Intervention de Katia Julienne

Réunion du jeudi 11 février 2021 à 16h00
Commission des affaires sociales

Katia Julienne, directrice générale de l'offre de soins :

Concernant le soutien de la population, je me limiterai aux compétences de la DGOS. Il s'agit en effet d'un sujet important pour nous, notamment dans le champ de la santé mentale. Ce sujet fait partie de ceux sur lesquels nous travaillons avec la nouvelle commission nationale sur la psychiatrie et la santé mentale. Il fera sans doute également partie des sujets qui seront abordés dans le cadre de la préparation des Assises de la psychiatrie et de la santé mentale annoncées récemment par le Président de la République.

Au sujet de la chronicisation du virus, nous devons travailler, d'une part, à une adaptation rapide de notre système de santé nous permettant de prendre en charge un afflux de patients covid, quelles que soient les modalités de prise en charge – soins critiques, hospitalisation conventionnelle, médecine de ville. D'autre part, nous devons l'adapter pour qu'il puisse absorber des flux de patients supérieurs et faire ainsi face à une activité en accordéon. Pour répondre aux problématiques de court terme, nous formons des professionnels aux soins critiques, qui restent affectés en permanence à ces services. Dans une optique de plus long terme, nous devons préparer l'augmentation du nombre de personnes formées dans les instituts de formation en soins infirmiers, car nous avons besoin d'un plus grand nombre de professionnels. Cette mesure est d'ores et déjà prise pour la rentrée prochaine.

Nous réfléchissons également, avec les deux CNP de médecine intensive réanimation et de médecine anesthésie réanimation, au bon niveau de capacité en soins critiques, et singulièrement en réanimation. Sur ce point, je reste prudente quant aux comparaisons internationales, notamment avec les pays de l'OCDE, compte tenu des écarts de périmètre entre les soins critiques et la réanimation. Il n'en reste pas moins qu'il nous faut travailler sur la question des déterminants du bon niveau de capacité en soins critiques, incluant la réanimation, et de sa répartition sur le territoire. Plusieurs d'entre vous ont évoqué la situation de l'outre-mer. Ce sujet fait partie de ceux que nous devons examiner. Les travaux doivent démarrer prochainement, l'objectif étant de les finaliser à l'été 2020.

Concernant l'oxygénothérapie, vous avez évoqué le rôle des EHPAD. Je partage votre point de vue. Il est en effet très important que ces établissements disposent de matériel d'oxygénothérapie, tout comme les soins de suite et de réadaptation, qui ont joué un rôle fondamental dans plusieurs régions, et la médecine de ville.

Au sujet de la médecine de ville, il est vrai que l'activité a considérablement baissé lors de la première vague. En revanche, nous constatons un bon maintien d'activité de l'ensemble des professionnels en ville, auprès des patients covid et non‑covid, au second semestre 2020.

Vous m'avez interrogée à plusieurs reprises sur les données disponibles concernant la déprogrammation. Nous disposons, depuis quelques jours, de données globales sur la période allant de janvier à novembre 2020, pour le secteur public et le secteur privé. Ces chiffres permettent d'observer la forte chute intervenue au cours des mois de mars et d'avril 2020 et les évolutions par grande catégorie d'activité. Dans le domaine de la cancérologie, l'Institut national du cancer a diffusé les données dont il disposait. Nous devons désormais conduire un travail plus qualitatif et examiner, par catégorie de patients et par typologie d'activité, l'impact de ces déprogrammations en fonction de leur niveau dans le temps et dans l'espace. Ce travail doit être mené avec les professionnels de santé, afin que nous puissions aboutir à des recommandations. Il est en cours, sachant que nous ne disposons pas encore du détail des données pour toutes les activités.

Nous avons également examiné la part de la prise en charge des patients covid et des déprogrammations pour les secteurs publics et privés – lucratifs et non lucratifs. Nous disposons d'une photographie sur quatre jours, en avril, novembre, décembre 2020 et janvier 2021. Ces chiffres nous permettent de constater que le secteur privé a pris en charge des patients covid, à hauteur de sa part d'activité dans le domaine des soins critiques. Cela ne signifie pas qu'il n'y ait jamais eu de difficulté, mais prouve néanmoins que le secteur privé a bien participé à la prise en charge de ces patients. Il nous appartient collectivement, au niveau national et des ARS, de veiller à ce que l'organisation de la prise en charge des patients covid et non‑covid soit équitable sur les territoires en tension. Les fédérations privées y sont très attentives. Nous le sommes également. Nous avons d'ailleurs recommandé que des instances d'organisation territoriale pilotées par les ARS soient mises en place à la fois avec les représentants des établissements publics et privés, mais également avec des représentants des médecins libéraux. Il est essentiel que les discussions sur l'organisation de la prise en charge soient transsectorielles.

Concernant la formation, il nous faut poursuivre la formation des professionnels. Je crois à l'augmentation des capacités. Je pense également que des mesures d'attractivité, notamment pour l'apprentissage, nous permettront d'attirer davantage vers les métiers de soignants, en établissement et dans le secteur médico-social. Notre système doit évoluer à l'aune des enseignements de la crise que nous avons vécue. Tel est déjà le cas s'agissant des EHPAD. Dans le cadre du Ségur de la santé, la décision a en effet été prise de pérenniser et de financer l'appui sanitaire mis en place auprès de ces établissements pour s'assurer d'une astreinte gériatrique, de l'intervention d'équipes mobiles de gériatrie et du renforcement des intervenants libéraux si nécessaire. Il s'agit d'un point extrêmement important.

Vous avez évoqué d'autres évolutions, comme la téléconsultation, dont je considère qu'elle ne se substitue pas à la consultation physique, mais qu'elle a néanmoins trouvé une place très importante qu'elle doit conserver dans la palette des modalités de prise en charge. Cette évolution prouve que notre système de santé doit s'inscrire dans une dynamique pour améliorer la prise en charge en période de crise et son fonctionnement de manière générale. Nous disposons de plusieurs leviers pour ce faire.

La mécanique des autorisations exceptionnelles octroyées aux établissements publics et privés dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire est en effet beaucoup plus rapide que le régime des autorisations de droit commun. Nous travaillons actuellement sur une ordonnance qui permettrait de simplifier et d'accélérer tous les renouvellements d'autorisation. Il s'agit d'un des enseignements importants de cette crise : nous devons assouplir nos cadres et le pilotage d'un certain nombre de dispositifs doit être confié aux ARS plutôt qu'aux directions centrales. À titre d'exemple, le dispositif de majoration des heures supplémentaires qui, il y a un an, était à la main de la DGOS, doit être transféré aux ARS. Nous devons tirer tous les enseignements de cette crise pour faire évoluer notre système avec un double objectif : continuer d'adapter ce système à la gestion de la crise actuelle pour améliorer la prise en charge des patients covid et non-covid et tirer des enseignements plus généraux sur le fonctionnement de notre système de santé en régime de droit commun, quel que soit le segment d'activité.

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