Intervention de Karine Babule

Réunion du mardi 23 mars 2021 à 17h15
Commission des affaires sociales

Karine Babule, chargée de mission au sein du département « Expérimentations » de l'ANACT :

Nous avons eu à cœur d'étudier les accords de télétravail pour voir comment les entreprises s'en saisissent dans le dialogue social et professionnel, pour l'intégrer dans leur organisation du travail.

D'un point de vue quantitatif, nous observons une forte évolution entre 2018 et 2020, avec un passage de 1 000 à 2 000 textes par an. L'an dernier, 2 000 textes ont porté spécifiquement sur le télétravail, dont 70 % sont des accords, plutôt dans des secteurs d'activités scientifiques et techniques, d'industries manufacturières, dans les finances et l'automobile. Les entreprises concernées sont dans 40 % des cas des entreprises de 50 à 250 salariés, dans 25 % des cas des entreprises de moins de 50 salariés et dans 25 % des cas des entreprises de plus de 250 salariés.

La typologie des accords est concentrée sur la première et la deuxième catégories, c'est-à-dire que ce sont des accords plutôt restrictifs ou qui encadrent le télétravail avec un certain nombre de lourdeurs administratives, des avenants très documentés non obligatoires mais nécessaires pour la prise en charge des frais. En moyenne, ces accords prévoient deux jours de télétravail par semaine. Nous voyons aussi des accords plus souples avec un télétravail flexible, voire des accords de quatrième catégorie plutôt orientés vers les nouveaux modes de travail et intégrant distanciel et présentiel mais ils sont encore relativement rares.

En termes de contenu, l'ensemble des éléments pointés dans l'ANI sur le télétravail sont des points de progression importants dans les accords. Ils sont relativement peu présents dans les premiers accords que nous avons étudiés durant la période entre les deux confinements : la définition des critères d'éligibilité en comité social et économique (CSE) y est quasiment inexistante, les retours d'expérience y sont peu documentés, la question des espaces et des lieux est, au-delà du domicile, quasiment absente également, l'accompagnement des collectifs de travail, du management et la prévention des risques professionnels, très fortement mentionnés dans l'ANI, ne sont que très peu présents dans les accords.

Dix recommandations sont issues de cette étude pour éviter les écueils majeurs. Au-delà des pratiques et de l'encadrement des modalités de recours, le travail n'est pour nous pas encore suffisamment au cœur du dialogue social. Les alternatives au domicile, la question des problématiques de surconnexion, de la répercussion du numérique sur les métiers, des usages des espaces sur site ne sont pas suffisamment envisagées. Les modalités de continuité du dialogue social à distance sont pratiquement absentes et les accords sont encore faibles sur la question des modalités de suivi et d'évaluation par des comités paritaires, des clauses de revoyure ou des indicateurs de suivi. Certains accords expérimentaux sont très intéressants à ce titre et, sans être forcément les plus généreux, permettent aux acteurs d'avancer pas à pas.

La question de l'inclusion et de la spécificité des populations, femmes ou hommes, par exemple sont des parents pauvres des accords alors que des études de l'Institut national d'études démographiques (INED) et de la DARES montrent des inégalités d'accès aux conditions de travail, notamment avec la question des violences conjugales et des violences au travail. Une norme internationale a pourtant été ratifiée par la France qui est en voie d'intégrer ces éléments dans son code du travail.

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