Cette réforme « 100 % santé » est une véritable avancée, au moins sur le dentaire et les audioprothèses. Au premier trimestre 2021, nous avons la confirmation que la part des actes concernés par ces paniers sans reste à charge augmente fortement, à 55 % sur le dentaire et 40 % sur les audioprothèses. Cette percée est significative et c'est très positif pour les assurés en termes d'accès aux soins. Le bilan est plus nuancé sur l'optique.
Nous avons beaucoup de difficultés à mesurer le renoncement aux soins. Ce qui remonte aux caisses provient des missions accompagnement santé, qui accompagnent les assurés pour l'accès aux soins et aux droits. Nous avons vu en 2020 une baisse des renoncements aux soins liés au dentaire de l'ordre de 6 points. C'est un premier élément à prendre avec beaucoup de prudence mais il est bien orienté.
Comprendre l'année 2020 pose, comme l'a dit Franck Von Lennep, d'énormes difficultés. Du fait de la crise sanitaire et notamment du premier confinement, les honoraires totaux des dentistes ont baissé de plus de 7 % en 2020. Les dépenses de remboursement de l'assurance maladie pour les honoraires en dentaire ont baissé de 13 %, hors mise en place du dispositif d'indemnisation de perte d'activité. L'activité de soins dentaires est donc extrêmement difficile à lire en 2020. Elle s'est quasiment arrêtée lors du premier confinement, a repris au mois de juin avec peut-être en partie un effet de rattrapage pendant l'été. Les comportements des assurés et des professionnels en termes de rattrapage de soins sont presque impossibles à lire. Il faut aussi essayer de mieux comprendre si les soins conservateurs ont commencé à progresser.
Pour tous ces sujets, nous devrons regarder de très près l'année 2021 et nous le ferons bien sûr avec les professionnels, les organismes complémentaires et la direction de la sécurité sociale. Les chiffres du premier trimestre 2021 sont intéressants. Ils confirment la montée du panier « 100 % santé ».
Je signale que le dispositif « 100 % santé » a un intérêt même pour les personnes qui n'ont pas de couverture complémentaire parce qu'il prévoit un plafonnement tarifaire. Cela signifie donc également pour ces personnes un reste à charge moins élevé, même sans complémentaire, que ce soit parce qu'elles ne veulent pas ou ne peuvent pas en avoir. Leur exposition au reste à charge est moins importante et c'est également un élément positif.
Je partage évidemment la frustration du directeur de la sécurité sociale sur le fait que nous ne disposions pas de données consolidées sur la couverture après l'assurance maladie complémentaire. Nous sommes disponibles pour reprendre les travaux avec les différentes familles de complémentaires pour progresser dans cette compréhension à laquelle nous ne sommes jusqu'à présent pas parvenus.
Faut-il changer le système de traçabilité des flux, y compris dans les champs pour lesquels l'assurance maladie n'intervient qu'à titre très subsidiaire pour avoir une traçabilité de ce qu'il se passe ? Je comprends la logique de cette proposition mais je crains qu'elle n'implique une machinerie administrative extrêmement lourde. Cela poserait des problèmes de gestion des données, puisque cela signifierait donner accès à toutes les complémentaires santé à des données d'identification des bénéficiaires de l'assurance maladie. Cela n'est pas neutre et nous avons déjà vu que ces sujets de transmission des données vers les complémentaires sont toujours compliqués, y compris sous le regard vigilant de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
Cela nécessiterait par ailleurs entre l'assurance maladie obligatoire et les assurances maladie complémentaires une machinerie d'avance de frais qui nous semble disproportionnée. L'envoi d'un flux, même pour quelques centimes, est tout de même à la portée des offreurs de soins et des organismes complémentaires. Changer ce système nous paraît relativement délicat.
Pour conclure, il faut attendre les chiffres de 2021 mais la réforme semble très bien engagée, au moins sur le dentaire et sur les audioprothèses.