Intervention de Mireille Dispot

Réunion du mercredi 10 mars 2021 à 10h00
Commission des affaires sociales

Mireille Dispot, secrétaire nationale CFE-CGC en charge de la protection sociale et de l'égalité des chances :

Je souhaite pour ma part répondre aux questions relatives à la reconnaissance des accidents de travail et sur l'évolution des missions des inspecteurs du travail.

Concernant le premier item, je confirme les propos d'un précédent intervenant. En effet, dans le cadre des négociations de l'ANI, la partie patronale a dans un premier temps tenté de s'exonérer de ses responsabilités en matière de santé et de sécurité des salariés en télétravail. Cependant, l'accord conclu a réaffirmé les principes généraux selon lesquelles les dispositions légales et conventionnelles relatives à ces thématiques continuent de s'appliquer dans ce mode particulier d'organisation du travail. Je confirme par ailleurs que, dans la mesure où le télétravail est un mode d'organisation du travail, il convient de mettre en œuvre une démarche d'analyse des risques spécifique dans le cadre du document unique d'évaluation des risques professionnels.

Nous avons été satisfaits du consensus enregistré entre partenaires sociaux concernant l'attention particulière à apporter à l'application des règles légales et conventionnelles relatives à la santé et à la sécurité dans le cadre d'une continuité d'activité à domicile, qui à nos yeux induit des risques spécifiques par rapport à un télétravail partiel.

Je souhaite en revanche m'attarder sur ce qui constitue à nos yeux une préoccupation majeure, à savoir la question des troubles psychiques liés au travail, d'une part parce que ces troubles sont en constante augmentation, d'autre part parce que la procédure de reconnaissance d'une maladie professionnelle est peu adaptée à ce type de troubles. En effet, le dispositif incite à privilégier la déclaration d'un accident de travail, qui génère une indemnisation moins favorable. Les chiffres, que je ne pourrai pas détailler ce matin au regard de nos contraints horaires, font état d'une augmentation des troubles psychiques. Cependant, les entreprises refusent de reconnaître l'impact des organisations du travail sur ces troubles. C'est pourquoi nous estimons que ce problème n'est pas suffisamment pris en compte, même si des avancées ont récemment été constatées, par exemple avec la reconnaissance du droit à la déconnexion dans le cadre de la « loi El Khomri ».

Par ailleurs, dans le cadre de la négociation de l'ANI, la CFE-CGC a formulé un certain nombre de propositions que je souhaite réitérer devant votre commission. Nous considérons qu'il convient d'agir sur l'organisation du travail pour réduire ces affections renvoyant aux risques psychosociaux. Par ailleurs, nous estimons que c'est par la voie des négociations relatives à la qualité de vie au travail qu'il est possible d'aborder les problématiques de conditions de travail et d'organisation du travail, en mettant en place des leviers permettant de prévenir les troubles psychiques liés au travail. Nous réitérons également notre demande que les négociations relatives à la qualité de vie au travail – que nous avons proposé de rebaptiser « qualité des conditions de travail » lors de la négociation de l'ANI – comprenne un item obligatoire consacré à l'évaluation et la régulation de la charge de travail.

Je souhaite également réitérer une de nos autres propositions portant sur la création et la publication d'un indice qualité des conditions de travail permettant aux entreprises de mesurer les effets de leurs actions dans ce domaine et, sur le modèle des incitations financières des caisses d'assurance retraite et de la santé au travail, qu'un bonus-malus soit appliqué aux cotisations d'accidents du travail et maladies professionnelles (AT‑MP) en fonction de l'évolution de cet indicateur.

Nous avions également porté une proposition visant à assortir l'obligation de négociation sur la qualité des conditions de travail d'une obligation de définir un plan d'action, à défaut d'accord, et de prévoir une pénalité en cas de défaut d'accord ou de plan d'action, à l'image du dispositif en vigueur en matière d'égalité hommes-femmes.

Par ailleurs, sur le plan des indemnisations, le dispositif ne semble pas garantir un juste équilibre, au regard des risques encourus. En effet, il n'existe pas de juste reconnaissance de l'origine professionnelle des affections résultant des risques psychosociaux.

Nous réitérons également devant votre commission notre demande de création d'un tableau des maladies professionnelles permettant de simplifier la reconnaissance de l'origine professionnelle de ces pathologies, donc garantir une plus juste indemnisation des victimes, mais aussi de responsabiliser les entreprises voyant leurs cotisations AT‑MP augmenter, en les incitant à agir préventivement. À défaut, nous réitérons notre proposition visant à abaisser à 10 % le taux d'incapacité permanente induisant l'examen du dossier par l'assurance maladie. En effet, une pathologie qui n'est pas inscrite dans un tableau de maladies professionnelles est actuellement examinée uniquement si la victime justifie d'une incapacité permanente partielle de 25 %.

Concernant le second item, je veux préciser que nous sommes très favorables à la demande de plusieurs députés relative à l'évolution des missions de l'inspection du travail. Cependant, au-delà d'une adaptation de ces missions à l'évolution actuelle des métiers, en particulier des métiers en émergence et de l'organisation à distance induite, nous pensons qu'il convient d'élargir la problématique à l'ensemble des partenaires participant à la prévention des risques susceptibles de découler des nouvelles organisations. J'évoque à ce titre l'ensemble des éléments relevant de la branche AT‑MP ainsi que les ingénieurs et les spécialistes intervenant auprès des entreprises afin de les aider à développer la prévention de ces risques. En effet, je pense qu'il s'agit d'un sujet global qu'il ne faut pas appréhender sous le seul prisme de l'inspection du travail.

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