Intervention de Pierre Lamblin

Réunion du mardi 23 mars 2021 à 17h15
Commission des affaires sociales

Pierre Lamblin, directeur des données, études et analyses de l'Association pour l'emploi des cadres (APEC) :

Les éléments que je présente s'appuient sur des travaux récents que nous avons menés en 2020 sur le travail des cadres et sur une enquête que nous menons tous les trois mois auprès d'un échantillon représentatif de cadres du privé, dont la dernière occurrence date de janvier.

Le premier enseignement est que le télétravail est devenu une modalité de travail à part entière avec la crise, au lieu d'une modalité de travail occasionnelle. Avant le premier confinement, six cadres sur dix pratiquaient le télétravail. En janvier dernier, ils étaient huit sur dix et un sur trois était à 100 % en télétravail contre 2 % des cadres avant la crise.

L'expérience du premier confinement a mis en lumière les limites du télétravail. La grande majorité des cadres du privé – neuf sur dix – souhaitent pouvoir continuer à télétravailler, particulièrement les cadres franciliens et les cadres non-managers plus que les cadres managers.

Pour un cadre sur deux, l'organisation idéale consiste en deux ou trois jours de télétravail par semaine, cette part variant selon les métiers. Nous trouvons la proportion la plus importante dans les métiers les plus propices au télétravail : les fonctions marketing, informatique, études et recherches ainsi que les services techniques – achats, logistique –, la gestion et les finances.

Qu'est-ce qui motive les cadres pour télétravailler ? Il s'agit d'avoir une meilleure qualité de vie au travail, de réduire significativement les temps de transport et de pouvoir télétravailler au calme. Ils donnent également comme raison la possibilité d'habiter plus loin du lieu de travail. Aujourd'hui, 30 % des cadres souhaitent changer de région lors d'un changement d'entreprise, ce qui est certainement une conséquence de la possibilité de travailler à distance.

Les cadres expriment également une volonté de se former aux bonnes pratiques en matière de télétravail et un intérêt pour les retours d'expérience de façon à adopter de nouveaux comportements et à se prémunir contre les risques associés au télétravail, tels que l'isolement, la perte de lien social, la perte de l'informel. Les cadres des ressources humaines et les cadres trentenaires expriment plus particulièrement ce souhait de se former, ainsi que les cadres managers, notamment ceux qui encadrent des télétravailleurs.

Les cadres expriment aussi le besoin de développer certaines compétences clés attendues en situation de télétravail, notamment l'autonomie, le sens de l'organisation, la discipline ou les aspects relationnels.

Enfin, les cadres souhaitent faire évoluer les pratiques managériales, puisque le management à distance s'est imposé sous l'effet des confinements : deux cadres managers sur trois étaient dans cette situation. Pour s'installer durablement, le télétravail nécessite une évolution des pratiques managériales selon une grande majorité des cadres – neuf sur dix – et les compétences qu'ils jugent clés sont une communication régulière, la construction d'une relation de confiance et la fixation de règles claires.

Le télétravail constitue un levier d'attractivité et de mobilité des cadres avec la possibilité de changer de région, d'habiter plus loin de son lieu de travail. Pour six cadres sur dix, le télétravail est un critère important dans le choix de son entreprise, davantage chez les plus jeunes, chez les Franciliens et les non-managers. Côté entreprise, le télétravail peut aussi se révéler un levier important pour attirer et fidéliser, notamment pour des entreprises qui rencontrent des difficultés. Deux entreprises sur trois ont aujourd'hui des difficultés pour recruter le profil qu'elles recherchent et trouver des candidats, indépendamment du fait que les recrutements sont moins nombreux. Les tensions perdurent et ce levier du télétravail peut être important pour attirer et fidéliser des cadres qui résident plus loin.

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