M. Bazin et moi-même avons souhaité éclairer la commission sur le régime de sécurité sociale des mines, rarement évoqué malgré son importance indéniable, notamment pour les élus des bassins miniers.
Ce régime résulte d'un pacte conclu entre l'État et les mineurs au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Le charbon apparaissait alors indispensable au redressement de notre pays. Il fallait attirer de la main-d'œuvre vers les métiers pénibles et dangereux de la mine. Les éboulements et les coups de grisou ne relevaient pas de simples mythes, pas plus que les maladies de l'amiante ou la silicose, qui touchent nombre d'anciens mineurs. Le régime de sécurité sociale des mines a été conçu comme une contrepartie des vicissitudes de la profession.
Instauré en 1946 et géré par la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM), ce régime complet s'occupe aussi bien des risques vieillesse et invalidité que des accidents du travail et des maladies professionnelles. Particulièrement protecteur, à proportion des risques encourus par ses bénéficiaires, il permettait aux mineurs, qui commençaient souvent à travailler dès un très jeune âge, de prendre leur retraite à 55 ans, voire dès 50 ans pour les mineurs de fond, grâce à des majorations liées aux périodes de travail au fond des mines. Le régime minier prend en charge la totalité des frais de santé des travailleurs des mines et de leurs ayants droit – conjoint et enfants jusqu'à leurs 18 ans. Enfin, ceux-ci bénéficient d'une offre de santé exclusive et complète grâce à des structures dédiées : les œuvres minières.
La fermeture, en 2004, de la dernière mine de charbon en Moselle a entraîné la mise en extinction du régime minier, effective depuis 2011. Tous les salariés recrutés à compter de cette date dans le cadre du code minier, notamment dans les ardoisières, les mines de sel et de bauxite, relèvent du régime général. Lors de la mise en extinction du régime minier, l'État s'est fermement engagé à garantir les droits acquis des mineurs, aussi longtemps qu'il restera un ayant droit en vie.
Naturellement, cette persistance des droits acquis a dû passer par une organisation adaptée, en raison de la diminution rapide du nombre de cotisants et des pensions à verser. La gestion du régime minier a été progressivement transférée aux institutions de droit commun. La Caisse des dépôts et consignations s'occupe désormais des risques retraite et invalidité, tandis que le risque maladie relève de la Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM). Enfin, l'action sanitaire et sociale du régime a été confiée à l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM), créée en 2004 afin, justement, de pérenniser les engagements des Charbonnages de France après leur dissolution. L'ANGDM se charge aussi de l'application du droit au logement et au chauffage.
Les réorganisations que je viens d'évoquer ne devaient pas, en principe, impacter les mineurs, dont la CANSSM reste officiellement la caisse de sécurité sociale, bien que le transfert de la plupart de ses missions originelles la cantonne à un simple rôle de façade. C'est l'étude des conséquences concrètes de ce transfert qui a motivé notre mission.
Nous recevons quotidiennement des témoignages d'anciens mineurs désemparés par les difficultés qu'ils rencontrent pour faire valoir leurs droits. Nous ne mettons pas en cause une institution en particulier. Le problème vient plutôt, selon nous, de l'absence d'une vision d'ensemble de ce régime, liée à l'éclatement des compétences entre différentes institutions, qui élaborent d'ailleurs en ce moment une nouvelle convention d'objectifs et de gestion. Nous souhaitons, par notre rapport, infléchir ou conforter certaines de ses orientations.