Intervention de Pr Frank Bellivier

Réunion du jeudi 4 mars 2021 à 9h35
Commission des affaires sociales

Pr Frank Bellivier, délégué ministériel à la santé mentale :

Je commencerai par partager puis synthétiser avec la commission les informations dont nous disposons, en précisant leurs sources, sur la situation de nos concitoyens. Je présenterai ensuite, de cette situation, une photographie actuelle, certes sommaire, mais que compléteront les autres intervenants.

Santé publique France communique chaque semaine des données du système de surveillance des activités d'urgence – SOS Médecins et les services d'accueil des urgences (SAU) – recueillies par le réseau OSCOUR. Une agence régionale de santé (ARS) pilote nous livre, à un rythme hebdomadaire également, des données sur les activités des services d'urgences et des établissements spécialisés en psychiatre, ainsi que sur les soins sans consentement. Nous effectuons un suivi bimensuel des certificats électroniques de décès. Le réseau Vigilance nous informe de son propre suivi des tentatives de suicide. Enfin, la délégation ministérielle anime un réseau de référents « santé mentale » des ARS, qui tous les quinze jours, dressent un état des lieux, au moins qualitatif, de la situation dans leur région.

D'autres sources enrichissent ces informations à peu près chaque mois : en particulier l'enquête CoviPrev, dont nous reparlerons puisqu'elle vient de produire un nouvel état des lieux, que complètera probablement en avril une enquête portant spécifiquement sur les adolescents, CONFEADO.

La Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM) fournit des données sur le suivi de la consommation de psychotropes  un élément important de suivi de la santé mentale des Français. Nous nous appuyons aussi sur un observatoire de médecins généralistes et l'enquête EpiCov, pilotée par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES). Chaque trimestre nous parviennent enfin des données de l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation et sur les activités au travers du réseau d'informations médicalisé pour la psychiatrie (RIM-P).

La synthèse de l'ensemble de ces données présente une image hétérogène de la situation actuelle. On ne note pas, au niveau national, d'augmentation de l'activité des urgences psychiatriques – nous n'assistons donc pas à une vague de décompensation psychiatrique) – même si l'activité globale de certains centres d'urgences a clairement augmenté.

La photographie de la santé de la population générale de plus de 18 ans confirme nettement, ces dernières semaines, une augmentation et un maintien à un niveau élevé des troubles anxieux et dépressifs, corroborés par l'enquête CoviPrev.

Bien que nous n'observions pas de décompensation psychiatrique généralisée, un phénomène inquiétant tend à se confirmer ces derniers temps : l'augmentation de la fréquence des tentatives de suicide chez les moins de 15 ans. Bien qu'elles demeurent rares, leur nombre croît. S'il n'est pas certain que les situations de décompensation anxieuse et dépressive, chez les moins de 15 ans, soient aujourd'hui plus fréquentes, en revanche, toutes nos sources montrent leur aggravation. Il existe de fait un consensus sur la gravité accrue des tableaux cliniques pris en charge.

Toutes nos sources indiquent en outre que les troubles des conduites alimentaires, chez les moins de 15 ans, touchent des adolescents de plus en plus jeunes et revêtent des formes de plus en plus graves.

Les binômes pédiatre/pédopsychiatre mis en place avec l'aide des professeurs Delorme et Gras-Le Guen le corroborent d'ailleurs, de même que les données des SAU. Ces binômes nous permettent de suivre l'activité des urgences pédiatriques et des services de pédiatrie où il arrive que près de 60 % des lits soient occupés par des patients traités en pédopsychiatrie.

Il est clair que dans la population générale, les indicateurs d'anxiété et de dépression ont fortement augmenté fin 2020 et, d'après la dernière enquête CoviPrev, ils demeurent à un niveau élevé.

La photographie des décompensations psychiatriques chez les adultes ne présente pas un caractère homogène. En revanche, des indicateurs convergents signalent des psychopathologies plus graves survenant plus tôt chez les moins de 15 ans.

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