Intervention de Amandine Brugière

Réunion du mardi 23 mars 2021 à 17h15
Commission des affaires sociales

Amandine Brugière, responsable du département « Capitalisation et développement des connaissances » de l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) :

L'ANACT est un réseau qui coordonne dix-sept agences régionales. Notre mission consiste à accompagner les entreprises dans l'amélioration des conditions de travail, en agissant notamment sur l'organisation du travail. Nous entendons par là toutes les ressources, les processus et les types de rapports sociaux que l'entreprise met en place pour atteindre ses choix de productivité, tout ceci ayant des incidences sur les déterminants de la qualité de vie au travail et des conditions de travail.

Cette définition nous tient particulièrement à cœur. Nous nous appuyons également sur l'accord signé par les partenaires sociaux européens sur la digitalisation des entreprises. Il reprend cette notion d'organisation du travail en donnant à voir comment les conditions de travail, les conditions d'emploi, le contenu du travail, la nature de l'activité et les relations sociales sont entremêlés et conditionnent la qualité du travail, de la performance, des conditions de travail et la qualité de vie au travail.

C'est important parce que le télétravail ne consiste pas simplement à transposer une activité de bureau dans un lieu tiers. Il s'agit d'une véritable organisation du travail, à part entière, qui nécessite de reconsidérer tout le système d'interactions qui se tisse au sein de l'entreprise : les formes de collaboration, en particulier entre les salariés sur site et ceux à distance, l'adaptation des outils, l'adaptation des horaires, la charge de travail, la nature des activités effectuées à distance ou en présence, les espaces, les lieux. Il faut bien sûr aussi anticiper les risques spécifiques à ces situations de travail hybrides.

Cette spécificité de l'organisation du travail à distance et des organisations hybrides ou des organisations multispatiales du travail nécessite que le corps social « chemine ». Ce mot est vraiment important. Nous sortons d'une réunion avec notre réseau au cours de laquelle il a été maintes fois repris. Il s'agit véritablement d'un cheminement, d'une expérimentation pour trouver les points d'équilibre acceptables au regard des exigences de l'activité, des attentes du corps social et des exigences du marché économique. Nous observons depuis un an ce cheminement entre les exigences liées aux mesures de prévention sanitaires et les exigences du travail. Selon les secteurs et les entreprises, les résultats sont différents.

Entre la première phase de crise lors du premier confinement et les confinements successifs jusqu'à aujourd'hui, nous voyons des formes variables de télétravail, avec des taux d'activité différents. Lors du premier confinement, jusqu'à 50 % des salariés ont été en arrêt dans certaines entreprises, ce qui modifie la répartition de la charge et les modes de fonctionnement. Le taux d'activité est maintenant plus important. Les besoins de collaboration, de rattrapage de la productivité, de coordination et de fonctionnement des collectifs de travail, des exigences de proximité avec les clients et les prestataires font pression en faveur d'un retour sur site ou d'une hybridation plus équilibrée entre présence et distance.

Ces formes de travail à distance ont des effets sur la santé mentale et sur la santé physique à cause, entre autres, de la sédentarité. Ils renforcent également les inégalités entre hommes et femmes.

Le réseau accompagne depuis plus d'un an les entreprises dans la mise en place du télétravail à travers un dispositif autrefois baptisé « Objectif reprise » et renommé « Objectif télétravail », la reprise n'étant pas toujours à l'ordre du jour. Ce dispositif nous permet d'accompagner gratuitement des petites et moyennes entreprises (PME) sur tout le territoire national. Nous disposons aussi d'un ensemble de ressources : fiches pratiques, guides méthodologiques, outils ludopédagogiques, webinaires.

Un levier majeur, à notre avis, pour accompagner les entreprises est le dialogue social et professionnel. À ce titre, les deux accords nationaux interprofessionnels (ANI) signés fin 2020 et début 2021 sont pour nous des références. Ils constituent des cadres structurants qui nous permettent de croiser qualité de vie au travail et conditions de travail (QVCT) d'un côté, performance économique de l'autre.

Nous avons également mené récemment une étude sur les accords signés sur le télétravail, ou qui contiennent des paragraphes sur le télétravail. Ces accords se multiplient. Nous en avons analysé qualitativement une cinquantaine pour connaître la manière dont les entreprises se saisissent de ce sujet, comment elles cadrent et norment les formes de travail à distance.

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