Monsieur Mbaye, cette proposition de loi serait, avez-vous dit, une tribune politique, au motif qu'elle ne vise qu'un seul pays. Mais désigneriez-vous ainsi les propos du Président de la République sur la Russie ou la Turquie ? Si nous avons fait le choix de mentionner la Chine dans l'exposé des motifs, c'est parce qu'elle est le seul État à pratiquer des prélèvements d'organes forcés, lesquels sont, pour le reste, effectués par des réseaux criminels mafieux. Au reste, la Cour suprême chinoise estime que le Parti communiste chinois est au-dessus de la Constitution, des règles et traités. Il s'agit donc d'un crime contre l'humanité perpétré par un système étatique. Bien entendu, le texte s'appliquerait à l'ensemble des pays non européens, mais il est vrai que notre objectif est, non pas politique, mais humanitaire, face à un pays qui a étatisé les prélèvements forcés de grande ampleur.
Par ailleurs, notre proposition de loi serait satisfaite. Ainsi, les vérifications seraient effectuées. Pourtant, même la DGOS indique que tel n'est pas le cas. Et, quand bien même admettrait-on qu'elles le sont, cela signifierait qu'on a des informations permettant d'affirmer qu'il n'y a aucun problème éthique en Chine. C'est très intéressant ! Faut-il rappeler que même les experts de l'OMS ne peuvent avoir accès aux informations concernant le laboratoire de Wuhan, pourtant conçu dans le cadre d'une coopération avec la France ? Il n'y a aucune transparence. Je suis choquée par vos arguments : il s'agit de crimes contre l'humanité.
Par ailleurs, la proposition de loi vise, je le rappelle, à garantir le respect éthique du don d'organes par nos partenaires non européens ; elle ne concerne donc pas le tourisme de transplantation pratiqué par des Français en Chine. Toutefois, sur ce point, les représentants de l'Agence de la biomédecine que nous avons auditionnés ont eux-mêmes reconnu que leurs analyses ne portaient que sur les greffes de rein car, selon eux, il est exclu que des Français se rendent en Chine pour bénéficier d'une transplantation cardiaque ou pulmonaire en raison des soins postopératoires que nécessite une telle intervention. Pourtant, je l'ai dit, Alexis Génin a relevé que des personnes disparaissaient des listes de patients en attente d'une greffe.
Enfin, vous arguez du fait que la France va ratifier la convention dite de Saint‑Jacques‑de‑Compostelle – qu'elle a signée en 2019, soit quatre ans après les autres. Or notre pays fait partie des cinq signataires, sur vingt-six, qui ont émis des réserves.
Ainsi, s'agissant des articles 7 et 8 de la convention, la France se réserve le droit de ne pas ériger en infraction pénale : la sollicitation et le recrutement illicites de donneurs et de receveurs d'organes en vue d'un profit ou d'un avantage comparable, soit pour la personne qui sollicite ou recrute, soit pour une tierce personne ; la corruption active ou passive de professionnels de la santé, de fonctionnaires ou de personnes travaillant pour une entité du secteur privé dans le but de prélever ou implanter un organe humain de manière illicite ; la préparation, la préservation, le stockage, le transport, le transfert, la réception, l'importation et l'exportation d'organes prélevés de manière illicite.
Par ailleurs, à propos de l'article 10, la France déclare qu'elle n'exercera sa compétence, s'agissant de délits établis conformément à la convention et commis par ses ressortissants hors du territoire de la République française, qu'à la condition que les faits soient également punis par la législation du pays où ils ont été commis et que ceci ait donné lieu soit à une plainte de la victime ou de ses ayants droit – vous imaginez le prisonnier de conscience déposer une plainte depuis son camp de détention ! –, soit une dénonciation officielle de la part des autorités du pays où ils ont été commis. Ainsi, la France se laisse le droit de conditionner l'engagement de poursuites à l'existence d'une plainte de la victime ou d'une dénonciation des autorités de l'État dans lequel l'infraction a eu lieu.
Il est très grave d'émettre de telles réserves.
Quant à la convention d'Oviedo, aucun des trois protocoles additionnels que la France a signés en 2011 n'a été ratifié, y compris celui relatif à la transplantation d'organes et de tissus d'origine humaine.
Vous proposez d'agir au niveau du droit international, mais nous sommes en deçà des autres pays dans ce domaine.
Enfin, parmi les publications chinoises ont été retirées parce que ni la source des organes utilisés ni le consentement du donneur ne sont traçables, certaines sont signées d'un professeur qui travaille actuellement en France en vertu d'une convention passée avec le centre hospitalier universitaire de Grenoble – c'est intéressant, pour le ministre de la santé – et qui est toujours membre étranger de l'Académie nationale de médecine !