Intervention de Amélie Verdier

Réunion du mardi 25 mai 2021 à 18h00
Commission des affaires sociales

Amélie Verdier, directrice du budget :

Nous enregistrons en 2020 un déficit que je n'ose qualifier de « meilleur que prévu » mais plutôt de « moins mauvais ». L'activité économique n'a finalement reculé que de 8,3 % du produit intérieur brut (PIB) alors que nous avions craint pire. C'est une bonne chose et, peut-être aussi, une illustration de la prudence qui a toujours été la nôtre au milieu d'une crise qui reste marquée par beaucoup d'incertitudes. La situation de 2021 reste assez incertaine.

Franck Von Lennep a donné les grands éléments et souligné le fait que le déficit constaté en 2020 est moins élevé que prévu du fait des recettes. En revanche, pour ce qui est des dépenses, nous avons des surcoûts liés à la crise, de l'ordre de 13,5 milliards d'euros sur l'ONDAM. Je souligne devant votre commission que l'État a pris sa part, c'est‑à‑dire l'essentiel du coût de la crise et des mesures discrétionnaires mises en place pour y faire face. Chacun a pris sa perte sur le rendement des recettes et l'État a supporté une très large part des dépenses d'urgence. Je crois que la Cour des comptes devrait très prochainement confirmer notre estimation ou la préciser : l'État a pris en charge environ les deux tiers du coût des dépenses d'urgence et de soutien. Il a notamment pris en charge la compensation des exonérations et aides au paiement des charges sociales instaurées durant la crise sanitaire.

Nous sommes dans un environnement complètement inédit. Nous avons quasiment doublé le déficit de l'État par rapport à l'estimation de la loi de finances initiale en passant de 93 milliards à 178 milliards d'euros exécutés.

L'effet de l'effondrement du PIB devrait, nous l'espérons, être rattrapé rapidement. Nous serons attentifs en 2021 et pour la suite de la trajectoire à mettre en exergue ce qui est l'effet de la crise et ce qui provient de décisions de dépenses pérennes. Certaines dépenses concernent l'État et d'autres la sécurité sociale, notamment avec les accords du Ségur de la santé. Ces derniers éléments montent en puissance.

Je n'ai pas d'information supplémentaire sur 2021. Nous n'avons pas de raison d'être inquiets par rapport à la dernière prévision de croissance du Gouvernement, revue à 5 % au lieu des 6 % initialement envisagés pour tenir compte du troisième confinement. Comme l'a indiqué le directeur de la sécurité sociale, nous vérifions actuellement ce qu'il en sera mais nous n'avons pas d'inquiétude particulière compte tenu des encaissements de recettes, notamment les encaissements de taxe sur la valeur ajoutée que nous assurons avant de les reverser à la sécurité sociale.

Vous nous avez interpellés, monsieur le rapporteur général, sur l'horizon de la trajectoire d'ensemble. Le programme de stabilité est construit sur l'ensemble des finances publiques et sur l'objectif d'un retour à un niveau permettant de stabiliser la dette publique. Je souhaite insister sur le fait que les 3 % ne sont pas un chiffre qui nous obséderait en lui-même à Bercy. Ce qui a un sens économique est le point à partir duquel nous parvenons à infléchir le poids de la dette dans le PIB.

La stratégie proposée repose sur une maîtrise – déjà abondamment commentée – de l'évolution des dépenses publiques autour de 0,7 % en moyenne par an, en volume c'est‑à‑dire en neutralisant l'effet de l'inflation sur la période pluriannuelle. Pour fixer les idées, la croissance avait été de l'ordre de 1 % sur la période 2013-2017 et nous sommes donc sur un niveau un peu inférieur. C'est un effort et nous ne le présentons pas autrement.

J'insiste sur le fait que c'est une évolution moyenne, certains pans de la dépense publique allant plus vite que cette moyenne et d'autres moins vite. Dans le champ de la sécurité sociale, il faut souligner la dynamique des dépenses de retraite, tout simplement du fait d'un effet démographique et de la progression du nombre de retraités. Dans ce même champ de la sécurité sociale, les dépenses de gestion administrative des caisses de sécurité sociale par exemple sont moins dynamiques. Les assiettes ne sont évidemment pas les mêmes mais je veux bien montrer que cette affirmation d'une trajectoire moyenne ne signifie pas appliquer la même trajectoire à tout le monde. Il s'agit simplement d'un cap clair et c'est l'esprit dans lequel nous souhaitons appréhender les propositions faites par le rapporteur général et par la commission des finances.

Nous ne pouvons pas dire à partir de quand ce sera appliqué puisque la crise n'est pas encore derrière nous, même si nous commençons à en voir le bout. Vous avez examiné récemment le projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire. Il nous donne un cap pour la sortie d'un certain nombre de mesures de soutien. Cette sortie aura lieu de manière progressive pour l'ensemble des secteurs suivis et, dès que nous le pourrons, nous souhaitons avoir un pilotage pluriannuel d'ensemble qui explicite la stratégie.

J'ajoute, comme vous nous y avez invités, quelques réactions un peu techniques sur votre proposition de loi organique. Je souligne d'abord tout ce qui nous semble aller dans le bon sens. L'alignement des dates de dépôt des deux textes nous semble parachever un mouvement déjà largement entamé les années précédentes, en donnant une grande cohérence sur les hypothèses prises, sur les flux financiers entre l'État et la sécurité sociale. Nous approuvons le fait d'avoir une différenciation plus forte des LFSS selon leur objet : loi de financement initiale, rectificative lorsque c'est nécessaire en cours d'année ou d'approbation à l'image de ce qui se fait pour l'État. Le Printemps social de l'évaluation illustre l'intérêt de prévoir un moment où nous revenons sur les comptes. Le renforcement de la présentation de trajectoires pluriannuelles en annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale nous paraît également aller dans le bon sens. L'introduction du « compteur des écarts » permet de confronter une programmation à la réalité de son avancement. Cela nous paraît également porteur de sens et permet de décliner sur le champ social l'une des recommandations faites par la commission sur l'avenir des finances publiques, dite « commission Arthuis ». C'est bien dans la durée et en programmant les efforts que nous pouvons obtenir les meilleurs résultats. L'introduction d'une loi d'approbation des comptes de la sécurité sociale permettrait aussi de revenir sur l'atteinte des objectifs fixés aux politiques publiques.

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