Intervention de Franck Von Lennep

Réunion du mardi 25 mai 2021 à 18h00
Commission des affaires sociales

Franck Von Lennep, directeur de la sécurité sociale :

Le rapporteur général a qualifié de relativement bonne surprise la situation financière de la sécurité sociale en 2020. C'est une bonne surprise par rapport à la LFSS puisque, en effet, nous avons eu davantage de recettes et que la croissance 2020 a été supérieure à celle retenue en septembre lors de la préparation du texte. En dépit d'une amélioration d'environ 10 milliards d'euros par rapport à la LFSS, cela reste historiquement, avec 38 milliards d'euros, le pire déficit de la sécurité sociale, et très loin.

Ce déficit de 38,7 milliards d'euros s'explique par les pertes de recettes liées à la crise pour une trentaine de milliards d'euros et par un dépassement de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) de 14 milliards d'euros.

Votre deuxième question portait sur le refus de certification de la Cour des comptes pour les comptes de la branche recouvrement. Ce refus de certification a fait l'objet de nombreux échanges entre la Cour des comptes, la direction de la sécurité sociale et l'ACOSS. Nous avons une divergence d'appréciation. Il s'agit pour l'essentiel de savoir comment comptabiliser les cotisations qui n'ont pas été payées par les travailleurs indépendants en 2020.

Le Gouvernement a en effet fait le choix en 2020 d'abattre les cotisations des travailleurs indépendants. Elles n'ont pas été prélevées durant le premier confinement et, à partir de l'été, il a été décidé d'abaisser les cotisations de 50 %. Si nous ne l'avions pas fait, les cotisations non payées pendant le premier confinement auraient dû être payées à la fin de l'année par les travailleurs indépendants. Ils auraient dû payer en quatre ou cinq mois tout ce qu'ils n'avaient pas payé pendant le premier confinement. Ils auraient donc payé des cotisations bien supérieures à d'habitude puisque ce sont des cotisations mensuelles, payées tout au long de l'année et faisant l'objet d'une régularisation l'année suivante au moment de la déclaration de revenus.

Nous avons décidé que ces cotisations seraient uniquement de 50 %. La divergence avec la Cour des comptes provient de ce qu'elle a considéré qu'il aurait fallu passer les produits à recevoir dans les comptes de l'ACOSS au titre des cotisations non appelées. Nous n'avons pas voulu le faire parce que nous n'avons pas la visibilité sur les revenus des travailleurs indépendants en 2020. Ceux-ci les déclarent encore actuellement, jusqu'au mois de juin. Ce n'est qu'à l'issue de ces déclarations que nous connaîtrons réellement ces revenus. Nous avons donc préféré appliquer un principe de prudence, comme nous le faisons toujours dans ce cas, et considérer que les cotisations qui seront à payer à partir de 2021 seront rattachées à l'année 2021, au moment des régularisations. Nous avons ainsi appliqué la règle habituelle. La Cour des comptes avait une divergence sur ce point.

S'agissant de la tendance en matière de recettes, nous verrons dans la LFSS quelles seront les hypothèses du Gouvernement sur la croissance et les recettes. Il se produit un effet base du fait que les recettes 2020 ont été supérieures à ce qui était attendu dans la LFSS. Nous devrions donc avoir plutôt de bonnes surprises sur les recettes mais, par ailleurs, nous avons des dépenses supplémentaires sur l'ONDAM.

Il existait une provision pour l'ONDAM dans le budget 2021, provision qui est revue à la hausse. Il est donc encore trop tôt pour dire quel sera l'effet cumulé de ces différentes tendances sur les comptes 2021. Ce sera présenté lors de la Commission des comptes de la sécurité sociale dans les prochaines semaines.

Les mesures d'accompagnement et d'exonération n'ont pas d'effet sur les recettes de la sécurité sociale puisqu'elles sont compensées par l'État à la sécurité sociale. Début mai, ces déclarations d'exonérations et d'aides au paiement pour les employeurs représentent 5,2 milliards d'euros. Ces 5,2 milliards d'euros d'aides et d'exonérations bénéficient aux employeurs et sont compensés par l'État à la sécurité sociale. 40 % de ces aides concernent des entreprises ayant moins de dix salariés ou relevant des secteurs de l'hôtellerie et de la restauration. Ce sont donc des aides très ciblées sur les entreprises qui en avaient le plus besoin.

Par ailleurs, il existe des exonérations pour les travailleurs indépendants mais, comme je le disais, nous ne connaissons pas encore les chiffres puisque nous n'avons pas les déclarations de revenus des travailleurs indépendants. Ces chiffres seront arrêtés dans les prochaines semaines ou cet été.

La contribution des OCAM se montait à 1 milliard d'euros en 2020 et 500 millions d'euros en 2021. Cette contribution de 1,5 milliard d'euros avait été ajustée de manière à être inférieure à ce que nous considérions comme la sous-exécution des dépenses de ces organismes complémentaires, que nous estimions à 2 milliards d'euros. Selon nos dernières estimations, cette sous-exécution des dépenses des complémentaires est même plus élevée, probablement plus proche de 2,5 milliards que de 2 milliards d'euros. Toutefois, nous ne disposons pas des comptes des complémentaires. Cette somme est ce que nous estimons sur la base du panier de soins remboursés par l'assurance maladie. Les organismes complémentaires ont par ailleurs d'autres dépenses que nous ne connaissons pas : des frais de gestion, les chambres particulières...

Les comptes des complémentaires ne seront connus que cet été ou en septembre. Nous considérons en tout cas que les marges apparues l'année dernière sont largement confirmées et que des augmentations de prime des complémentaires au titre de cette contribution ne seraient pas justifiées. Je crois d'ailleurs qu'aucun organisme complémentaire n'a annoncé avoir opéré des hausses de cotisation du fait de cette contribution. Ce chiffre de 2 milliards d'euros, sans doute même un peu plus, n'est pas discuté par les organismes complémentaires.

Enfin, les mesures figurant dans la proposition de loi organique que vous portez, monsieur le rapporteur, s'inscrivent effectivement dans les mesures portées par la sphère sociale, notamment par le HCFiPS et par la Cour des comptes. Elles nous semblent aller vraiment dans le bon sens, à la fois sur l'information du Parlement, sur le calendrier et sur l'évaluation.

Madame la co-présidente, nous entendons bien votre interpellation sur les rapports. Il est vrai que l'année 2020 a été chahutée. Nous faisons le maximum pour reprendre un rythme plus normal. Certains des rapports que vous avez cités ne relèvent pas de la direction de la sécurité sociale mais nous faisons le maximum pour ceux qui en relèvent, comme celui sur le RNCPS, qui sera bien remis cet été.

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