Intervention de Malik Koubi

Réunion du mardi 23 mars 2021 à 17h15
Commission des affaires sociales

Malik Koubi, sous-directeur des salaires, du travail et des relations professionnelles à la DARES :

Je ne reviens pas sur les propos précédents, qui ont été très riches. J'ajoute simplement quelques informations statistiques et les résultats de quelques études économiques.

La question des inégalités d'accès au télétravail s'inscrit dans une vision plus large des inégalités puisque, par exemple, le télétravail est développé surtout chez les cadres. C'était déjà le cas avant la crise et les cadres ont conservé un avantage important pendant la crise.

Le type de métier joue également beaucoup. Les tâches sont plus ou moins télétravaillables selon les métiers même si, durant la crise, la définition du « télétravaillable » a pu évoluer. Toutefois, nous voyons bien que la plupart des métiers de la deuxième ligne ne sont pas du tout télétravaillables ; les personnes sont obligées de se déplacer pour travailler en l'état actuel de nos technologies.

Les inégalités sont aussi liées au niveau de qualification. Utiliser des outils numériques semble naturel pour des personnes comme nous, mais ne l'est pas du tout pour l'ensemble de la population. C'est une inégalité qui influe sur l'accès au télétravail mais peut peut-être plus facilement être corrigée par des formations.

Pourquoi, malgré les préconisations du ministère du travail, les salariés ne sont-ils pas en télétravail à 100 % ou au moins quatre jours sur cinq ? Une partie de la réponse se situe dans ces inégalités objectives. Certaines tâches ne sont pas télétravaillables et c'est la raison principale qui nous est donnée en réponse à notre enquête. La deuxième raison donnée, dans 40 % des cas, est que les salariés eux-mêmes demandent à ne pas être en télétravail trop longtemps, ce qui rejoint les propos déjà tenus sur l'équilibre à trouver entre présentiel et télétravail.

Mon rôle n'est pas de trancher entre accord de branche et accord d'entreprise, mais nous constatons un fort développement des accords d'entreprise. En 2020, plus de la moitié des accords consacrés aux conditions de travail traitent de télétravail, ce qui n'était pas le cas auparavant. En 2019, 1 190 accords abordaient le télétravail et, en 2020, nous en comptons 1 980, soit une augmentation de plus de 60 %. Cela semble plaider en faveur du fait que, malgré la possibilité ouverte par les ordonnances Macron de mettre en place un travail assez informel, beaucoup d'entreprises tiennent à spécifier les règles, à traiter le sujet dans le cadre du dialogue social et dans le cadre d'accords d'entreprise.

Beaucoup de questions portent sur les risques psychosociaux liés au télétravail et à l'organisation. Nous n'avons pas encore les résultats consolidés de l'enquête TraCov en cours, qui porte sur le vécu du travail et du chômage pendant la crise du covid, mais nous pouvons déjà dire que le télétravail correspond à une intensification des rythmes de travail, de manière générale et particulièrement chez les cadres. Nous pouvons aussi vous dire que le télétravail s'accompagne de plus de risques physiques – douleurs, par exemple – qui renvoient sans doute à un équipement insuffisant ou à l'installation des salariés à leur poste de travail dans un mode quelque peu dégradé.

Ce sont les secteurs qui pratiquaient déjà le plus le télétravail avant la crise qui s'y sont mis le plus vite et de la manière la plus complète.

La DARES travaillera beaucoup sur ces sujets dans les prochaines semaines et publiera rapidement des résultats sur les risques psychosociaux, sur les changements organisationnels dans les entreprises mais aussi sur les modérateurs que sont les relations sociales au sein de l'entreprise, le soutien des collègues ou de la hiérarchie et la manière dont cela peut atténuer les problèmes d'organisation posés par la crise sanitaire. L'enquête dont nous publierons les résultats porte à la fois sur le secteur privé et sur les fonctions publiques.

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