Alors que les médias avaient largement glosé, en janvier dernier, sur les dissensions entre le Président de la République et vous-même au sujet des mesures à prendre pour faire face à l'épidémie, la proposition de votre reconduction met fin au suspense.
Vous avez une double casquette depuis quelque temps, puisque vous présidez à la fois le CCNE et le Conseil scientifique. N'êtes-vous pas un peu juge et partie ? Ne peut-on craindre une trop grande concentration des pouvoirs ? Quand on conseille le Gouvernement, peut-on encore avoir une autonomie pleine et entière ? En période d'état d'urgence sanitaire, qui prévoit tant de pouvoirs exorbitants, n'existe-t-il pas une coresponsabilité pour les mesures liberticides qui sont prises ? Par ailleurs, avez-vous des regrets, sur le plan éthique, concernant la gestion sanitaire ? Je pense en particulier à la considération accordée à nos aînés.
Le CCNE est constitué de personnes nommées par le pouvoir en place – le Président de la République et des ministres – mais aussi par des présidents d'organismes qui, eux-mêmes, sont souvent nommés de la même manière. Compte tenu de la proportion des personnes nommées par l'exécutif, ne peut-on douter de la réelle indépendance du CCNE ?
Le projet de loi relatif à la bioéthique a été précédé par des états généraux qui ont été peu écoutés, peu pris en compte – c'est le moins que l'on puisse dire – lors de l'élaboration du texte. La comparaison avec la Convention citoyenne pour le climat est sans appel : cela ne vous choque-t-il pas ?
Des avis divergents du CCNE se sont succédé récemment. Est-ce à dire que l'éthique a changé en si peu de temps, alors que les connaissances scientifiques n'ont pas progressé ? L'éthique de la volonté des adultes semble avoir pris le pas sur l'éthique de la vulnérabilité des enfants. Cela risque-t-il de modifier profondément, demain, le rôle du médecin ?