Plusieurs études économiques mettent en lumière un creusement des inégalités salariales ces dernières années. Ce phénomène s'est accentué de façon assez importante sous l'effet de la crise de la covid-19. Paradoxalement, la pandémie nous a poussés à nous interroger sur la juste rétribution des professions en première ligne, qui sont loin d'être les mieux rémunérées. La présente proposition de loi pose donc la question de la place des salariés dans le partage de la valeur. Elle soulève des enjeux économiques, sociaux et sociétaux. Aussi le groupe Libertés et Territoires rejoint-il la position du rapporteur : agir sur les inégalités au sein de l'entreprise constitue un véritable outil de justice sociale.
Face au scandale des rémunérations de dirigeants de grands groupes, plusieurs propositions de loi ont été déposées pour encadrer les rémunérations au sein des entreprises ou en limiter les écarts. L'une d'elles, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, avait été adoptée en 2016 mais sa principale disposition, visant à imposer un écart maximum de salaire de 1 à 20, avait été rejetée à une voix près. Pour autant, si l'indécence de certaines rémunérations peut légitimement choquer, la fixation de mécanismes contraignants de modération des écarts salariaux se heurte au principe de liberté de fixation du salaire, lequel est limité s'agissant des minima mais pas s'agissant des maxima.
L'article 1er de la proposition de loi contourne cette difficulté en recourant à un dispositif incitatif pour privilégier des écarts de rémunération compris dans un ratio de 1 à 12, et en alourdissant la fiscalité au-delà. Cependant l'article 2 sur le plafonnement des très hautes rémunérations ne nous semble malheureusement pas être conforme à la Constitution, comme le reconnaît d'ailleurs l'exposé des motifs. Enfin, dans le cas, hélas improbable, où cette proposition de loi serait adoptée, on pourrait s'interroger sur les éventuelles failles qui permettaient de contourner le dispositif, comme les dons d'actions.
Merci pour la très belle phrase de l'abbé Pierre que vous avez rappelée.