Intervention de Dominique Potier

Réunion du mercredi 10 février 2021 à 14h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier, rapporteur :

Monsieur Michels, la proposition de loi ne crée pas de charge supplémentaire. Le mécanisme fiscal est d'une extrême simplicité – les experts-comptables ont parlé d'un « jeu d'enfant ». Quant au plafonnement de 1 à 20, il est aussi très simple. Notons que, pour 90 % des entreprises, le plafond de rémunération est le même avec un ratio de 1 à 20 SMIC qu'avec 1 à 12 du premier décile, car ceux qui gagnent 1 500 euros le tirent un peu vers le haut. Dans les réunions locales, chez nous, l'idée est populaire : on me dit que j'aurais plutôt dû choisir un plafond de 1 à 6. Je suis prêt à en discuter, l'important est que l'on en parle. Si le bon chiffre est 10, nous le mettrons. Je n'ai pas de dogme sur ce sujet.

Pierre Dharréville l'a dit, nous avons joué le jeu dans la loi « PACTE », par exemple lorsqu'il s'agissait de donner des capacités, des facultés. Vive l'entreprise qui se remet en cause, qui bouge ! Mais ne dites pas que la loi contient la moindre mesure à caractère obligatoire. Ce serait un mensonge : dans la loi, il n'y a rien qui conduise à réduire les inégalités.

Vous dites que vous vous êtes occupés des écarts de rémunération pour les patrons du CAC40. La loi « PACTE » a prévu une obligation de ratios d'équité. Les travaux que j'ai menés avec Graziella Melchior ont montré qu'elle n'était pas appliquée, car les questions liées aux groupes ou holdings n'étaient pas réglées. En conséquence, les entreprises s'asseyaient sur les obligations qui leur avaient été faites. Le peu de transparence demandé était largement insuffisant – ma collègue était d'accord avec moi pour étendre la transparence de publication des écarts au centile dans les entreprises de plus de cinq cents salariés. Vous l'avez compris, on n'obtient pas 0,32 % de Français gagnant plus de douze fois le SMIC en demandant la publication des écarts au quartile. Avec cela, on n'y voit rien du tout. Rappelons que huit Français sur dix gagnent entre le SMIC et 3 000 euros, et que le revenu médian est à 1 700 euros. Nous sommes dans des vertiges que ne peuvent pas saisir les efforts de transparence, d'ailleurs non appliqués, qui ont été votés dans la loi « PACTE ». Chaque fois que la majorité dira que cette loi a fait le boulot, nous répondrons que c'est faux : la loi « PACTE » a esquissé ce que pourrait être une réforme en autogestion de l'entreprise, mais elle ne crée rien, ni transparence réelle, ni obligation de réduire les inégalités. Cette loi ne doit pas être un paravent. Il faut se dire la vérité. C'est ce que nous essayons de faire à travers ces chiffres.

Aujourd'hui, 4 millions de Français qui travaillent sont privés de 15 % de leurs revenus par le monopole de 0,32 % des Français qui gagnent au-delà de douze fois le SMIC. C'est la réalité ! J'ai travaillé dans des entreprises où le rapport était de 1 à 1 ou de 1 à 1,5. Je refuse de penser que l'entreprise coopérative où je travaillais était moins compétitive que l'entreprise capitaliste voisine, où les écarts étaient de 1 à 10, sans que l'on sache au nom de quoi. C'est une question éthique, sociale, économique. Ne nous racontons-pas d'histoire !

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