédits immobiliers, avec un prêt à taux fixe d'une durée de vingt ans ou plus et un taux effectif moyen de 2 %, le taux de l'usure est de 2,67 %.

Un certain nombre de courtiers membres du CCSF ont saisi le Comité en disant avoir un problème pour l'accès au crédit des personnes qui ont soit un problème de santé – pas forcément inclus dans AERAS – soit un problème d'âge car le taux de l'assurance emprunteur est plus élevé. Le taux de l'usure étant aujourd'hui extrêmement bas, puisqu'il y a 67 points de base entre le taux moyen et le taux de l'usure, il est difficile d'accorder un crédit à ces personnes, sachant qu'un banquier ne peut pas accorder un crédit lorsque le taux de l'usure est dépassé. C'est du pénal, passible de prison.

Comme nous le faisons toujours, nous avons mis la question sur la table en essayant d'être à la fois imaginatifs, créatifs et surtout concrets. Nous avons imaginé diverses propositions dont une visant à conserver le taux de l'usure tel qu'il est mais, en cas de dépassement uniquement lié au coût de l'assurance, à accepter un dépassement évidemment limité. Nous avons eu deux réunions sur ce sujet sans parvenir à un consensus entre toutes les parties pour deux raisons.

La première est que nous n'avons pas réussi à évaluer combien de personnes étaient concernées. En fait, nous ne savons pas combien de personnes ayant des soucis de santé ou d'âge ont des difficultés d'accès au crédit pour cette raison et les courtiers n'ont pas été capables de nous indiquer le pourcentage des demandes de crédits concernées. Une des raisons pour lesquelles nous ne le savons pas est que les personnes constatant sur des sites tels que Meilleur Taux qu'elles seraient au-delà du taux de l'usure peuvent très bien ne pas aller voir leur banquier et ne même pas engager un processus de demande de crédit.

La seconde raison qui nous a empêché de parvenir à un consensus est que les associations de consommateurs étaient très divisées sur le sujet. En particulier, deux associations importantes ont considéré qu'il ne fallait pas du tout toucher au taux de l'usure pour ne pas faire peser un risque sur ce taux de l'usure, très important pour protéger les consommateurs.

Tant que les taux nominaux resteront très bas, le taux de l'usure sera très bas et pourra donc être un blocage pour certaines personnes.

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