Intervention de Jean-François Foucard

Réunion du mercredi 10 mars 2021 à 10h00
Commission des affaires sociales

Jean-François Foucard, secrétaire national de la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC) en charge des parcours professionnels emploi formation :

La CFE-CGC a souhaité que la négociation de l'ANI permette d'actualiser l'accord signé en 2005 sur le télétravail afin de prendre en compte le changement d'échelle de ce mode de fonctionnement, mais aussi de reconnaître et d'encadrer la continuité d'activité à domicile et le télétravail forcé dans un contexte de confinement.

L'ANI explicite le caractère obligatoire ou non du passage en télétravail ainsi que la situation des salariés en situation de télétravail contraint, ou encore les droits des instances représentatives du personnel dans un environnement de télétravail. Cet accord constitue un outil de dialogue social en rappelant des droits et des devoirs éparpillés dans plusieurs sources de droit et en recommandant des bonnes pratiques. Il est possible de l'assimiler à une soft law.

À l'issue des négociations, nous avions estimé que l'accord devrait couvrir de nombreuses activités au sein des entreprises, alors que le patronat ne souhaitait pas entrer dans un cadre normatif, entendu comme des valeurs par défaut. Concernant le remboursement des frais en télétravail, la CFE-CGC préconisait un forfait. Elle demandait également que les moyens des instances représentatives du personnel en mode hybride soient définis.

Les difficultés observées au cours de l'année écoulée ont concerné la thématique du télétravail forcé. En effet, le mélange entre vie privée et vie professionnelle a été très difficile à gérer pour de nombreux salariés, notamment pour les femmes. La charge et la durée de travail ont été plus importantes, souvent en raison d'une moindre efficience. En effet, il faut plus de temps pour faire la même chose à distance qu'en présentiel. L'impact du manque d'équipement et de la problématique de la maîtrise des outils doit également être évoqué. Le télétravail forcé durant le confinement a également généré des irritants sociaux, notamment concernant la prise en charge des frais liés au télétravail et le maintien de la prise en charge des frais de restauration. En effet, la loi est claire concernant les tickets-restaurant, qui doivent toujours être attribués dans une période de télétravail contraint, sauf accord contraire. En revanche, les employeurs ne sont pas obligés de compenser l'arrêt de la prestation de restauration collective qui existait sur un lieu de travail qui n'est plus accessible.

À l'issue de mon intervention, Mireille Dispot évoquera le volet relatif à la santé au travail.

Les vraies difficultés relatives au télétravail consistent désormais à passer d'un mode de fonctionnement imposé par la crise sanitaire à un mode permanent ; à passer d'un mode temporaire qui permettait d'assurer le minimum permettant à l'entreprise de survivre à un mode efficace, efficient et pérenne respectant les lois ; enfin à passer d'un mode anarchique à un mode régulé collectivement et hiérarchiquement. Ceci nécessite d'abandonner certaines représentations et certaines habitudes issues de la période de confinement pour entrer dans quelque chose de plus régulier, voire de contraint. Souvent, le télétravail a initialement été vécu comme un droit et une liberté par les salariés. Cependant, ces derniers ont parfois oublié qu'il s'agissait bien d'un mode d'organisation du travail. Nous observons désormais des demandes très hétérogènes entre des salariés qui souhaitent continuer à télétravailler trois ou quatre jours par semaine et ceux qui ne veulent plus subir cette organisation, à l'exception au maximum d'un jour par semaine.

Les contraintes consistent à revoir l'organisation du travail pour prendre en compte un mode hybride et à se poser les questions de la plus-value pour le collectif et pour quelles activités. Le changement d'échelle concernant le télétravail et la dimension collective, donc organisationnelle, deviennent des facteurs essentiels et un sujet d'interrogation pour l'ensemble des personnes, notamment pour le management. Répondre aux attentes des salariés, tout en répondant aux attentes des directions, n'est pas une mince affaire.

Enfin, nous avons constaté un impact territorial du télétravail, par exemple une baisse de fréquentation des commerces et des transports en commun situés à proximité près des zones de bureau, un impact sur la restauration collective, qui risque de disparaître dans certains endroits, enfin une envie de déménagement chez certains salariés, ce qui renvoie à la problématique des transports et à la question de l'accès à un internet de qualité.

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